Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
était confiante.
    Elle avait mis six enfants au monde avant celui-ci, et bien que ses quarante ans aient affadi ses traits, elle n'avait aucune inquiétude. Jusque-là tout se passait normalement. Moins de deux minutes s'écoulaient à présent entre deux contractions. Elle savait par expérience quand viendrait le moment de pousser.
    C'était l'affaire d'un quart d'heure encore, pas davantage, et elle s'y préparait avec sérénité.
    Aymar, à l'inverse, bien plus mal à l'aise dans ce rôle qu'en plein cœur d'une bataille, était bouleversé de ses traits creusés, des cernes noirs sous ses yeux, de ce masque que la douleur lui faisait prendre. Il se sentait imbécile et totalement inutile. Pour autant il ne voulait pas la quitter. Il n'aurait que peu de temps pour jouir de son enfant avant que Marthe l'emporte. Lors, il souffrait avec la femme qu'il aimait.
    Par anticipation autant que par empathie.
    — Voulez-vous un peu d'eau ? demanda-t-il comme elle reprenait son souffle.
    — S'il vous plaît…
    Il se leva pour aller remplir un gobelet au pichet posé sur une table. Il revenait sur ses pas lorsqu'il la vit changer de tête. Il s'immobilisa.
    — Quelque chose ne va pas ?
    Sans lui répondre elle précipita ses mains sur son bas-ventre, palpa, appuya.
    Rongé d'angoisse, les yeux rivés sur son manège et oubliant qu'il l'apportait pour elle, Aymar vida le récipient d'un seul trait. Un voile de panique traversa le regard de Jeanne, achevant de l'effrayer. Dans sa précipitation à la rejoindre, le gobelet qu'il venait de lâcher tinta sur les carreaux de terre cuite.
    — Allez-vous me dire…
    Elle lui agrippa violemment le bras, froide soudain d'un sentiment d'urgence.
    — Courez chercher Algonde. Le travail s'est arrêté.
    Aymar n'eut qu'à ouvrir la porte pour constater que Philippine, écarlate, les deux mains agrippées à ses genoux, poussait déjà de son côté. L'écartelant d'un coup à la faveur d'une contraction plus violente, l'enfant se présentait. Algonde, en bout de lit, surveillait l'entrejambe, exhortant Philippine à l'effort d'une voix calme et posée.
    Le moment était mal choisi.
    Aymar jeta un regard en arrière.
    Réagissant de son côté, Jeanne avait instinctivement adopté la même position que sa fille aînée, bien décidée à forcer la nature.
    Indécis, il oscilla entre les deux pièces jusqu'à ce qu'Algonde lève la tête et l'aperçoive. Un seul regard suffit à la jouvencelle pour comprendre qu'on avait besoin d'elle de l'autre côté.
    — Continue de pousser. Ne t'arrête pas, ordonna-t-elle à Philippine avant de s'élancer vers Aymar.
    — Restez avec elle.
    — Mais je…
    — Restez avec elle ! répéta-t-elle en le bousculant pour passer, refermant d'autorité la porte sur lui.
    « Dieu ! que les hommes sont empotés ! » songea-t-elle en gagnant le lit de Jeanne, retombée en arrière pour reprendre souffle.
    — Qu'arrive-t-il ?
    Jeanne était livide.
    — Tout s'est arrêté. Je crois qu'il est mort-né, dit-elle simplement en dodelinant de la tête.
    Un frisson glacial courut le long des reins d'Algonde.
    — Vous permettez ? demanda-t-elle en rejetant le drap en arrière.
    Jeanne hocha la tête. Ne cilla pas lorsque la main d'Algonde passa en elle, pas davantage lorsqu'elle la retira.
    — La tête n'est pas engagée, pourtant vous êtes très ouverte. Je ne comprends pas, annonça Algonde, se référant à son expérience avec Marie.
    Jeanne tordit la bouche.
    — S'il est vivant encore, il doit être trop gros pour passer.
    Algonde sentit l'angoisse lui broyer le cœur.
    — Est-ce à dire que…
    — Nous allons mourir lui et moi si on ne le libère pas.
    Se repoussant de ses pieds, Jeanne se redressa contre les oreillers. Déjà, elle reprenait le contrôle. Elle tendit la main à Algonde, la serra dès qu'elle s'en fut emparée et baissa la voix.
    — Il faut m'aider, Algonde. Qu'il soit mort ou vif, cet enfant doit naître, vous le savez autant que moi.
    — Je ne crois pas qu'Elora puisse intervenir, mais je vais aller la chercher.
    — Non, la retint Jeanne. Nous n'avons plus le temps d'essayer. C'est maintenant qu'il faut agir. Maintenant, Algonde.
    La jouvencelle hocha la tête.
    À cet instant la porte s'ouvrit sur Aymar de Grolée, attirant leur attention à toutes deux.
    — Il est né, dit-il d'une voix troublée. Je crois que vous devriez y aller, Algonde…
    Un sanglot leur parvenait. Philippine

Weitere Kostenlose Bücher