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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colleen McCullough
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maintenant, nous pouvons faire entrer l’animal avant même la tombée de la nuit.
    — Non ! Non ! hurla Laocoon, dont le visage reflétait la terreur. Non, seigneur ! Laisse-moi d’abord consulter Apollon, je t’en prie !
    — Fais ce que tu juges bon, Laocoon, répondis-je en m’éloignant. En attendant, nous allons tout mettre en œuvre pour que la prophétie se réalise.
    — Non ! cria mon fils Capys.
    — Oui ! hurlèrent tous les autres en poussant des hourras.
     
    Il nous fallut la plus grande partie de la journée pour accomplir cela. Nous attachâmes des cordes renforcées de chaînes à l’avant et sur les côtés de la plate-forme géante, puis nous y attelâmes des mules, des bœufs et des esclaves. Avec une lenteur infinie, le cheval de bois traversa la plaine. Ce fut une tâche pénible, déprimante, exaspérante même. À chaque tournant, il fallait effectuer plus d’une douzaine de va-et-vient pour maintenir l’animal sur les pavés, car les roues étaient simplement fixées à la plate-forme par des boulons. Nul essieu n’aurait pu supporter un tel poids.
    À midi, nous avions traîné le cheval jusqu’à la porte Scée où, bien sûr, nous pûmes constater par nous-mêmes que la tête dépassait d’au moins trois coudées la voûte du chemin de ronde, au-dessus de la grande porte de bois.
    — Thymoetès, dis-je à mon fils le plus enthousiaste, demande aux hommes d’apporter des pioches et des marteaux. Qu’on brise cette voûte !
    Cela nous prit beaucoup de temps. Les pierres posées par Poséidon Bâtisseur de Murailles ne cédèrent pas facilement sous les coups de simples mortels. Elles s’effritèrent pourtant, fragment après fragment, jusqu’à ce qu’il y eût une large brèche au-dessus de la porte Scée. Ceux qui étaient attelés à l’animal tirèrent sur les chaînes ; la tête puissante recommença d’avancer. Comme les mâchoires s’approchaient, je retins mon souffle, puis poussai un cri d’avertissement : trop tard. La tête se coinça dans le rempart. Nous la dégageâmes, détruisîmes un peu plus la voûte, essayâmes à nouveau. Mais elle ne voulait pas passer. Quatre fois la noble tête s’y trouva prise. Enfin, l’espace fut assez grand. Alors l’animal gigantesque roula lourdement, en grinçant jusqu’au milieu de la place Scée. Ah, Ulysse ! Nous avions réussi à déjouer tes tours !
    Bien sûr, je décidai que le cheval serait halé jusqu’au faîte de la colline escarpée et conduit au cœur même de Troie la citadelle. Ce qui nécessita deux fois plus d’animaux de trait et me parut prendre des siècles, même si les habitants de la cité eux aussi s’attelèrent à la tâche. La porte de la citadelle n’étant pas surmontée d’une voûte ; le cheval y entra avec facilité.
    Nous l’immobilisâmes dans la cour verdoyante consacrée à Zeus. Les dalles se fendirent et cassèrent sous le poids et les roues s’enfoncèrent dans le sol parmi les fragments de pierre, mais le cheval resta bien droit. À présent aucune force sur terre ne pourrait plus l’en déplacer. Nous avions prouvé à Pallas Athéna que nous étions dignes de son amour et de son respect. Je prêtai publiquement serment : le cheval serait maintenu en parfait état et un autel serait érigé en son honneur. Troie était à présent hors de danger. Le roi Agamemnon ne pourrait revenir au printemps avec une nouvelle armée. Et nous, après avoir repris nos forces, rassemblerions toutes les armées de la terre pour conquérir la Grèce.
    Cassandre se mit alors à rire comme une folle ; elle était arrivée en courant, les cheveux défaits, les bras écartés. Hurlant, gémissant, glapissant, elle tomba à mes pieds et m’étreignit les genoux.
    — Père, éloigne-le ! Éloigne-le de la cité ! Ramène-le où il était ! Ce cheval porte en lui la mort !
    Laocoon acquiesçait, l’air sinistre.
    — Seigneur, les présages ne sont pas bons. J’ai offert à Apollon une biche et trois tourterelles. Il les a toutes refusées. Cette créature est annonciatrice de la chute de notre cité.
    — J’étais là, j’ai tout vu. Mon père dit la vérité, intervint l’aîné de ses fils, blême et tremblant.
    Thymoetès se précipita pour me défendre ; je frémissais de colère tandis que d’autres donnaient libre cours à la peur.
    — Viens avec moi, seigneur, insistait Laocoon. Viens voir toi-même au grand autel ! Ce cheval est maudit !

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