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Lacrimae

Titel: Lacrimae Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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hypothèse.
    — Avec la complicité de frère Étienne et de Charon, notaire ?
    — Ne mettons pas la charrue avant les bœufs.
    — Qu’entendez-vous par là ?
    — Que si Borée et Étienne avaient trempé dans un vil trafic de la sorte, Charon, le seul toujours bien vif, deviendrait notre principal suspect. Or, à vous écouter, il ne semble guère menaçant. Et puis, évitons les emballements d’esprit. Certes, tous trois étaient liés par ces acquisitions de reliques, du moins la Sainte Larme… mais… que vient faire votre secrétaire dans le paysage, sans oublier le pauvre Nicol, peut-être ?
    — Votre sentiment ?
    — Je me défie de mes sentiments, seigneur bailli. Toutefois, à l’évidence, l’un de ces trépassés est de trop. Ou alors, il nous en manque un pour faire bon compte !
    — Éprouvez-vous du goût à jeter le trouble dans les esprits ? demanda Louis d’Avre, un brin sarcastique.
    — Non pas. Cependant, j’avance, moi-même, à menus pas prudents.
    — Une judicieuse tactique… prisée par la douce gent, murmura le bailli en fixant Druon de son regard très bleu.

    Le mire se sentit pâlir. Une moiteur d’appréhension humidifia la paume de ses mains.
    Le bailli termina son quignon et ramassa avec soin, du tranchant de la main, les miettes éparpillées sur la table.
    — Nulle alarme, chevalier mire, ou qui que vous soyez. Votre travestissement vous vaudrait une verte remontrance assortie de pénitences de la part de l’Église. Toutefois, je ne la représente pas. Ma mission se concentre sur la justice séculière. Mon scribe a mené une brève recherche à ma demande. Aucune jolie donzelle possédant à merveille l’art médical et le raisonnement n’est recherchée dans notre région pour crimes ou délits. En d’autres termes, et même si les raisons qui vous ont incitée ou contrainte à cette mystification m’intriguent, peu me chaut votre déguisement puisqu’il ne dissimule rien de scélérat. Tout juste le trouvé-je inconvenant.
    — Monsieur, « rien de scélérat » me décrit à merveille. Je… Croyez que je n’ai rien à me reprocher, sur mon âme. En dépit de la vive estime que vous m’inspirez, il m’est impossible de vous conter la vérité. Car, de fait… vous me rejoindriez alors dans le péril. Mon silence vous garde, pour le cas où…
    Avre l’interrompit d’un geste de main.
    — Je vois. De grâce, n’en dites pas davantage. Je ne doute pas de vos affirmations parce qu’un criminel, même de maigre envergure, aurait pris l’escampe dès ma venue à Tiron. Restons-en là, voulez-vous… monsieur. Votre secret sera de ceux que j’aurai honneur et plaisir à protéger. Revenons-en à ce qui me préoccupe. Éclairez-moi sur vos sibyllins propos : « L’un de ces trépassés est de trop. Ou alors, il nous en manque un pour faire bon compte. » Si l’on s’accroche à la théorie des fausses reliques, mon secrétaire est de trop, je suis en accord. Mais lequel nous fait défaut ?
    — J’ai bien peur que la charade soit encore plus ardue et floue dans mon esprit. Reprenons ce que vous nommez la théorie des fausses reliques. Or donc, un certain Luigi Cappelli, dont le notaire brosse le portrait d’un intègre marchand, vend ces reliques. En ce cas, que vient faire l’ampoule de verre de Martin Borée, qui sent la confection récente à plein nez ? D’ailleurs, la simple présence de Borée dans cette transaction est troublante. En quoi un mercier du Perche aurait-il eu commerce avec un vendeur italien de reliques ? Laissons ce détail pour l’instant. Il n’en manque pas pour ajouter à la confusion. Le notaire vous a décrit les différentes étapes qui conduisirent l’ampoule de son étude en l’abbaye. À moins de supputer une corruption des trois serviteurs laïcs par frère Étienne, le vol, ou la substitution, ou que sais-je, n’a pas pu se produire à ce moment-là, mais avant.
    — Qui vous a enseigné la façon de faire fonctionner un esprit de la sorte ?
    — Mon père. Il vous ressemblait.
    — À la tristesse soudaine qui a envahi votre regard, je suppose qu’il n’est plus.
    — Hum… Il est toujours tant. Toutefois, vous avez vu juste : il a trépassé.
    — Un autre secret, je gage.
    — S’il ne vous déplaît.

    Druon se défendait de l’espèce d’affection qu’il ressentait pour le bailli, homme d’honneur et de parole, à n’en point douter. Cependant, les attachements,

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