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Le Bal Des Maudits - T 2

Le Bal Des Maudits - T 2

Titel: Le Bal Des Maudits - T 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
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d’essayer.
    –  Whitacre…
    Michael se retourna, se trouva nez à nez avec une silhouette vaguement familière, perdue dans un vaste imperméable. Il distingua un visage abîmé, une arcade sourcilière fendue, une grande bouche charnue, souriante.
    –  Ackerman ! s’exclama Michael. – Ils se serrèrent la main.
    –  Je me demandais si tu te souviendrais de moi, dit Noah.
    Sa voix était grave et possédait, à présent, des intonations plus âgées que dans la mémoire de Michael. Son visage était très maigre, avec une expression nouvelle de maturité.
    –  Bon Dieu ! dit Michael, enchanté, dans cette masse anonyme d’êtres humains, de retrouver un homme qu’il avait connu, un garçon qui avait été son ami, un allié dans une multitude d’antagonistes. Bon Dieu ! Ackerman, je suis content de te revoir !
    –  Tu vas à la croûte ? demanda Ackerman. – Il avait sa gamelle à la main.
    –  Oui.
    Michael saisit le bras d’Ackerman, qui lui parut étonnamment osseux et fragile sous le tissu glissant de son imperméable.
    –  Le temps d’aller chercher ma gamelle. Reste avec moi.
    –  Bien sûr, dit Noah.
    Il sourit, et tous deux se dirigèrent vers la tente de Michael.
    –  Un amour de petit speech, pas vrai ?
    –  Excellent pour le moral des troupes, approuva Michael. Je me sens en état de prendre d’assaut un nid de mitrailleuses allemandes avant d’aller casser la croûte.
    Noah sourit doucement :
    –  C’est l’armée, dit-il. Ils adorent vous faire des discours, dans l’armée.
    –  C’est une tentation irrésistible, dit Michael. Cinq cents hommes alignés, et qui ne peuvent ni s’en aller ni répondre… Le cas échéant, je crois que je succomberais à la tentation, moi aussi.
    –  Et qu’est-ce que tu dirais ? demanda Noah.
    Michael réfléchit un instant.
    –  Dieu nous vienne en aide, dit-il sombrement. Je dirais : Dieu vienne en aide à tous les hommes, à toutes les femmes et à tous les enfants vivants ce soir sur cette terre.
    Il pénétra dans sa tente et revint avec sa gamelle. Puis ils se dirigèrent lentement vers la longue queue qui attendait devant la porte du mess.
    Quand Noah ôta son imperméable, dans le réfectoire, Michael vit l’Étoile d’argent épinglée sur sa poitrine et sentit renaître en lui la vieille impression désormais familière de culpabilité. « Il ne l’a pas gagnée en se faisant renverser par un taxi, pensa Michael. Le petit Noah Ackerman, qui a pris le départ avec moi, dans la même compagnie, et qui avait tant de raisons d’abandonner, et qui, apparemment, n’avait jamais abandonné… »
    Noah remarqua le regard de Michael.
    –  C’est le général Montgomery qui l’a épinglée, dit-il. Sur moi et mon copain Johnny Burnecker. En Normandie. Ils nous avaient renvoyé au dépôt d’habillement, pour qu’ils nous donnent des uniformes neufs. Patton y était, avec Eisenhower.
    »  Un lieutenant-colonel du quartier général divisionnaire – un chic type – nous avait proposés pour l ’Étoile d’argent. C’était le 4 juillet. Une sorte de démonstration anglo-américaine de bonne volonté réciproque.
    Noah sourit.
    –  Le général Montgomery m’a démontré sa bonne volonté, avec l’Étoile d’argent. Cinq points vers la démobilisation.
    Ils s’assirent à la table surpeuplée, mangèrent des rations C réchauffées, du hachis Parmentier, en buvant un café aqueux.
    –  Si ce n’est pas honteux de voir les civils se priver de leurs beefsteaks dans le filet au profit de l’armée, dit Krenek, à l’autre bout de la table.
    Personne ne rit à l’audition de cette plaisanterie usée, répétée par Krenek à presque tous les repas, depuis le camp de la Louisiane…
    Michael mangea avec plaisir en écoutant Noah lui raconter tout ce qui s’était passé entre la Floride et le dépôt de reclassement. Il regarda gravement la photo du fils de Noah (Douze points, dit Noah. Il a sept dents) et apprit comment étaient morts Rickett, Cowley, Donnelly et l’effondrement du capitaine Colclough. Il ressentit un curieux sentiment de nostalgie envers la vieille compagnie qu’il avait été si heureux de quitter en Floride.
    Noah était très différent de ce qu’il était alors. Il ne paraissait plus nerveux. Bien qu’il fût terriblement frêle et toussât considérablement, il semblait avoir trouvé une sorte d’équilibre intérieur, une paisible maturité, qui donnait à Michael

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