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Le cadavre Anglais

Le cadavre Anglais

Titel: Le cadavre Anglais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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une intrigante avait défrayé la chronique, en escroquant des sommes importantes. Pour cela, elle se faisait passer pour une maîtresse du roi. Pleine d'allure, elle persuadait ses dupes par des prétentions éhontées. Seule, affirmait-elle, la crainte d'irriter la maîtresse en place, Mme du Barry, la privait de jouir de ce titre d'une manière avouée. Elle se rendait avec régularité à Versailles, se tenait cachée dans une chambre d'hôtel garnie, et chacun la croyait appelée à la cour pour des motifs inavouables. Sartine, à l'époque lieutenant général de police, avait l'œil sur elle. Cependant, elle touchait par son mari aux puissances en place. Celui-ci ayant perdu son poste de chef de bureau aux affaires étrangères, la créature, spirituelle comme un diable, ne s'était pas fait scrupule de séduire plusieurs ministres et avait gagné l'amitié et la confiance de l'honnête abbé Terray, contrôleur général, au point qu'il avait fait nommer son époux trésorier général de la maison du roi.
    — Lui et sa femme. De réputation, dit-il.
    — Et ?
    — Fort mauvaise.
    — Votre réponse facilite ma démarche. Connaissez-vous Rose Bertin ?
    — Qui ne la connaît pas ? Il suffit pour songer à elle d'admirer les parures de la reine. Je l'ai vue passer tout à l'heure.
    — Eh bien ! Croiriez-vous qu'elle a été la victime d'une fraude de Mme Cahuet de Villers. Celle-ci s'est appliquée à imiter l'écriture de la reine pour en user dans le plus grand et malhonnête secret. Elle a payé de soi-disant ajustements, commandes prétendues, en remettant des billets forgés à la modiste de la reine. Ceux-ci ayant été présentés par Mlle Bertin en quantité, j'ai dû, à mon grand regret, dénoncer à Sa Majesté l'abus qui est fait de son nom et de sa signature. Et…
    — Et ?
    Mme Campan hésitait à poursuivre.
    — Ce n'est pas la première fois que cette dame se manifeste de la plus indélicate façon. Aussi mon mari, M. Campan, s'étant, à plusieurs reprises, trouvé chez M. de Saint-Charles…
    — Je ne le connais point.
    — Gabriel de Saint-Charles, l'amant de la dame à ce qu'il paraît. Intendant des finances dont l'un des privilèges est de pouvoir paraître le dimanche dans la chambre de la reine. La dame en question ayant peint une copie d'un portrait de la reine tenta de s'insinuer auprès de mon mari pour lui demander service de soumettre son œuvre à la reine. Imaginez l'audace ! M. Campan, connaissant la dame par la rumeur, refusa tout net la proposition. Or peu de temps après, il vit le tableau exposé sur le canapé de Sa Majesté. L'intrigante était parvenue à ses fins par l'entremise de la princesse de Lamballe ! La reine l'a renvoyé comme imparfait et au demeurant peu ressemblant.
    — Et tout cela aurait-il freiné ses manigances et brisé sa carrière ?
    — Nullement ! D'autres affaires détournées 41 sont venues à notre connaissance, preuves de la même audace délibérée. M. Basse, bijoutier, s'apprêtait à présenter des papiers à encaissement pour des objets soi-disant destinés à Sa Majesté. On parle d'une boîte en bois pétrifié, d'une tabatière décorée du profil du Vert-Galant et d'une bourse en mailles d'argent. Il va faire valoir ses droits. Voilà, monsieur, la triste conjoncture dont je vous souhaitais entretenir.
    — Et que dit la reine de tout cela ?
    — Hélas ! Victime impuissante de ces abus, elle s'est bornée à faire réprimander la coupable. J'en suis au désespoir.
    — Elle a pourtant souhaité que vous m'en parliez. Elle n'ignore pas votre démarche…
    — Oui… Il y a là une équivoque que je ne démêle pas.
    — Quoi qu'il en soit, votre attitude est judicieuse. Croyez que je m'attacherai à présenter les risques et périls de cette situation à la reine. Cependant, je ne puis aller contre sa volonté si elle se cantonne dans cette expectative d'indulgence.
    — Je ne le sais que trop bien, mais vous savoir au fait de cette trame me rassure. Même de loin vous pourrez veiller…
    — De loin, madame, de loin. Rassurez-vous, j'essaierai.
    Mme Campan se leva au moment où un groupe de courtisans sortait des appartements de la reine. Un page s'approcha de Nicolas pour lui dire que la reine l'attendait. Ils traversèrent des cabinets intérieurs. La reine depuis quelque temps s'impatientait, de notoriété publique, des retards que subissaient les projets de modification de ses

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