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Le Brasier de Justice

Le Brasier de Justice

Titel: Le Brasier de Justice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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encore fillettes, s’activèrent à dresser la table en un clin d’œil avant de disparaître, aussi vives et silencieuses que des sylphes 16 .
    Le mire récita le bénédicité et ils plongèrent leurs cuillers dans leurs écuelles remplies d’une soupe épaisse et savoureuse.
    Dès qu’il eut terminé la dernière goutte, Antoine Méchaud reprit :
    — Certains aspects de cette horrible histoire me troublent, je vous l’avoue. Je tourne et retourne les informations dont je dispose sans parvenir à comprendre diverses choses.
    — Lesquelles ?
    — Je mettrais ma main au feu 17 que ce bourreau d’enfants est intelligent et terriblement roué… Il ne s’agit pas d’un quelconque vagabond ou d’un ivrogne à tête de vinasse et de son…
    Antoine Méchaud s’interrompit le temps que les fillettes débarrassent leurs écuelles et déposent devant eux un épais tranchoir recouvert d’une généreuse portion de civé de connins 18 . Profitant de cette pause, Antoine Méchaud remplit leurs gobelets de vin.
    Le terme de bourreau pour désigner un tueur sanguinaire avait blessé Hardouin. Hormis cas exceptionnels, les enfants n’étaient jamais torturés par décision de justice. D’un autre côté, il avait, lui aussi, émasculé des condamnés. D’un coup, l’émoi manifeste de Blanche à son égard l’insupporta au point qu’il se sentit devenir injuste. Il lui en voulut, de façon bien incohérente, songeant que si elle avait eu la moindre idée de sa charge, elle l’aurait toisé, méprisé, évitant de le détailler ainsi qu’elle le faisait depuis son arrivée et que, d’ailleurs, il n’aurait jamais été invité céans. Au fond, sa cérémonie funèbre à lui avait eu lieu dès sa naissance. Dès qu’il avait braillé, ouvrant les yeux sur le monde, il était devenu un lépreux, un mort bien vif pour les autres. Il lutta contre la rancœur qui l’envahissait, s’admonestant : enfin quoi ? De telles pensées n’étaient guère originales et il n’y avait rien là qui puisse encore le surprendre. La phrase prononcée par le mire, dès que les petites servantes furent reparties, le fit revenir à ici et maintenant.
    — Une implacable méthode.
    — Comment cela ?
    Blanche avala une première bouchée et commenta :
    — Berthe n’aurait-elle pas eu la main un peu lourde avec le verjus 19  ?
    — Non pas, voilà plat fort goûteux, la détrompa l’exécuteur, sans la regarder. Une implacable méthode, disiez-vous ? poursuivit-il à l’adresse du mire.
    — Si fait. Douze enlèvements, séquestrations suivies de meurtres et personne n’a rien vu, rien entendu, alors même que la vigilance des uns et des autres vire à l’angoisse et à la hantise.
    — Vraiment ?
    — Hum… messire Venelle, tout ceci reste bien sûr entre nous.
    — Sur mon âme et mon honneur, monsieur.
    — Bien. Hantise, le mot s’impose. Le bailli a reçu moult dénonciations, anonymes bien sûr, dont nombre rédigées par des écrivains de rue. La plupart ont été vérifiées, à l’exclusion des diatribes inspirées par une haine farouche contre un proche ou trahissant un expéditeur privé de sens. Aucune des missives ne recelait d’indice intéressant. Et voilà qui me sidère. Nogent-le-Rotrou n’est pas une si grande ville, si peuplée, qu’un odieux assassin puisse passer totalement inaperçu, surtout pour perpétrer douze meurtres aussi abjects.
    — Selon vous, il serait étranger à la ville ? résuma Hardouin.
    — J’en doute, et pour les raisons évoquées plus tôt. Un étranger se fait vite repérer chez nous, surtout si on l’aperçoit à plusieurs reprises.
    — Un Nogentais qui demeurerait non loin de la ville et traînerait ses pauvres proies dans sa tanière ?
    Antoine Méchaud mâcha avec application sa bouchée. Blanche intervint :
    — C’est l’hypothèse à laquelle nous en sommes arrivés, messire.
    L’humeur aigre d’Hardouin avait disparu, tant il la savait injuste et déplacée. Moult femmes, jeunettes ou plus mûres, ignorant sa véritable identité, lui avaient fait comprendre qu’une courtoise et tendre insistance de sa part ne leur déplairait point. Pourtant, il avait occis la seule qui l’avait bouleversé au point d’envahir ses jours et ses nuits et pour qui « il avait été le visage de l’ignominie » : Marie de Salvin.
    Il considéra Blanche et demanda :
    — Un nouvel arrivant s’est-il installé à proximité de bourgade il y

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