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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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intersection. Pour tromper l'angoisse que faisait naître en elle, malgré ses résolutions, l'isolement dans lequel elle se trouvait, elle ânonnait des cantiques tout en prenant grand soin de ne pas noyer la mèche de sa chandelle dans la cire fondue. Ponctuant parfois la régularité des parois, la flamme accrochait de sa mouvance une niche jonchée d'ossements ou une excroissance de pierre nappée d'ombre qui la faisaient déglutir, tendre l'oreille et presser le pas pour les dépasser avant de se moquer d'elle-même. Elle était seule. Seule. Et n'avait rien à craindre. Peu à peu elle se rassura et, malgré sa fatigue grandissante, gagna en témérité. N'allait-elle pas revoir ses enfants ? glisser au-dessus de leurs visages assoupis le sien avide de les découvrir après tant d'années ? Un sourire apaisé illumina ses traits. Jusqu'à ce qu'elle perçoive un écho, loin devant elle. Un instant, elle pensa que son imagination se jouait de sa lassitude. Elle avança encore avant de s'immobiliser et de tendre l'oreille. Son cœur accéléra dans sa poitrine. Non. Elle ne rêvait pas. Quelqu'un venait dans sa direction. Pour rejoindre de toute évidence l'endroit qu'elle avait quitté. Dans quel but ? Elle se mordit la joue, étouffant un petit cri d'angoisse. Marthe. Ce ne pouvait être qu'elle. Pour l'occire. Une fraction de seconde, elle voulut faire volte-face et courir à perdre haleine. Ce faisant, son regard accrocha l'ombre d'une aiguille de roche masquant une des niches qu'elle venait de dépasser. Les pas se rapprochaient, pour autant aucune lumière ne trouait l'obscurité. Rattrapée par son instinct, Jeanne gagna l'aspérité, moucha sa flamme et se terra, le souffle si court qu'elle pensa un instant qu'elle finirait là, asphyxiée.
     
    Toute à sa progression solitaire et rapide, Marthe dépassa sa cache sans la remarquer. Du moins le laissa-t-elle croire, car depuis quelques pas, son odorat avait accroché une incongruité dans ce lieu dépourvu de toute activité. Un relent de suif emplissait la voûte, masquant à peine celui de la chair humaine, reconnaissable entre tous.
     
    Jeanne attendit que les pas s'estompent avant d'ôter délicatement ses souliers. Elle tâta sa ceinture par réflexe. Vérifier, bien qu'elle l'ait fait avant de partir, qu'elle avait toujours dans sa bourse un briquet d'amadou et deux chandelles de rechange. Plus loin, se dit-elle en quittant son abri. Elle rallumerait plus loin. Suivant la paroi du plat de sa main, elle s'esquiva le plus vite possible, jusqu'à courir au mépris de la roche qui lui déchirait les doigts. Avec une seule idée en tête. Retrouver les siens.
     
    Immobile dans le souterrain, les sens aux aguets, Marthe hésita quelques secondes avant de poursuivre son chemin. Qui que soit celui ou celle qui fuyait, elle n'en avait rien à craindre et aurait tôt fait de le retrouver. Elle n'était plus très loin de son but. Elle s'élança dans une course qu'aucun humain n'aurait pu rattraper. Quelques minutes plus tard, elle atteignait la crypte souterraine, amorçait le mécanisme, sortait par la dalle, traversait la chapelle puis la cour du château et forçait le pas de l'hospice sans être le moins du monde inquiétée.
     
    Sœur Albrante n'aurait su dire ce qui la tira du sommeil. Aucune malade ne séjournant en ce lieu, elle y passait des nuits sereines que son âge grandissant prenait goût à allonger entre les différents offices. Dressée sur sa couche par un pincement au cœur, inhabituel chez elle, elle tendit l'oreille, jusqu'à acquérir la certitude qu'on bousculait ses cornues dans la pièce voisine.
    — Ah çà! gronda-t-elle en se levant précipitamment.
    Glissant dans ses souliers, elle alluma sa chandelle, enroula un châle sur sa chemise de nuit. Qui donc ici se croyait assez savante pour se passer de ses services ? Ne savait-on pas que ce qui soigne peut tuer ? Résolue à sermonner vivement l'imprudente, elle se faufila dans le corridor étroit et se dirigea sans mollir vers l'huis entrebâillé.
    — Je voudrais bien voir… commença-t-elle en poussant le battant avec humeur.
    Les mots s'étranglèrent dans sa gorge. Battue par la flamme dansante, la Harpie venait de faire volte-face à son entrée. Albrante recula d'un pas devant sa laideur diabolique, saisie d'effroi et de surprise. Prisonnier de ses ongles crochus et noirs, le flacon pyramide que Marthe venait de voler dans le coffre forcé focalisa les yeux

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