L'art de la Guerre (Les Treize Articles)
peut-être réduit à deux doigts de sa
perte.
Un général ne peut bien servir État que d'une
façon, mais il peut lui porter un très grand préjudice de bien des
manières différentes.
Il faut beaucoup d'efforts et une conduite que
la bravoure et la prudence accompagnent constamment pour pouvoir
réussir : il ne faut qu'une faute pour tout perdre ; et,
parmi les fautes qu'il peut faire, de combien de sortes n'y en
a-t-il pas ? S'il lève des troupes hors de saison, s'il les
fait sortir lorsqu'il ne faut pas qu'elles sortent, s'il n'a pas
une connaissance exacte des lieux où il doit les conduire, s'il
leur fait faire des campements désavantageux, s'il les fatigue hors
de propos, s'il les fait revenir sans nécessité, s'il ignore les
besoins de ceux qui composent son armée, s'il ne sait pas le genre
d'occupation auquel chacun d'eux s'exerçait auparavant, afin d'en
tirer parti suivant leurs talents ; s'il ne connaît pas le
fort et le faible de ses gens, s'il n'a pas lieu de compter sur
leur fidélité, s'il ne fait pas observer la discipline dans toute
la rigueur, s'il manque du talent de bien gouverner, s'il est
irrésolu et s'il chancelle dans les occasions où il faut prendre
tout à coup son parti, s'il ne fait pas dédommager à propos ses
soldats lorsqu'ils auront eu à souffrir, s'il permet qu'ils soient
vexés sans raison par leurs officiers, s'il ne sait pas empêcher
les dissensions qui pourraient naître parmi les chefs ; un
général qui tomberait dans ces fautes rendrait l'armée boiteuse et
épuiserait d'hommes et de vivres le royaume, et deviendrait
lui-même la honteuse victime de son incapacité.
Sun Tzu dit : Dans le gouvernement des
armées il y a sept maux :
I. Imposer des ordres pris en Cour selon
le bon plaisir du prince.
II. Rendre les officiers perplexes en
dépêchant des émissaires ignorant les affaires militaires.
III. Mêler les règlements propres à l'ordre
civil et à l'ordre militaire.
IV. Confondre la rigueur nécessaire au
gouvernement de État, et la flexibilité que requiert le
commandement des troupes.
V. Partager la responsabilité aux armées.
VI. Faire naître la suspicion, qui engendre le
trouble : une armée confuse conduit à la victoire de
l'autre.
VII. Attendre les ordres en toute
circonstance, c'est comme informer un supérieur que vous voulez
éteindre le feu : avant que l'ordre ne vous parvienne, les
cendres sont déjà froides ; pourtant il est dit dans le code
que l'on doit en référer à l'inspecteur en ces matières !
Comme si, en bâtissant une maison sur le bord de la route, on
prenait conseil de ceux qui passent ; le travail ne serait pas
encore achevé !
Tel est mon enseignement :
Nommer appartient au domaine réservé au
souverain, décider de la bataille à celui du général.
Un prince de caractère doit choisir l'homme
qui convient, le revêtir de responsabilités et attendre les
résultats.
Pour être victorieux de ses ennemis, cinq
circonstances sont nécessaires :
I. Savoir quand il est à propos de combattre,
et quand il convient de se retirer.
II. Savoir employer le peu et le beaucoup
suivant les circonstances.
III. Assortir habilement ses rangs.
Mensius dit : « La saison
appropriée n'est pas aussi importante que les avantages du
sol ; et tout cela n'est pas aussi important que l'harmonie
des relations humaines. »
IV. Celui qui, prudent, se prépare à affronter
l'ennemi qui n'est pas encore ; celui-là même sera victorieux.
Tirer prétexte de sa rusticité et ne pas prévoir est le plus grand
des crimes ; être prêt en-dehors de toute contingence est la
plus grande des vertus.
V. Être à l'abri des ingérences du souverain
dans tout ce qu'on peut tenter pour son service et la gloire de ses
armes.
C'est dans ces cinq matières que se trouve la
voie de la victoire.
Connais ton ennemi et connais-toi
toi-même ; eussiez-vous cent guerres à soutenir, cent fois
vous serez victorieux. Si tu ignores ton ennemi et que tu te
connais toi-même, tes chances de perdre et de gagner seront
égales.
Si tu ignores à la fois ton ennemi et
toi-même, tu ne compteras tes combats que par tes
défaites.
Article IV – De la mesure dans la
disposition des moyens
Sun Tzu dit : Anciennement ceux qui
étaient expérimentés dans l'art des combats se rendaient
invincibles, attendaient que l'ennemi soit vulnérable et ne
s'engageaient jamais dans des guerres qu'ils prévoyaient ne devoir
pas finir avec
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