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Le Bal Des Maudits - T 2

Le Bal Des Maudits - T 2

Titel: Le Bal Des Maudits - T 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
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ne sais pas pourquoi, je n’ai pas pu m’arrêter… Deux sont tombés en flammes, et le troisième s’est écrasé au sol. Dix minutes plus tard, le colonel est venu me chercher. C’était un jeune type. Vous savez ce que sont ces colonels d’aviation. Il avait eu la médaille du Congrès, pour je ne sais quoi, alors que nous étions encore en Angleterre. Il a reniflé mon haleine et j’ai cru qu’il allait m’abattre sur place. Et je ne l’en blâme pas, à vrai dire, je ne lui en aurais pas voulu s’il l’avait fait…
    Krenek repoussa la culasse de son fusil, avec un bruit sec.
    –  Mais il ne m’a pas abattu, dit Papuga. Il m’a emmené auprès des appareils détruits, et il m’a montré les deux types qui avaient brûlé et m’a obligé à porter la civière du troisième, celui qui s’était écrasé au sol, jusqu’à la tente du médecin, mais il est mort avant qu’on y arrive.
    Speer s’agitait nerveusement, et Michael regretta qu’il ait eu à entendre ce pitoyable récit. Ce n’était pas cela qui l’aiderait à tenir le choc, lorsque, très bientôt, ils l’enverraient sur le front, sans crier gare, devant les fortins de la ligne Siegfried.
    –  Ils m’ont traduit devant la cour martiale, et le colonel m’a promis de veiller personnellement à ce qu’ils me pendent, reprit Papuga, et, je vous répète, je ne lui en ai pas voulu du tout. C’était un jeune type, de toute manière. Et puis, au bout de quelques jours, ils sont venus me trouver, en disant : « Papuga, nous allons te donner une chance. Nous te faisons grâce de la cour martiale, et nous te versons dans l’infanterie », et j’ai dit : « Tout ce que vous voudrez, » Ils m’ont arraché mes galons de sergent-chef, et, la veille du jour où je suis venu ici, le colonel est venu me dire : « J’espère qu’ils te casseront la gueule le premier jour où tu monteras au feu. »
    Papuga s’arrêta et se remit à contempler, au-dessus de lui, la toile de tente.
    –  J’espère, dit Krenek, qu’ils vont pas te fourrer dans la 1 ère division.
    –  Ils peuvent me fourrer où ils veulent, dit Papuga. Ça m’est absolument égal.
    Un coup de sifflet retentit au-dehors. Ils se levèrent, enfilèrent leurs imperméables et sortirent pour le rassemblement du soir.
    Il y avait eu un nouvel arrivage des États-Unis. Ils étaient tous là, sous la pluie, dans la boue, répondant à l’appel de leurs noms, et le sergent dit : « Tout le monde présent dans la compagnie L. » et le capitaine salua et s’en alla souper.
    Le sergent ne renvoya pas la compagnie. Il se mit à marcher de long en large, devant la première rangée d’hommes ruisselants, immobiles dans la boue. Le bruit courait que le sergent avait été boy de revue, avant la guerre. C’était un homme athlétique et svelte, au visage pâle, au profil acéré. Il portait le ruban de bonne conduite, et le ruban de la défense américaine, et le ruban du théâtre d’opérations européen, sans étoiles.
    –  J’ai deux ou trois petites choses à vous dire, avant que vous alliez vous emplir la panse, commença-t-il.
    Un soupir presque imperceptible courut parmi les rangs. A ce stade de la guerre, tout le monde savait que rien n’est entendu avec plaisir de ce qui sort de la bouche des sergents.
    –  Nous avons eu quelques ennuis, ces derniers jours, dit méchamment le sergent. Nous sommes très près de Paris, et quelques bougres s’étaient mis dans la tête qu’il serait fort agréable d’y aller faire un tour, histoire de tirer un petit coup. Au cas où certains d’entre vous auraient la même idée, laissez-moi vous dire qu’ils ne sont jamais arrivés à Paris, qu’ils n’ont pas tiré leur coup, qu’ils sont déjà en route pour les premières lignes et qu’il y a peu de chance pour que nous ayons la joie de les revoir.
    Le sergent se remit à faire les cent pas, tête baissée, les mains dans les poches. « Il marche tout à fait comme un danseur, pensa Michael, et il porte ses vêtements comme un soldat modèle… »
    –  Pour votre gouverne, reprit jovialement le sergent, laissez-moi vous dire que Paris est interdit à tous les G. I. de ce camp et que toutes les routes d’alentour sont infestées de M. P., et qu’ils vérifient soigneusement les papiers de tous ceux qui sortent du camp. Très, très soigneusement…
    Michael se souvint des deux hommes tournant en rond à Fort Dix devant la salle du rapport, avec

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