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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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œillades des femmes de Djem, comme une promesse permanente. À présent qu'il était dégagé de ses obligations vis-à-vis du sultan, il allait pouvoir chevaucher jusqu'au premier bouge.
    Cette perspective lui donna le courage de se lever pour écarter son volet. Du blanc, du blanc partout que vomissait un ciel introuvable. À en juger par l'épaisseur accumulée sur le rebord de sa fenêtre, les routes devaient être impraticables. Il frissonna de rage et de frustration. L'hiver à Rochechinard ! Prisonnier des éléments dans cette forteresse ! Jusque-là il n'avait pas eu le sentiment que ce fût une réalité. Il porta la main à son vit et le caressa à même l'étoffe de ses braies en imaginant quelque bouche pour l'entourer. Excepté les musulmanes que ces chiens de Turcs gardaient pour eux, les rares filles qui auraient pu le soulager étaient toutes, à cette heure, au service de Barachim Allemand. Il tordit le nez. En d'autres temps la seule évocation de leur laideur aurait suffi à le guérir. Voilà à quoi le manque le réduisait ! Se satisfaire de médiocrité alors que Philippine de Sassenage jouissait de sa chambrière. La garce. Combien serait grand son plaisir le jour où il l'embrocherait. Qu'elle crie, qu'elle se débatte ! Point de salut. Il se nourrirait d'elle à hauteur de ce qu'elle l'avait affamé !
    C'est Marthe qui l'avait affranchi alors qu'il venait d'aller plaider sa cause auprès de Sidonie. Selon la chambrière de son ancienne maîtresse, Philippine jouait aux dames avec celle qu'elle s'était inventée. Algonde de Sassenage. Sa servante. Philibert de Montoison gardait le souvenir d'une jolie fille, curieuse de ce qu'il avait raconté. À défaut de l'une, il pourrait toujours soumettre l'autre si l'occasion se présentait. Il jouirait doublement. Bigre, une servante dans l'habit d'une dame, qui, de surcroît, porterait l'odeur de sa bien-aimée ! Il pressa de nouveau sa main sur sa brayette. Sang Dieu ! qu'elle le faisait souffrir. Il ne pouvait sortir dans cet état. La faim pourtant le tenaillait. De tous côtés. Il retourna à la fenêtre et l'ouvrit malgré les bourrasques. Il se déboutonna et ramassant la neige à pleine main la pressa sur cette excroissance qui le gênait.
    Quelques minutes plus tard, il paraissait auprès de ses hommes, le visage détendu. Le froid avait fait son office et relégué ses ardeurs à de plus modestes prétentions. Il les trouva attablés dans la salle des gardes du donjon, autour d'Hugues de Luirieux. Son lieutenant se leva aussitôt.
    — La peste soit de toi, compagnon, je te croyais coulé par quelque pirate, s'exclama Philibert de Montoison en lui donnant l'accolade, leur amitié ayant depuis longtemps effacé entre eux toute manifestation de hiérarchie.
    — Grand Dieu non ! Il y a longtemps que ces chiens évitent notre pavillon.
    — Quand donc es-tu arrivé ? Pas ce matin si j'en juge par cette tempête.
    — A la nuit tombée. Cette chienlit m'a rattrapé à l'écart de tout abri. Je n'ai eu de cesse que de parvenir jusqu'ici et morbleu, il s'en est fallu de peu que je ne finisse au pied des remparts.
    — C'est ma faute, capitaine, j'étais de garde à la herse, mais le vent sifflait tant que j'ai pas entendu appeler de l'autre côté, se fustigea un des soldats, âgé tout au plus d'une vingtaine d'années.
    — Ne te reproche rien mon garçon, un autre que toi aurait été dupé de même. On n'y voyait rien. Ma chance fut de repérer une ombre qui s'approchait de la grille pour pisser. J'ai tendu le bras à travers les barreaux pour lui agripper le manteau. Ce morveux a hurlé plus fort que moi de la peur que je lui ai faite, s'esclaffa Luirieux en donnant à l'incriminé une chiquenaude sur l'oreille qu'il portait excessivement décollée.
    Le jouvenceau mêla son rire à celui des autres tandis que Hugues de Luirieux regagnait sa place pour terminer son matinel.
    — As-tu fait ton rapport? s'enquit Philibert de Montoison en s'installant de même sur le banc.
    — Point encore. J'espérais d'abord t'entretenir en privé.
    Philibert de Montoison fronça les sourcils. Hugues de Luirieux aurait dû regagner la France depuis deux bons mois déjà. S'il ne l'avait fait, connaissant son lieutenant, Philibert de Montoison ne doutait pas qu'il avait eu de bonnes raisons. Il hocha la tête. Accord tacite. L'un et l'autre dans un mimétisme parfait découpèrent une tranche de pain pour la tartiner d'un miel crémeux

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