Le clan de l'ours des cavernes
de reflets d'ivoire. Brun s'avança pour voir de plus près et, les yeux écarquillés, fit un signe à Grod. Les deux rebroussèrent chemin.
Appuyé sur son b‚ton, Mog-ur attendait, inquiet. Lorsque Brun et Grod débouchèrent du passage, il remarqua avec surprise l'agitation inaccoutumée du chef. Sur un geste de lui, Creb suivit les deux hommes à l'intérieur de la faille. En arrivant dans la grotte secondaire, Grod leva sa torche, et le sorcier étrécit les yeux en découvrant la pile d'ossements. Il s'en approcha avec impatience et, se laissant choir à
genoux, il se mit à fouiller. Il aperçut dans le tas un grand objet oblong.
Il le tira. C'était un cr‚ne.
Il n'y avait aucun doute possible. Le cr‚ne au front fortement arqué était absolument identique à celui que Mog-ur transportait dans ses affaires. Le sorcier s'assit par terre et, soulevant le lourd cr‚ne à hauteur de ses yeux, plongea son regard dans les deux orbites noires avec un mélange d'incrédulité et de respect. Ursus lui-même avait séjourné dans cette caverne. A en juger par la quantité d'ossements, les ours des cavernes avaient passé plusieurs hivers en ces lieux. Mog-ur comprenait enfin l'excitation de Brun. que le Grand Ours des Cavernes e˚t hiberné dans cette grotte, il ne pouvait y avoir de meilleur présage. L'essence de la puissante créature que le Peuple du Clan vénérait entre toutes imprégnait la roche même. Chance et protection étaient assurées au clan qui y résiderait. A en juger par l'‚ge des ossements, la grotte était manifestement inhabitée depuis des années, attendant seulement qu'ils la découvrent.
C'était une caverne parfaite, bien située, spacieuse, pourvue d'un réduit idéal pour y célébrer les rites secrets du Clan. Mog-ur imaginait déjà les cérémonies. La petite grotte serait son domaine réservé. Leur quête était enfin terminée, leur clan avait trouvé une demeure, à condition que la première chasse soit fructueuse.
Lorsque les trois hommes quittèrent la caverne, le soleil brillait dans le ciel tandis que le vent chassait rapidement les derniers nuages. Brun y vit un heureux présage ; mais il aurait également trouvé de bon augure le plus formidable déluge, tant sa satisfaction était grande. De la terrasse à
l'entrée de la caverne, il regarda le panorama qui s'étendait à ses pieds.
Devant lui, dans l'échancrure de deux collines brillait une vaste étendue d'eau, et il comprit alors la raison de la douceur du climat et du changement de la végétation.
La caverne se trouvait au pied d'une chaîne de montagnes située à
l'extrémité sud d'une péninsule qui avançait dans une mer intérieure. La péninsule était reliée en deux points au continent, au nord par une large bande de terre, et à l'est par une langue étroite de marais salants faisant la jonction avec la région des hautes montagnes. Les marais les séparaient également d'une autre mer intérieure, plus petite, située au nord-est.
Les montagnes dans leur dos protégeaient la bande côtière des grands vents froids venus du glacier continental au nord. Les vents maritimes apportaient assez d'humidité et de chaleur pour que se développent les essences forestières à feuilles caduques communes aux climats tempérés.
Le site de la caverne était vraiment idéal. Non seulement la température y était plus élevée que n'importe o˘ alentour, mais on y trouvait du bois en abondance pour affronter sans crainte les rigueurs de l'hiver.
La grande mer proche pourvoirait poissons et crustacés et les falaises le long du rivage abritaient des colonies d'oiseaux marins et leurs ceufs. La forêt tempérée était un paradis pour qui savait y cueillir les fruits, les noix, les baies, les graines et les gousses des légumineuses. Les sources et ruisseaux constituaient une réserve d'eau fraîche inépuisable. Mais le principal avantage résidait dans la proximité des steppes dont les verts p
‚turages engraissaient d'importants troupeaux de ruminants qui fourniraient non seulement de la viande mais aussi des peaux pour les vêtements et des os pour l'outillage. Le petit clan qui vivait de la chasse et de la cueillette dépendait de la terre, et cette terre à leurs pieds déployait toute son abondance.
Comme il s'en retournait vers le clan qui attendait impatiemment, Brun regardait à peine o˘ il posait les pieds. Il n'aurait su imaginer caverne plus parfaite. Les esprits protecteurs étaient
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