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Le bouffon des rois

Le bouffon des rois

Titel: Le bouffon des rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Francis Perrin
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grands esprits. On brûlait les écrits interdits de Luther et
ceux qui les colportaient. Et c’est ainsi que surgit l’« affaire des
Placards ». Une nuit, dans les principales villes de France furent collés
des placards, que vous appelez maintenant affichettes. On pouvait y lire une critique
virulente sur les abus de la messe papale et la non-croyance de la présence
corporelle du Christ dans le pain et le vin de la communion car « il était
impossible qu’un homme de trente ans se soit caché dans un morceau de
paste ». Mais qui avait bien pu en accrocher une sur la porte de la
chambre royale au château d’Amboise où nous séjournions paisiblement ?
    La consternation fut totale ; tout le monde se
soupçonnait, on me regardait de travers. François I er prit
alors conscience que ce qu’il avait toléré devenait intolérable. Ce n’était
plus une simple contestation, il fallait l’endiguer sans plus attendre. On
pressa le roi de défendre haut et fort et de manière vigoureuse la religion
catholique.
    Après une messe solennelle à Notre-Dame, François I er convoqua, pour une réunion extraordinaire, tous les membres du clergé, du
Parlement, de l’Université ainsi que les principaux notables parisiens. Il leur
fit cette déclaration :
    « La France, depuis plus de treize ou quatorze cents
ans, a toujours été la très-chrétienne fille aînée de l’Église. Dieu a protégé
notre royaume en lui accordant la grâce d’être la seule puissance qui n’a
jamais nourri de monstres [11] . Cependant,
de méchantes et malheureuses personnes ont essayé de ternir le nom de Dieu en
répandant de damnables et exécrables opinions sur le saint sacrement lui-même.
Si mon bras était infecté de cette pourriture, je le voudrais séparer de mon
corps. Si mes propres enfants devaient être assez malheureux pour tomber en de
telles exécrables et maudites opinions, je les voudrais tailler pour faire
sacrifice à Dieu. »
    Phrase malheureuse s’il en est puisque, après la mort de sa
mère, voilà qu’on jette un méchant sort funeste à mon roi. Le dauphin François,
le jeune garçon doux adoré de tout le monde, meurt après quatre jours
d’horribles souffrances à la suite de l’absorption d’un verre d’eau glacée
servi par son écuyer. Ce dernier est aussitôt accusé d’être l’empoisonneur de
son maître ; sous la torture, il est bien obligé d’avouer qu’il avait mis
de la poudre d’arsenic dans le verre d’eau. Il n’en faut pas plus pour qu’il
soit mené dans l’heure qui suit place de Grenette. On lui attache les quatre
membres à quatre chevaux et fouette cocher ! Il est écartelé et peut enfin
expirer. Mais comme s’il n’était pas assez mort, le peuple va s’acharner sur
les cinq morceaux éparpillés du condamné. On lui met la tête « presque par
petites pièces. Même les petits enfants n’y laissèrent un poil de barbe, lui
coupèrent le nez, lui tirèrent les yeux hors de la tête et à grands coups de
pierre lui rompirent les dents et mâchoires, de sorte qu’il fut si défiguré
qu’à peine on l’eût su reconnaître ».
    C’est donc son deuxième fils, Henri, qui devient l’héritier
de la couronne de France. Son père, « le cœur pressé de deuil », le
met immédiatement en face de ses responsabilités :
    « Mon fils, vous avez perdu votre frère et moi, mon
fils aîné. Imitez-le, mon fils, surpassez-le, en sorte que ceux qui,
aujourd’hui, languissent du regret de sa mort, s’apaisent en vous
voyant. »
    À genoux, Henri, du « haut » de ses dix-sept ans,
écoutait le roi lui annoncer tristement qu’il devenait dauphin de France et
qu’on allait le marier à la nièce du pape, Catherine de Médicis, qui avait le
même âge que lui. L’annonce de ce mariage ne modifia en rien sa taciturnité
habituelle. Il savait que cette épreuve du lit conjugal serait largement
compensée par les voluptés qu’il avait fort appréciées depuis peu dans le lit
de la toujours très belle Diane de Poitiers, de vingt ans son aînée. De retour
à la cour, elle avait aussitôt jeté son dévolu sur Henri « le beau
ténébreux ». Il ne portait plus que ses couleurs, le blanc et le noir.
Elle en avait fait son galant et s’était juré de le garder jusqu’à sa mort.
    J’étais bien sûr le seul porte-marotte officiel à la cour de
François I er , mais arrivèrent en masse d’autres trublions qui
se disputèrent l’honneur de faire

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