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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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au plafond de fine poussière.
    Le ventre rond noué d'un tablier contre sa table de travail, le maître panetier, un homme chauve au visage bonasse, pétrissait la pâte de ses mains larges et expertes. Elle s'approcha de lui, comme il en plongeait une dans un sac ouvert de farine pour saupoudrer sa miche qui lui collait aux doigts.
    — Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-il en reconnaissant Algonde, un brin d'inquiétude dans le ton.
    La nuit s'étirait et comme tous, serviteurs zélés au château, il avait le sentiment qu'il n'arriverait jamais à ce que tout soit prêt pour le banquet de noces.
    — Je dois vous prendre Mathieu une petite heure.
    Le visage se ferma. Un de moins à la fournée n'arrangeait pas ses affaires.
    — Et qui le réclame ?
    — Dame Hélène, mentit Algonde.
    Point d'autre explication. L'homme savait se contenter depuis longtemps des caprices de ses maîtres.
    — Une heure, pas davantage. Plus et je ne réponds de rien. Dites-le à notre dame.
    Algonde le lui assura, quitta la place, le nez chatouillé par les projections de farine, et toqua sur l'épaule de Mathieu à peine moins blanc. Le visage de son époux s'éclaira de la trouver derrière lui.
    — Pose ton palet. J'ai besoin de toi.
    Il écarquilla des yeux.
    — Maintenant ?
    — Je me suis arrangée avec ton patron.
    Mathieu ne chercha pas à en savoir davantage. Il fit glisser sa plaque dans la gueule béante, referma sur elle la porte du four avec un crochet muni d'une poignée de bois, posa ses outils contre un mur, dénoua son tablier puis, tout en s'essuyant le visage d'un coin de tissu, se défaussa auprès d'un confrère.
    Algonde l'entraîna aussitôt en direction du corps de logis, vers la réserve de bois qui séchait sous un toit de tuiles soutenu par quatre poteaux. L'endroit était désert à l'exception d'un écureuil, lequel détala pour grimper le long d'un tronc d'arbre tout proche. Algonde contourna le tas avalé par l'obscurité et, s'adossant à un des piliers, croisa les bras sur sa poitrine.
    — L'heure est venue de choisir, Mathieu, dit-elle d'un ton grave.
    Un instant, il en resta bouche bée.
    — Choisir quoi ?
    — Ton camp. Définitivement.
    Il s'assit avec lassitude sur une petite pile de rondins solidement entassés en pyramide.
    — Je croyais l'affaire entendue. Je te l'ai dit. Elora et toi m'avez convaincu l'autre soir.
    De fait, depuis que leur fille les avait baignés de sa lumière, Algonde et lui s'étaient retrouvés comme avant. Du moins l'avait-il cru. Il se prit à en douter et fouilla l'obscurité ambiante pour tenter de déchiffrer l'expression d'Algonde à quelques pas de lui. Il n'y parvint pas et se sentit mal à l'aise de son silence prolongé.
    — Si c'est là tout ce que tu avais à me dire, cela aurait pu attendre, grommela-t-il.
    Quittant son appui, elle vint s'asseoir à ses côtés, nicha sa main dans la sienne, abîmée par l'épervier.
    — Non, mais là est l'essentiel. La confiance. En possèdes-tu assez en moi ?
    Il lui enroula son bras autour des épaules, l'attira à lui. Elle nicha son oreille dans le creux de son cou.
    — Que dois-je faire pour te le prouver ?
    — Marthe ne doit pas deviner que tu as changé d'avis et je tiens l'occasion de la persuader de ta constance.
    Le front de Mathieu se plissa.
    — Je ne suis pas certain d'être capable de la tromper.
    — Qui parle de cela ? lui objecta Algonde. Non, je veux que tu ailles la trouver et lui dises la vérité, puisque c'est ce que je vais te révéler.
    — À cette heure ? grinça Mathieu, écœuré à cette seule perspective.
    Algonde porta ses doigts raides à ses lèvres et les embrassa.
    — Je sais ce qu'elle te fera en retour, mais cela ne compte pas. Notre avenir ce jourd'hui dépend de toi.
    — En ce cas, décida-t-il, ne perdons pas davantage de temps. Je t'écoute.
    *
    Tandis que Mathieu se trouvait chez Marthe, Algonde regagna sereinement ses appartements par le souterrain qu'elle avait finalement découvert dans le secret de sa cheminée, depuis une autre entrée située sous la tapisserie de la salle de musique. Lorsque Jacques de Sassenage lui avait avoué la vérité concernant son épouse Jeanne, elle s'était souvenue du cri qu'elle avait entendu derrière la paroi, une nuit. La date correspondait à celle de la mort de sœur Albrante. Elle s'en était aussitôt ouverte au baron. C'était son témoignage, elle le savait, qui avait permis l'évasion de Jeanne.

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