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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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elle.
    — Quoi ?
    — Le cri.
    — Non. Tu auras rêvé, affirma-t-il en se pelotonnant tout contre elle.
    Il aimait pour s'endormir se rassurer du parfum de mousse de sa peau.
    — Quelqu'un a hurlé, Mathieu. Derrière ce mur qui sonne le creux. J'en suis certaine, affirma-t-elle d'une voix morte.
    Algonde se sentait glacée. Comme si ce cri jailli des profondeurs de la pierre était le dernier d'un être désespéré. Un cri étouffé qu'il lui semblait encore entendre. Elle se réchauffa pourtant du contact de son époux et de ses doigts qui caressaient nonchalamment un sein sous le lin de la chemise.
    — Oublie ça et rendors-toi ma bécaroïlle, chuchota Mathieu dans le creux de son oreille avant d'y caler son menton piquant d'une barbe naissante.
    Algonde se relâcha. Sans doute avait-il raison. À quelques pas d'eux, nullement troublée par l'incident, la petite Elora dormait paisiblement dans son berceau, le bout de son pouce touchant encore l'ourlet de ses lèvres. Leur fille avait l'ouïe fine. Et l'instinct prédominant. Or, elle n'avait pas bougé. Peu à peu, la main de Mathieu se fit lourde sur sa poitrine. Algonde évita de remuer pour ne pas l'éveiller encore. Ce travail à la paneterie lui était important. Mathieu refusait l'idée que les largesses de Philippine soient leur seul revenu. Son orgueil ne pouvait l'admettre. C'était déjà bien assez difficile pour lui de se cacher de tous. De rejoindre sa femme après le couvre-feu et de quitter sa couche avant que tous ne se lèvent. Pour la noblesse, Algonde demeurait damoiselle. Une damoiselle dont l'époux, un petit baron désargenté, avait eu le mauvais goût de mourir au lendemain de leur nuit de noces, la laissant alors enceinte d'Elora et, ce jourd'hui, incapable malgré la naissance de l'enfant de convoler à nouveau. Algonde se serait volontiers défaite de ce mensonge, mais outre le fait que Philippine refusait de perdre la face devant ses pairs et que les petites gens du castel la haïssaient pour ses privilèges, Algonde fournissait à Philippine une compagnie idéale pour rencontrer Djem en toute discrétion. N'avait-elle pas tué Catherine de Valmont cet après-midi même, et sans remords, pour garantir leurs amours impossibles ?
    Algonde fut rattrapée par ce souvenir. Ce cri, là, derrière, n'était-il pas celui du fantôme de Catherine rendu furieux par l'impunité dont jouissait sa meurtrière ? Car de fait, bien que le prévôt ait longuement examiné la dépouille de la damoiselle, rien n'avait laissé penser à une fin autre que naturelle. Personne n'avait vu Algonde sur les lieux du crime. Rejoignant Philippine au pied du petit réservoir, Algonde l'avait trouvée évanouie. Elle avait craint un moment que sa maîtresse ne l'ait suivie, mais en reprenant ses esprits, Philippine avait été incapable de lui raconter ce qui s'était passé. Elle ne se souvenait de rien. Algonde lui avait assuré quant à elle avoir poursuivi une ombre qui s'était soudainement volatilisée, de sorte qu'en apprenant la mort de Catherine quelques minutes plus tard Philippine en avait conclu que sa dame de compagnie avait eu le malheur de croiser ce diable et d'en mourir d'effroi. Algonde n'avait pas démenti. Un frisson détestable lui courut le long de l'épine dorsale. Était-elle désormais dépourvue de sentiments ? de compassion ? de morale ? Était-elle devenue une de ces créatures monstrueuses qu'elle voulait tant combattre ? À y regarder de plus près, là, dans l'oubli de cette chambre, son crime lui apparaissait soudain dans toute son abjection. Catherine de Valmont l'avait menacée, certes. Elle voulait l'empêcher de nuire, mais était-ce une raison suffisante pour l'assassiner ? Et avec autant de sang-froid ? Un sanglot monta dans sa gorge. Quelle était cette force en elle qui s'était imposée comme vérité ? Celle des Anciens ou l'autre ? La diabolique, l'inhumaine ? Qui était ce jourd'hui Algonde de Sassenage en réalité ?
    « Agis en ton âme et conscience. Laisse ton instinct parler. Lui seul de par tes origines saura te guider. Crois en toi, Algonde, et tu ne te perdras pas », lui avait assuré la fée Présine lorsque, avant de quitter Sassenage, elle était allée l'embrasser avec Elora et Mathieu. Et si sa mère-grand s'était trompée ? Si elle avait été pervertie par Marthe bien au-delà de ce qu'elles deux avaient imaginé…
    Mathieu se retourna et la morsure du froid hivernal étreignit

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