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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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lirait ni ne m'achèterait ! Par les sujets que j'embrasse et par la manière dont je les traite, je suis assuré d'acheteurs et de lecteurs par toute l'Europe. Ils peuvent bien, ceux de Versailles qui vous envoient, me dépêcher des assassins. Je me fous du poison et du poignard, et si je meurs de cette façon, je ne serai pas pendu et cela déshonorera les organisateurs de ce meurtre.
    Ayant agrippé le manteau de Nicolas qu'il secouait dans sa frénésie, il grinçait des dents et écumait de fureur.
    — Ainsi, monsieur, dit Nicolas, moi qui ne vous menace point, qui au contraire vous offre le moyen honorable de sortir de cette affaire en vous présentant le moyen de nourrir et de chérir votre famille, sans les affres qui vous angoissent, en un mot qui vous tends la main, vous refusez de m'écouter ! Acceptez mes propositions et détruisez ces feuilles excessives qui font couler les larmes d'une femme dont le cœur est tendre pour les malheureux et qui a montré, en bien des occurrences, qu'elle savait répondre avec pitié aux marques d'un tempérament généreux.
    Il sembla à Nicolas que cet exorde sensible touchait Morande et qu'il hésitait un moment. Il pétrissait son tricorne, mais l'orgueil finalement l'emporta.
    — Je veux les faire censurer devant la barre de l'opinion. Ah ! vous ne connaissez pas les juges anglais. Le Béranger et ses exempts se trouvent dans leur gueule à Bow Street. Je les écraserai, ces vils serpents, et avec eux, tous ceux de la Cour ! Quant à vous, profitez de mon hospitalité, je vous ferai juge de mon style.
    Nicolas, écœuré, le salua et sortit de la chapelle. L'air froid lui fit du bien. Il décida de marcher au hasard, se réservant de prendre une voiture en cas de fatigue. Comme Éon l'avait prédit, le personnage, trop animé par la haine, n'avait pas cédé. L'avait-il seulement ébranlé ? Absorbé dans ses pensées, il heurta de plein fouet une femme en robe rouge éclatante et mantelet en peau de lapin. Elle se récria en français.
    — Fous-moi par terre, mon tout beau ! En voilà-t-y pas une brute !
    Soudain, son visage peinturluré de fard se figea dans une expression de surprise.
    — J'y crois pas mes yeux, c'est M. Nicolas ! T'es bien le dernier que j'aurais cru croiser à Londres ! Tu vois qui je suis ? Souviens-toi, la Présidente, l'amie de la Satin, une ancienne du Dauphin Couronné .
    Il reconnut en effet, sous le maquillage et l'empâtement, l'ancienne pensionnaire de la maison galante de la rue Saint-Honoré.
    — Et comment ! Que deviens-tu, ma belle ?
    — J'ai passé la Manche en 1770, profitant de la paix. Les Françaises sont très recherchées ici. Tu pourras en croiser tout un troupeau, des charmantes de chez nous. C'est bien plus facile, on a beaucoup moins la pousse 33 au cul. Les boutiques à bière nous servent de boudoirs et leurs arrière-cabinets d'alcôves. On se cache pas, la liberté est totale et l'on débite publiquement la liste de celles qui courtinent. Y a les noms, les adresses et les détails les plus chaleureux sur leur taille, leur figure et les talents qu'elles savent le mieux faire valoir. En plus, ce catalogue se renouvelle à chaque arrivage.
    Elle cligna de l'œil.
    — Ainsi la police te semble plus indulgente ici ? fit Nicolas.
    — Pas meilleure, mais moins rapineuse, sauf pour les bagnos . Les viédases 34 sont partout les mêmes. Pardon, Nicolas.
    — Il n'y a pas offense. Les bagnos , dis-tu ?
    — Oui, c'est des endroits qu'on organise des parties galantes. Les tenanciers n'y souffrent pas de scènes trop scandaleuses. D'ailleurs, ils s'exposeraient à de mauvaises affaires s'ils permettaient au monde d'insulter les filles.
    — Ainsi, tu es heureuse à Londres ?
    — Oh ! Paris me manque, mais il y a de l'ouvrage pour les gueuses qui ne fignolent pas. J'arrondis mon pécule pour revenir au faubourg Saint-Marcel et ouvrir un petit commerce ; je me tiens, mais je ne suis plus de première jeunesse. Comment va la Satin ?
    — Bien. Elle a pris la succession de la Paulet.
    — Ben ça, alors, voilà une nouvelle ! La Satin, si gentille, en mère maquerelle ! J'en reviens pas. C'est toujours l'amour entre vous ?
    Nicolas ne répondit pas.
    — C'est vrai, reprit-elle, que vous êtes liés. Comment va ton fils ?
    — Mon fils ?
    — Ben oui, le p'tit Louis, tout ton portrait. Celui-là, tu peux pas le renier.
    Nicolas sentit comme une marée de glace s'emparer de lui, il

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