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Le Brasier de Justice

Le Brasier de Justice

Titel: Le Brasier de Justice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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un autre garde se porta vers lui, ne le reconnaissant pas. Il exigea d’une voix forte mais avinée :
    — Qui va là ?
    — Le maître des hautes œuvres, pour Gaspard Bilou.
    — Euh… après l’coude. C’est la troisième… à droite, le renseigna-t-il en désignant une rangée d’alcôves exiguës taillées dans la roche, dans lesquelles un homme ne pouvait se tenir debout.
    — La clef, ordonna cadet-Venelle.
    La brute décrocha son trousseau de ceinture et, après une vague hésitation, le lui tendit en précisant :
    — J’sais plus laquelle c’est. À m’rendre en partant. Suffit d’le laisser par terre, au milieu, là où y peuvent pas l’atteindre, ceux z’autres, précisa-t-il en désignant les silhouettes d’ombres avachies, couchées ou accrochées aux barreaux de leurs cages.
    Le garde recula d’un pas lourd et traînant et disparut à l’autre bout du couloir flanqué de cellules, rejoignant sa nuit et sa petite salle où il devait ronfler entre deux ivrogneries.

    En dépit de l’air qui circulait par les fentes creusées en haut des cellules – et surtout du fait que la prison du château n’était qu’une étape au cours de laquelle les détenus n’avaient guère le temps de tomber malade, de développer des gangrènes ou autres pourrissements –, des remugles de crasse et d’excréments fouettaient le visage, odeurs de la peur et de la déchéance physique des créatures humaines.
    Hardouin cadet-Venelle avança à pas lents, environné d’un silence seulement troublé par quelques ronflements, sanglots ou quintes de toux. Les prisonniers apprenaient très vite qu’on ne beuglait, ni n’injuriait en ce lieu, au risque sans cela d’être bastonné par un gardien dont on avait gâché la sieste. Autre mesure de rétorsion, l’écuelle de soupe aux raves et au pain raté 3 de vil prix que le geôlier renversait en punition devant le captif, le privant de l’unique repas de la journée. Hardouin n’éprouvait nul chagrin pour eux, pas même de compassion, lui était leur bourreau. Sa charge ne consistait pas à explorer les raisons qui les avaient menés en ce cul-de-basse-fosse, ni s’ils avaient quelques excuses atténuant leurs forfaits. Il se contentait d’appliquer les sentences.
    Une forme sombre, tassée devant les barreaux de la cellule indiquée, attira son attention. Il s’en approcha à pas prudents, la main sur le pommeau de sa dague de ceinture.
    La silhouette emmitouflée dans un mantel de piètre qualité se leva en s’aidant des barreaux. Une femme déjà âgée se tenait devant lui. Gênés par l’obscurité partielle qui régnait, ses yeux – ce qui persistait de lui depuis qu’il avait endossé ses habits de mort – crurent d’abord voir une simple tant le visage de la femme était déformé. Il fit un autre pas et il comprit que les boursouflures jaunâtres, les tuméfactions qu’il découvrait avaient été provoquées par des coups. Son nez avait sans doute été cassé récemment et lorsqu’elle ouvrit la bouche, il remarqua ses incisives du haut ébréchées.

    Il sursauta presque lorsque la femme lui saisit le poignet, le serrant avec une étonnante force, et bafouilla :
    — Pitié. La pitié, bourreau. C’est mon gars. J’m’as faufilée. L’garde m’a point vue, rapport qu’y cuve sa piquette 4 toute la journée. C’est mon gars Gaspard qu’est là-d’dans !
    Le très jeune homme dont il devait écorcher la peau du dos à coups de fouet avant de verser du sel sur sa chair à vif et de l’achever par pendaison.
    — Lâchez-moi, la femme ! exigea-t-il d’un ton paisible. Son supplice pourrait être bien plus sévère. Un parricide, rien que cela !
    Elle obtempéra et cria en désignant son visage malmené :
    — Mais r’gardez-moi, regardez c’que cette ordure m’infligeait ! Tous les soirs, ou presque, sans parler du reste, des coups d’pied, des coups d’bûche dans l’dos, dans l’ventre… C’est ça qu’mon gars a plus pu supporter. C’te saloperie, c’te vermine allait m’tuer, l’aut’ soir… et mon Gaspard s’est interposé. Mais c’vieux pourri était déchaîné, l’a rin voulu entendre… Y voulait m’tuer, j’vous l’jure sur mon âme !
    — Écartez-vous, la femme. Je dois faire mon office.
    — Mais vous avez ben une mère, vous aussi, bourreau ! Vous l’auriez défendue, non ? Avant, le vieux l’cognait aussi, mais Gaspard est d’venu fort comme un bœuf. Y lui a

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