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L'arc de triomphe

L'arc de triomphe

Titel: L'arc de triomphe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: E.M. Remarque
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allez vous enferrer davantage !
    –  Ma dignité de femme… commença Eugénie.
    –  Il vaut mieux vous y tenir, interrompit Veber, riant toujours. C’est votre meilleure sauvegarde. Je vous laisse, j’ai du travail au bureau. Vous venez, Ravic ? Au revoir, Eugénie.
    –  À demain, docteur.
    –  Au revoir, mademoiselle, dit à son tour Ravic.
    –  Au revoir », répondit-elle avec effort, et seulement lorsque Veber se fut retourné pour la regarder.
    Veber avait un bureau de style Empire. Des meubles blanc et or, très fragiles. Des photographies de sa maison et de son jardin ornaient le mur au-dessus de sa table de travail. Dans un coin une chaise longue, moderne, sur laquelle Veber passait la nuit, quand il ne rentrait pas chez lui. La clinique lui appartenait.
    « Vous prenez quelque chose, Ravic ?
    –  Du café, s’il en reste. »
    Veber prit la cafetière électrique et mit la prise.
    « Ravic, pourriez-vous me remplacer à l’Osiris cet après-midi ?
    –  Certainement.
    –  Cela ne vous dérangerait pas ?
    –  Pas le moins du monde. Je n’ai aucun projet.
    –  Tant mieux. De cette façon, j’éviterai de revenir en ville, rien que pour cela. Je veux jardiner. J’aurais demandé à Fauchon, mais il est en vacances.
    –  Ce n’est rien. Je l’ai fait assez souvent. Et puis, vous savez, quand on se trouve dans mon cas…
    –  Je sais. C ’est tellement idiot, qu’en interdisant à un homme de votre mérite de travailler ouvertement, on l’oblige à se cacher pour faire son métier.
    –  C’est de l’histoire ancienne. Tous les médecins qui se sont enfuis d’Allemagne sont dans la même situation.
    –  Tout de même, c’est ridicule ! C’est vous qui faites les opérations les plus délicates de Durant, et c’est lui qui se fait une réputation. Du reste, je suis mal placé pour parler, quoique gynécologue et non chirurgien. »
    Le café se mit à bouillir et Veber retira la prise. Il prit des tasses dans un placard et versa le café.
    « Ce que je ne comprends pas, Ravic, c’est que vous vous obstiniez à vivre dans une boîte comme l’ International. Pourquoi ne louez-vous pas un appartement près du Bois ? Au moins, vous seriez chez-vous !
    –  Oui, dit Ravic, au moins je serais chez moi.
    –  Eh bien, pourquoi ne le faites-vous pas ? »
    Ravic avala une gorgée de café. Il était amer et fort.
    « Parfois, je ne vous comprends pas, Veber. Vous me plaignez de travailler illégalement, et vous vous étonnez du fait que je ne m’installe pas dans un appartement confortable.
    –  Mais enfin, pourquoi pas ? L’un n’empêche pas l’autre ! »
    Ravic eut un sourire plein de patience.
    « Si je loue un appartement, je dois m’inscrire à la police. Pour cela, il me faudrait un passeport et un visa.
    –  Bigre. Je n’y avais pas songé. Et à l’hôtel c’est différent ?
    –  Nullement sauf quelques hôtels qui, Dieu merci, ne prennent pas les règlements trop au sérieux. »
    Il versa quelques gouttes de cognac dans son café.
    « L’International est de ceux-là. C’est pourquoi j’y vis. Je ne sais comment la patronne se débrouille. Elle doit avoir des amis influents. De deux choses l’une : ou bien la police n’est pas au courant, ou alors elle est achetée. De toute façon, j’y habite depuis longtemps sans être inquiété.
    –  J’ignorais cela, Ravic ! Je croyais tout simplement que vous n’aviez pas l’autorisation de travailler. C’est une situation horrible !
    –  Mais non, Veber. C’est le paradis… comparé au camp de concentration en Allemagne.
    –  Et si la police vient un jour ?
    –  J’aurai quelques semaines de prison et ensuite je serai expulsé. En Suisse probablement. En cas de récidive, c’est six mois de prison.
    –  Mais c’est impossible ! s’écria Veber. C’est inhumain !
    –  Oui, je sais, mais on se fait à tout…
    –  Comment on se fait à tout ?… Vous voulez dire que ça vous est arrivé ?
    –  Trois fois. Et à des centaines d’autres comme moi. C’était au début, je n’avais aucune expérience ; je comptais sur ce que l’on convient d’appeler les sentiments d’humanité. Plus tard, je suis allé en Espagne, où le passeport n’était pas requis. Là une autre leçon d’humanité me fut donnée par les aviateurs allemands et italiens. À mon retour en France, j’avais appris toutes les combines.
    –  Mais alors, dit Veber horrifié,

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