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Le cadavre Anglais

Le cadavre Anglais

Titel: Le cadavre Anglais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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là quand il le faut.
    Il posa sa plume si brusquement que des gouttelettes d'encre jaillirent.
    — Je ne m'y efforce pas, c'est affaire de chance.
    — Il paraît que vous n'en manquez pas, il faut le reconnaître. Ainsi la reine s'inquiète de ses dettes ?
    Nicolas s'efforçait de fixer l'encrier en vermeil étincelant à la lueur des chandelles.
    — Allons, votre silence vaut acquiescement. Rien ne m'échappe, vous devriez le savoir…
    C'était selon. L'information du ministre frappait souvent juste sans qu'il disposât toujours pour autant des éléments nécessaires pour avaliser ses affirmations.
    — … Croyez-vous que j'en sois à ignorer qu'elle s'est mise entre de mauvaises mains et qu'elle a recours à vous comme conseil et défenseur ? Que j'approuve au demeurant votre fidélité et discrétion, mais que ces égards pour une tête couronnée ne vous faciliteront guère la voie vers un dénouement heureux. Et comme je vous veux du bien…
    Le bien de Sartine n'était pas toujours de nature à conduire au mieux ; cette pensée traversa Nicolas.
    — Je vais vous confier une information dont je vous sais capable de profiter. Il y a une dame qui estime que la chasse est ouverte et que la cour est le dernier lieu où l'on braconne. Cette dame, toute friande et appétée de profits, se voit demander aide par la reine. Peignez-vous le tableau ! Sa Majesté n'en récoltera pas la moindre miette et l'autre rapinera sans vergogne. C'est de cela qu'elle tire sa subsistance dans les manigances troubles des entresols et des antichambres. La reine, sachez-le, n'est qu'un prétexte, une signature, une clé naïve qui ouvre les portes… et les coffres. Tournez votre regard vers ceux qui disposent des fonds nécessaires et qui constituent de prévisibles victimes.
    Il s'arrêta, pensif, caressant sa perruque.
    — Et cette information dont je vous suis reconnaissant implique-t-elle un nom, monseigneur ?
    — Que voilà une saine curiosité ! Je reconnais bien là mon chien courant ! Certes, oui. Tâchez d'approcher M. Loiseau de Béranger, le fermier général. Votre ami La Borde vous le présentera. Avec un peu d'habileté, et vous n'en manquez pas, vous apprendrez beaucoup sur cette intrigue.
    Il saisit sa plume, la trempa dans l'encrier et se mit à écrire sans plus se préoccuper de son visiteur. Nicolas ne broncha pas.
    — Allez, ne perdez pas de temps.
    — Monseigneur, une question cependant. Nous connaissons, vous et moi, cette femme depuis longtemps. Que ne l'arrête-t-on pas sur-le-champ ?
    Sartine le considéra.
    — Ne comprenez-vous pas qu'il convient à tout prix et par tous les moyens que rien ne concourre à compromettre la reine ? Qu'on apprenne cela, qu'un procès au grand jour s'ouvre et s'écoulera alors en flots serrés toute la sanie infecte des pamphlets, chansons, libelles qui courront les rues, toute cette engeance contre laquelle, vous et moi, luttons, depuis des années, l'hydre dont parlait naguère la bonne dame de Choisy . Mais n'est pas Pompadour qui veut et la reine n'est pas tant populaire qu'on la puisse jeter aux loups qui la déchireront à belles dents. Il faut ici mêler adroitement la force et la prudence et me pétarder l'intrigue dans l'œuf. Vous y excellez.
    Ces paroles furent assénées avec vigueur. Il allait se replonger dans ses papiers quand un laquais entra et lui parla à l'oreille. Il hocha la tête, agacé.
    — Nicolas, dit-il avec un de ces sourires étroits et forgés à l'occasion, j'ai un visiteur… une personne qui requiert l'incognito.
    Il s'était levé pour ouvrir une porte ménagée dans une bibliothèque de reliures factices. Nicolas, poussé par une main impatiente, se retrouva dans un sombre corridor au bout duquel le jour tombait à angle droit. Il découvrit l'issue qui le ramena dans l'antichambre du ministre. Il reconnut le laquais qui bayait aux corneilles et prit la fantaisie d'en savoir plus long. Il observa l'homme avec l'attention du collectionneur d'âmes. Dans ce monde-là des petits satellites du pouvoir, on trouvait de l'or pur et surtout du billon 44 à foison, et même celui-là pas toujours de bon aloi. Peut-être l'homme n'avait-il rien à se reprocher, mais… il allait tenter le coup.
    — Mon ami, la place est bonne à ce qu'il paraît, vous la tenez depuis longtemps ?
    — Depuis, monsieur, l'arrivée de monseigneur à la Marine, dit le laquais un peu ému de cette entrée en matière.
    — Certes, il

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