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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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pleurait.
    — Je me charge d'Aymar. Expliquez ce qui se passe à ma fille et revenez. Vite, lui ordonna Jeanne.
    La laissant se précipiter, elle sourit tristement au sire de Bressieux qui s'était approché.
    — Mon ami, dit-elle, je vais vous demander la chose la plus difficile qui soit.
    — Tout ce que vous voudrez, assura-t-il en lui pressant la main, aussi troublé de ce qu'il venait de voir que de son état, inchangé.
    — Avez-vous encore à votre ceinture ce poignard qui, si joliment, a tracé nos initiales au bois de lit de la maison forte de Saint-Pierre ?
    Il hocha la tête, inquiet.
    — Activez le feu et mettez-le à rougir, je vous prie.
    Il déglutit.
    — Et ensuite ?
    Des larmes perlèrent aux yeux de Jeanne.
    — Ensuite …
    Elle reprit son souffle.
    — … ensuite vous me direz adieu, mon amour… et vous sortirez.
     
    Tournée sur le côté, Philippine hoquetait dans son coude replié. Sans s'en inquiéter, Algonde s'en fut se pencher sur le grand panier garni de linges qu'elle avait préparé pour accueillir le nouveau-né. Bien qu'elle y fût préparée par le contenu même de la prophétie, elle eut un mouvement de recul. La voix de Philippine la cueillit depuis le lit, bouleversante d'effroi.
    — Un monstre. J'ai donné naissance à un monstre !
    Algonde courut la prendre dans ses bras.
    — Un enfant roi. Voilà ce qu'il sera.
    Philippine redoubla de larmes. Elle ne le croyait pas. Ne voyait que ce poupon si velu de la tête aux pieds que seuls ses yeux, d'un bleu de cyan, lui donnaient un semblant d'humanité.
    — Que vais-je faire ? Oh ! mon Dieu ! Algonde, que vais-je faire ?
    — Ce que nous avons dit. Regarde-moi, dit-elle en lui levant le menton de son index replié. Regarde-moi Hélène. Depuis des siècles cet enfant est attendu, espéré. Il n'est pas comme les autres et il faut l'aimer comme tel.
    — On dirait le diable en personne, frémit Philippine, désespérée.
    — Regarde-le avec ton cœur. Seulement ton cœur et tu le verras tel qu'il est.
    Algonde essuya de petits baisers ses joues qui ruisselaient.
    — Je dois retourner de l'autre côté, à présent.
    — NON ! la supplia Philippine.
    Algonde s'arracha à sa tenaille et, la prenant aux coudes, fouilla ce regard égaré.
    — Ta mère va mourir si je n'interviens pas. Ce n'est pas ce que tu veux, n'est-ce pas ?
    Philippine se liquéfia entre ses mains. Algonde la secoua, presque violemment, pour la forcer à réagir.
    — Tu dois te reprendre. Seule. Et me faire confiance… Tu en es capable Hélène… Tu dois en être capable.
    Philippine baissa les yeux. Sans plus attendre, Algonde s'écarta. Elle était presque à la porte lorsque la voix de Philippine, presque un murmure, lui parvint :
    — Tu crois que Constantin… pour un futur roi ?
    Algonde pivota de trois quarts pour lui sourire.
    — C'est le plus joli nom qui soit, affirma-t-elle avant de relever le loquet.
     
    Jeanne était seule dans la pièce.
    — Le baron ?
    — Il nous aurait gênées…
    Algonde n'insista pas. Dans ce visage creusé, brûlant à présent de fièvre et d'une pâleur diaphane, se lisait une froide détermination qui forçait le respect.
    — Il va vous falloir inciser mon ventre, de bas en haut. Trop profondément, vous pourfendrez l'enfant, trop superficiellement, vous ne pourrez le récupérer. Je ne veux pas savoir si vous vous en sentez capable, Algonde. Je veux juste que vous le fassiez, sans vous préoccuper de moi.
    — C'est compris, assura la jouvencelle en affirmant sa volonté.
    — Bien ! Rapportez de l'eau chaude dans une cruche, et des linges aussi. Ensuite vous prendrez le poignard dans les braises. Il doit être rouge à présent, dit encore Jeanne en rejetant les coussins à terre pour s'allonger entièrement.
    Quelques minutes suffirent à Algonde pour que tout soit prêt. Elle se pencha au-dessus du ventre bombé et immobile. Sa main, armée, se mit malgré elle à trembler. Jeanne redressa la tête. Son regard dégageait une force sereine.
    — Ne doutez pas, ma fille. Si vous avez longtemps cherché une raison à votre dévouement, c'est ici et maintenant que vous la trouverez. Allez.
    Elle se laissa retomber sur le drap. Retenant son souffle, Algonde commença d'inciser.
    Au même instant, le coq se mit à chanter.
    *
    Mathieu s'éveilla à son cocorico. L'heure des panetiers, ici ou ailleurs, était toujours la même. Sa main, câline, chercha l'arrondi d'une

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