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Le Baiser de Judas

Le Baiser de Judas

Titel: Le Baiser de Judas
Autoren: Hubert Prolongeau
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l’approcher.
    — N’es-tu pas déjà satisfait ? Tu
martyrises son peuple depuis des années, et il rend la vie à ton fils. Que
veux-tu de plus ?
    — Justement. Je ne comprends plus. Il m’a
dit : “Je te pardonne.”
    — Tu n’es pas le seul, répondit
méchamment Judas. Il pardonne à tous ceux qui lui font du mal. C’est une de ses
lubies. Cela ne plaît guère à ceux qui ont à se venger, mais ceux qui ont peur
de la conséquence de leurs actes sont ravis. N’est-ce pas ton cas ?
    — Tu te trompes. C’est encore pire que d’être
puni. Je ne peux plus rien faire. Son pardon m’écrase. Je vous hais, vous les
Juifs. Je me suis agenouillé devant l’un d’entre vous parce que j’étais
désespéré. Il m’a rendu le plus grand service qu’un homme puisse rendre à un
autre, et en échange il ne m’a même pas reproché le mal que je lui ai fait. Ce
n’est pas normal, ce n’est pas humain. Il n’a même pas effacé ce mal par son
pardon. Non, ce serait trop simple… Il est toujours là, mais je ne peux plus le
regarder comme avant. Cela m’a brisé. Ce pardon est une arme terrible, terrible. »
    Il tomba à genoux et parut s’abîmer en
lui-même, ne faisant plus attention à Judas.
    « Quand j’aurai le courage de le regarder
en face, je viendrai vous rejoindre. Pour l’instant, laisse-moi rester dans
votre ombre. »
    Judas s’éloigna, ne sachant quoi répondre, rageant
simplement de sentir que sa haine était émoussée.
    À l’approche de
Jérusalem, leur groupe s’effilocha. Beaucoup désespéraient de voir devant eux
ce royaume tant promis. La rudesse des paysages de Judée était, pour ceux qui n’avaient
jamais quitté la verte Galilée, une douloureuse découverte, et le comportement
de Jésus, de plus en plus préoccupé, ne les aidait guère. Son discours se durcissait.
Il prévoyait qu’il y aurait peu d’élus, maudissait les riches, affirmait que
ceux qui n’étaient pas pour lui étaient contre lui…
    « Ne croyez pas que je sois venu apporter
la paix sur cette terre, s’écria-t-il un jour. Je suis venu apporter le glaive,
séparer le fils d’avec son père, la fille d’avec sa mère, le frère d’avec sa
sœur… »
    Les disciples, qui avaient, eux, fait ce
sacrifice, regardaient avec un rien de suffisance ceux qui dans la foule
hésitaient à faire de même.
    Une autre fois, alors qu’une femme stérile lui
demandait de lui rendre sa fertilité, il déclara : « Filles de
Jérusalem, pleurez sur vous et sur vos enfants. Car voici venir des jours où l’on
dira : Heureuses les femmes stériles, les entrailles qui n’ont pas enfanté
et les seins qui n’ont pas nourri. » S’il avait espéré consoler ainsi la
fille qu’il était impuissant à guérir, il avait échoué : elle était partie
désespérée.
    Cette rudesse inhabituelle, qui n’était pas
pour lui déplaire, rappela à Judas ce jour où il avait maudit deux villes où
ils avaient été mal reçus, Bethsaïde et son Chorazim natal. Jésus avait hurlé :
« Malheur à toi, Bethsaïde, malheur à toi, Chorazim. Il y aura au jour du
jugement plus de fureur pour vous qu’il n’y en a eu pour Tyr et Sidon. »
Il écumait. Judas avait tenté de le calmer, mais Jésus l’avait repoussé, continuant
de vitupérer : « Et toi, Capharnaüm, tu seras rabaissée jusqu’aux
enfers. Même Sodome sera plus épargnée que toi. » Il avait pesté ainsi
jusqu’à la fin de l’après-midi, avant de se calmer et de retrouver sa douceur. Trois
des suiveurs étaient venus lui reprocher ce déferlement de haine et lui
annoncer qu’ils partaient. Il ne leur avait pas répondu. Mais à Judas il avait
dit : « C’est par amour aussi que j’allume ces brasiers. »
    Tous les échos de
Jérusalem témoignaient qu’il y régnait une forte tension. Pilate, soutenu par
le favori Séjan et la politique rude qu’il imposait à l’empereur Tibère, avait
multiplié les provocations, et les Juifs étaient tenus dans un mépris
grandissant. Un événement avait horrifié : après une émeute proche du
Temple, des Galiléens, qui étaient en train d’offrir des sacrifices avaient été
tués et leur sang mêlé à celui de leurs sacrifices.
    Alors, les contacts se multiplièrent entre
Barabbas et Judas. Simon était allé déjà par deux fois jusqu’à la ville, et en
était revenu avec des nouvelles encourageantes. D’après le vieux chef, Jérusalem
était à deux doigts de la
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