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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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n’aimons pas les Templiers, monseigneur, dit
simplement Guillaume. Et nous soutenons qui nous voulons.
    — Sire, pardonnez ma curiosité, s’excusa Josias.
    Après un court instant de silence, le roi se tourna vers
Chefalitione :
    — Capitaine, lui dit-il, deux de nos navires vont vous
escorter. Ensuite, nos hommes resteront avec Son Excellence l’archevêque et
l’accompagneront au château de Ferrare, où se trouve actuellement le pape, si
nos informations sont exactes.
    — Sire, répondit Josias, c’est trop de bonté. Mais je
ne fais que me rendre auprès de Sa Sainteté, et repars ensuite pour Tyr, où mes
fidèles m’attendent.
    — Nous pensons qu’il en sera autrement, objecta le roi
de Sicile. Vous êtes l’héritier de Guillaume de Tyr, que nous avons bien connu,
et, si vous en êtes digne, vous ferez comme lui : vous irez visiter les
rois de France et d’Angleterre, ainsi que l’empereur Frédéric II, et vous
les convaincrez de prendre la croix.
    — Guillaume lui-même a échoué, rappela Josias.
    — Mais vous réussirez, affirma le roi sur un ton
sans réplique.
    — Sire, s’enquit Chefalitione à son tour, que diront
les Vénitiens s’ils s’aperçoivent que mes navires ont pour escorte des bateaux
de Sa Majesté ?
    — Ils diront : « En voilà un qui a bien
réussi », et ils auront raison. Partez dès que possible.
    Chefalitione, Josias et sa mère s’en retournèrent au port,
non sans avoir reçu de la part de Guillaume de nombreux présents. C’était un
roi si particulier que sa générosité avait la saveur de l’outrage. Il était
aimable comme d’autres sont odieux : avec violence. Sa force, c’était sa
bonté. Et il l’exerçait sur tous ceux qui croisaient sa route. Sa rage était de
même veine.
    Chefalitione en fut tellement ému qu’il dit à Fenicia :
    — Je crois que je ne vais pas prendre les terres et les
châteaux que Balian m’a donnés.
    — Pourquoi ? demanda Fenicia.
    — Parce que ce voyage m’a comblé. Je n’avais pas de
femme, je vous ai rencontrée, je n’avais pas de fils, j’ai Josias, je n’avais
pas la foi, Dieu m’est apparu. C’est plus qu’il n’en faut pour mon bonheur.
    — Et qu’allez-vous en faire ? demanda-t-elle
encore.
    — Je vais vous les offrir.
    — Alors je les rends à Balian, car je n’ai besoin de
rien d’autre que vous et mon fils, dit Fenicia.
    Ils s’embrassèrent et, peu après, Chefalitione fit peindre à
la suite du nom de son navire deux petits mots.
    La Stella s’appelait désormais : La Stella di
Dio.

 
9.
    Crux sancta a paganis capta.
    (« Les païens s’étaient
emparés de la Sainte Croix. »)
    (Annales de l’abbaye
Saint-Pierre de Jumièges.)
     
    En ce temps-là, Rome réapprenait à vivre. Malmenée jusqu’au début
du siècle par la querelle des Investitures, elle s’était ensuite violemment
opposée au Saint Empire romain germanique, au point que l’empereur –
pressé d’être sacré – avait nommé en 1160 un certain Ottaviano de
Monticello antipape sous le nom de Victor IV. Barberousse démontrait ainsi
qu’il ne connaissait pas l’Histoire, puisqu’un autre antipape – le
précédent en fait – portait déjà le même nom suivi du même chiffre. Ce
dernier avait d’ailleurs été élu sur les pressantes recommandations de
Roger II de Sicile, grand-père de Guillaume II le Bon. Enfin, alors
qu’elle se remettait de plusieurs épidémies de peste, dont l’une avait
contribué au départ des troupes d’occupation impériales en 1167, Rome essayait
de guider une chrétienté désunie. On aurait dit un navire attaqué de toutes
parts par des pirates et commandé par plusieurs capitaines hurlant en même
temps des ordres contradictoires, que personne n’entendait, tant la tempête
faisait rage, tant l’équipage était sourd.
    En outre, les papes avaient quitté le Vatican pour s’établir
à Vérone ou à Ferrare.
    Alexandre III avait pourtant été un excellent pape. Son
pontificat avait duré plus de vingt ans (de 1159 à 1181), durant lesquels il
avait canonisé Bernard de Clairvaux (à l’origine de la règle de l’ordre des
Templiers), et avait fait la paix avec Barberousse, à Venise en 1177.
Lucius III, qui lui avait succédé, ne marqua pas son sacerdoce de la même
façon, faute de temps probablement, car on l’avait vu parfois très inspiré. On
lui savait surtout gré, outre la paix de Constance, d’avoir fondé au

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