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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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peux pas. Je ne peux plus, gémit la malheureuse en acceptant la main de Philippine dans la sienne, en ultime réconfort.
    Algonde se nettoya à la serviette mouillée. Déjà, la servante revenait avec Elora qui babillait dans la pièce voisine. Elle s'empressa de les rejoindre.
    — Allez vous reposer un moment, lui ordonna-t-elle en lui prenant sa fille des bras.
    La vieille femme ne discuta pas, certaine que la mère et l'enfant étaient perdus.
    —  Dulina alibelcié filsili palicoléna , chanta la voix d'Elora à l'oreille de sa mère à peine la servante fut-elle sortie.
    La pression d'Algonde se relâcha. Elle avait fait le bon choix. Elle revint près de Marie, tendit sa fille à bout de bras et plongea dans ce regard qui, virant à l'émeraude, avait pris une étrange profondeur.
    — Tu sais ce que j'attends de toi, n'est-ce pas ?
    —  Ouïmaona inémaïchoï , répondit Elora en tendant son index vers le pubis sanguinolent de Marie.
    — Qu'est-ce qu'elle dit ? s'étrangla Philippine, surprise.
    — Je l'ignore. Mais cette langue parle en moi. C'est celle des Anciens.
    Confiante, Philippine serra la main de Marie.
    — Encore un peu de courage, lui dit-elle tandis qu'Algonde lui déposait Elora sur le ventre.
    Malgré la nouvelle contraction, Marie se contenta d'un râle. Si l'enfant ne venait pas cette fois, c'en serait terminé. Les regards anxieux de Philippine et d'Algonde se focalisèrent sur Elora.
    La petiote appliqua ses deux mains sur le renflement et se remit à chanter. Une litanie de mots sans aucun sens pour Philippine, mais qui sembla apaiser la respiration saccadée de Marie bien plus que la caresse d'Algonde à son front. Peu à peu, une lumière bleue émana d'Elora pour les baigner toutes trois d'une chaleur douce.
    Le visage de Marie recouvra ses couleurs.
    Elle s'arqua sous une nouvelle contraction, mais plus rien sur son visage ne trahissait la souffrance.
    Quelques secondes encore et elle soupira d'aise au contraire, comme libérée d'un immense fardeau. L'enfançon glissa dans un flot de sang entre ses cuisses ouvertes.
    Algonde s'empressa de le prendre. Il avait l'épaule démise d'avoir trop longtemps empêché l'expulsion. La nuque renversée en arrière, il cherchait un souffle qui ne venait pas. Il battit pourtant des bras, lentement, comme un oiselet prêt à l'envol.
    —  Ouïmaona inémaïchoï , implora Elora en le désignant.
    — Oui, je sais, il doit vivre, comprit cette fois Algonde.
    Elle se hâta de couper le cordon et posa le mourant devant sa fille, assise à présent en tailleur sur le ventre de Marie, endormie. Elora se pencha en avant pour caresser le petit visage violacé, puis, comme Algonde l'avait fait en la mettant au monde, expira dans sa bouche ouverte.
    Émerveillée par les pouvoirs de cette enfant des fées qu'elle découvrait pour la seconde fois, Philippine étouffa un sanglot.
    La lumière s'évanouit comme elle était venue. L'enfançon toussota.
    — Ga… dit Elora le plus naturellement du monde en tendant les bras en direction de sa marraine.
    La magie s'en était allée.
    Rassurée, Algonde suspendit le nouveau-né par les pieds et le fessa vigoureusement.
    Lorsque son fils s'époumona, Marie ouvrit les yeux. Ne s'étonna de rien. Pas même d'Elora qui babillait au cou de Philippine.
    — C'est un garçon, lui annonça Algonde, joviale, en voulant le lui montrer.
    Marie détourna aussitôt la tête.
    Si ses yeux s'embuèrent de larmes, ses traits se durcirent. Quant à sa voix, bouleversant plus encore ses amies que ce qui avait précédé, elle se fit aussi tranchante que le fil d'une lame.
    — Qu'il disparaisse. Je ne veux rien savoir de lui. Jamais, le condamna-t-elle sans appel et sans remords.
    *
    Entourée de quatre femmes qui s'appliquaient à soulager sa souffrance par de savants massages, Mounia regardait les heures tourner avec confiance. Accroupie au-dessus d'une bassine d'eau de rose, les deux mains agrippées de part et d'autre d'un portique qu'on avait installé en hâte, elle soufflait en cadence des contractions. Par intermittence, on lui faisait boire un breuvage d'épices. Pour noyer le poison, lui avait annoncé sa protectrice. Bayezid avait donné ses ordres. Mounia ne devait pas mourir. La Khanoum y veillait, assise dans un coin de la chambre éclairée de centaines de chandelles. De temps en temps, elle se levait, plaquait une main experte entre les cuisses de Mounia, jaugeait de la progression du travail,

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