L'Anneau d'Atlantide
colosses de Memnon, assis non loin l’un de l’autre, leur regard de pierre immuablement fixé sur l’horizon, et aussi le joli temple de Médinet-Habou où Adalbert promit que l’on s’arrêterait au retour.
Aldo s’étonna de la rareté des habitations humaines.
— C’est un peu une survivance d’autrefois, expliqua Adalbert. Seuls pouvaient résider sur cette rive des défunts les artisans et les ouvriers employés de père en fils à la décoration et à l’aménagement des temples et des tombes. À ceux-là, il était interdit de quitter leur village. Leurs descendants, tu peux les voir aujourd’hui : ce sont les guides, les petits marchands et les tourneurs de vases en albâtre que l’on rencontre à chaque pas… aux abords des vallées.
Aldo ayant refusé de descendre dans les tombes que l’on pouvait visiter – et il n’y en avait d’ailleurs pas beaucoup ! –, on se contenta d’une promenade dans ce paysage lunaire et silencieux où s’ouvrait par endroits le rectangle noir d’une sépulture abandonnée. Adalbert montra plusieurs sites où il avait travaillé en finissant par celui qui lui avait valu une si sévère déception :
— Il n’y en a plus guère à découvrir par ici, déplora-t-il. L’idée d’y chercher la tombe de Sebeknefrou m’avait été soufflée par un vieux marchand du Caire à qui j’avais acheté quelques objets et qui m’avait pris en amitié : « Elle a régné comme un homme, elle doit donc être dans la Vallée des Rois et j’aurais été voir depuis longtemps si mes jambes étaient encore en bon état », m’a-t-il confié. Il avait dans l’idée que ce pourrait être une nouvelle sépulture à grand spectacle à l’instar de celle que nous connaissons. Et, bien sûr, il pensait en avoir sa part. Tu sais comment ça s’est terminé ! De toute façon, j’étais déjà persuadé que c’était en Haute-Égypte qu’il fallait porter mes recherches… Et c’est ce qu’on va faire. Tiens, voilà la maison d’Ali Rachid, conclut-il en s’arrêtant devant la bâtisse principale d’un village où depuis des décennies se recrutaient les ouvriers.
Ce n’était qu’un gros cube couleur de terre, mais une terrasse plantée d’un olivier l’ennoblissait. Un Arabe de taille élevée, maigre et sec comme un vieil acacia mais sans doute aussi vigoureux, vint à leur rencontre et leur souhaita la bienvenue.
Des années de fouilles lui avaient tanné le cuir et fait grisonner les cheveux mais la jeunesse s’était réfugiée dans son regard brun où pétillaient des étincelles de contentement. Il était manifestement heureux de recevoir les deux hommes et leur fit servir par sa femme du thé, des dattes et des pâtisseries au miel.
— Ali Rachid est en quelque sorte le seigneur de ces vallées, présenta Adalbert. On en a retourné ensemble une bonne partie et j’ai toujours eu confiance en lui. Au fait, Ali ! As-tu revu Miss Hayoun ?
— Pourquoi serait-elle revenue ? Elle cherchait quelque chose pour son propre compte !
— Qu’est-ce qui te fait dire ça ?
— Pourquoi sans cela serait-elle restée ? Surtout après l’arrivée de l’Anglais.
— Mais quoi ?
Ali Rachid éleva les mains en l’air :
— Allah seul le sait ! Je crois cependant qu’elle l’a trouvé.
— À moins qu’elle n’ait été déçue. Ne pensions-nous pas déterrer ces merveilles, toi et moi ?
Ali Rachid ne répondit pas, se contentant d’un geste évasif, après quoi il se hâta de demander :
— Reviendras-tu fouiller par ici ?
— Je ne pense pas. Je crois que dorénavant il faut aller plus loin, mais lorsque j’ouvrirai mon nouveau chantier, sois assuré que je te le ferai savoir. On s’entend trop bien, tous les deux !
— Je serai toujours prêt à te rejoindre. Que regardes-tu ?
— Moktar et Hassan qui viennent de ce côté, répondit Adalbert en se levant. Je vais leur serrer la main. Eux aussi sont de bons travailleurs…
Et il descendit à leur rencontre. Ali Rachid, lui, n’avait pas bougé, son regard attentif s’était posé sur Morosini et semblait l’étudier. Enfin, il demanda :
— Tu es son ami ?
— Plus que s’il était mon frère, je crois…
— Alors, veille, si vous la rencontrez de nouveau, à le tenir à distance de la femme dont il s’inquiétait il y a un instant !
— Ce ne sera pas
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