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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colleen McCullough
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jusqu’à une chaise, et me pris la tête dans les mains. Même Briséis était victime de ma folie, car c’était bien de folie qu’il s’agissait. Comment guérir ?
    Quelque chose m’enveloppa les jambes, tira faiblement sur l’ourlet de mon pagne. Terrifié, je levai la tête pour voir quelle nouvelle apparition était venue me tourmenter et regardai, déconcerté, la tête chenue et le visage crispé d’un très vieil homme. Priam. Ce ne pouvait être personne d’autre. Quand je me redressai, il me saisit les mains et se mit à les baiser. Ses larmes coulèrent sur ma peau à l’endroit même où avait coulé le sang d’Hector.
    — Rends-le moi ! Rends-le moi ! Ne le donne pas en pâture à tes chiens ! Ne le laisse pas sans sépulture. Ne lui refuse pas les rites funèbres ! Rends-le moi !
    Je regardai Briséis, les yeux embués de larmes.
    — Viens, seigneur, assieds-toi, dis-je en le relevant. Un roi ne devrait avoir à implorer personne. Assieds-toi.
    Automédon se tenait dans l’encadrement de la porte.
    — Comment est-il arrivé ici ? lui demandai-je.
    — Dans une charrette conduite par un simple d’esprit. Un pauvre malheureux qui marmonnait des mots dénués de sens. L’armée est encore en train de festoyer, la garde à l’entrée du gué est assurée par des Myrmidons. Le vieillard a prétendu qu’il avait une affaire à traiter avec toi. La charrette était vide et aucun d’eux n’était armé, alors on les a laissés entrer.
    — Fais du feu, Automédon. Ne souffle mot de sa venue à personne. Informes-en la garde et remercie-la de ma part.
    Tandis que j’attendais que le feu fût allumé, car il faisait froid, j’approchai un siège du sien et pris ses mains noueuses dans les miennes en les frottant pour les réchauffer. Elles étaient glacées.
    — Il t’a fallu un grand courage pour venir ici, seigneur.
    — Non, pas du tout, répondit-il en me regardant droit dans les yeux. Je gouvernais un royaume heureux et prospère, jadis. Puis j’ai commis une erreur. Je suis seul responsable. Vous, les Grecs, avez été envoyés par les dieux pour me punir de mon orgueil. De mon aveuglement. Non, il ne m’a pas fallu une once de courage pour venir ici, ajouta-t-il. Hector a été le prix que j’ai finalement dû payer.
    — Le prix que tu devras finalement payer, répliquai-je malgré moi, sera la chute de Troie.
    — La chute de ma dynastie, peut-être, mais pas celle de la cité. Troie est trop grande pour cela.
    — La cité de Troie tombera.
    — Sur ce point, permets-moi de n’être pas d’accord, mais j’espère que nous le sommes sur l’objet de ma venue. Prince Achille, donne-moi le corps de mon fils. Je paierai la rançon qui convient.
    — Je n’exige nulle rançon, roi Priam. Ramène-le chez lui.
    Il tomba à genoux une seconde fois pour me baiser les mains ; j’en eus la chair de poule et me dégageai.
    — Assieds-toi et partage mon repas pendant que je fais préparer Hector. Briséis, occupe-toi de notre hôte.
    Soudain une pensée me traversa l’esprit.
    — Le baudrier d’Ajax appartenait à Hector, mais pas l’armure. Automédon, trouve-le et place-le dans la charrette auprès de sa dépouille.
    Quand je revins, Priam s’était ressaisi. Il avait soudain changé d’humeur, comme cela arrive souvent aux vieillards, et bavardait gaiement avec Briséis, lui demandant si la vie commune avec moi lui plaisait alors qu’elle était originaire de la Maison de Dardanos.
    — Je suis heureuse, seigneur. Achille est un homme de cœur. Seigneur, pourquoi est-il à ce point persuadé de mourir bientôt ? ajouta-t-elle en se penchant vers lui.
    — Les destins d’Achille et d’Hector sont liés, déclara le vieux roi. Les oracles l’ont dit.
    En me voyant, ils changèrent de sujet. Nous dînâmes et je m’aperçus que je mourais de faim, mais je m’obligeai à ne pas manger plus que Priam et bus avec modération.
    Ensuite, je le reconduisis à sa charrette dans laquelle reposait le corps d’Hector, caché par un drap. Priam, sans regarder dessous, s’installa près du simple d’esprit et s’en fut, se tenant droit et fier comme s’il eût été dans un char d’or massif.
     
    Briséis m’attendait. J’allai droit à notre lit tandis qu’elle éteignait les lampes.
    — Es-tu trop fatigué pour te dévêtir ?
    Elle dégrafa ma tunique et ma ceinture, ôta mon pagne. Épuisé, je mis les bras au-dessus de ma tête et restai

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