LE CHÂTEAU DANGEREUX
contre les gens qui seraient coupables, par arrêt ou autrement, de la manière la plus rigoureuse, ainsi que l’avait recommandé de Walton lui-même, alors que Douglas-le-Noir et ses complices avaient été les principaux objets de ses vigilans soupçons. Ces détachemens divers avaient de beaucoup réduit la force de la garnison : néanmoins, quoique nombreux, actifs et dépêchés dans toutes les directions, ils n’eurent le bonheur ni de découvrir les traces de lady Augusta de Berkely, ni de rencontrer aucune bande d’insurgés écossais.
Cependant nos fugitifs, comme nous l’avons vu, avaient quitté le couvent de Sainte-Bride sous la conduite d’un cavalier dont lady Augusta ne savait rien, sinon qu’il devait diriger leurs pas dans une direction où ils ne seraient pas exposés au risque d’être repris. Enfin Marguerite de Hautlieu entama elle-même la conversation sur ce sujet.
« Lady Augusta, dit-elle, vous n’avez demandé ni où vous alliez ni sous la protection de qui nous voyagions, quoiqu’il me semble que ce soit une chose importante à savoir. »
« Ne me suffit-il pas, répondit lady Augusta, d’être sûre que je voyage, ma chère sœur, sous la protection d’un homme auquel vous vous fiez comme à un ami ? et qu’ai-je besoin de m’inquiéter davantage de ma sûreté ? »
– « Simplement parce que les personnes avec lesquelles je suis en relation, par des circonstances tant de pays que de parenté, ne sont peut-être pas tout-à-fait des protecteurs auxquels vous pouvez, vous, madame, vous confier avec toute sûreté. »
– « Que voulez-vous dire en parlant ainsi ? »
– « Que Bruce, Douglas, Malcolm Fleming, et d’autres de ce parti, quoiqu’ils soient incapables d’abuser d’un tel avantage pour un but déshonorant, pourraient néanmoins ressentir une forte tentation de vous considérer comme un otage jeté entre leurs mains par la Providence, au moyen duquel il leur serait possible d’obtenir un arrangement favorable à leur parti abattu et dispersé. »
– « Ils pourront me prendre pour me faire servir de base à un pareil traité quand je serai morte, mais, croyez-moi, jamais tant qu’il me restera un souffle de vie. Croyez encore que, malgré la peine, la honte, la mortelle douleur qui m’en reviendraient, je me remettrais plutôt au pouvoir de de Walton, oui, que j’irais plutôt me mettre entre ses mains, que dis-je, entre ses mains ? je me livrerais plutôt au dernier archer de mon pays natal, que de comploter avec ses ennemis pour nuire à la joyeuse Angleterre, à mon Angleterre, à ce pays qui excite l’envie de tous les autres pays, et fait l’orgueil de tous ceux qui peuvent se vanter d’y être nés ! »
– « Je pensais bien que tel serait votre choix, et, puisque vous m’avez honoré de votre confiance, je contribuerai volontiers à votre liberté, en vous plaçant dans la position où vous désirez être, autant que mes pauvres moyens me permettront de le faire. Dans une demi-heure nous serons hors du danger d’être pris par les troupes anglaises qui vont être envoyées à notre poursuite sur toutes les directions. Maintenant écoutez-moi, lady : je connais un lieu où je puis me réfugier auprès de mes amis et compatriotes, ces braves Écossais qui n’ont jamais, dans ce siècle de honte, fléchi le genou devant Baal. De leur honneur, de la pureté de leur honneur, j’aurais pu à une autre époque répondre sur le mien propre ; mais depuis un certain temps, je dois vous le dire, ils ont été mis à des épreuves par lesquelles les plus généreuses affections peuvent être éteintes et poussées à une espèce de frénésie d’autant plus violente qu’elle est originairement fondée sur les plus nobles sentimens. Un individu qui se sent privé des droits naturels que lui donne sa naissance, dénoncé, exposé à la confiscation et à la mort, parce qu’il défend les prétentions de son roi et la cause de son pays, cesse souvent d’être équitable et juste lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de représailles qu’il lui est légitime d’exercer en retour de semblables injustices ; et, croyez-moi, je serais amèrement affligée si je vous avais mise dans une position que vous auriez pu considérer comme fâcheuse ou dégradante. »
– « En un mot, donc, que craignez-vous que j’aie probablement à souffrir de la part de vos amis, qu’il faut m’excuser d’appeler
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