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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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de mourir et
préféré te convertir ? Tu parles de sacrifice, j’y vois plutôt orgueil et
peur, dit l’un des frères chevaliers.
    — J’ai peut-être eu tort, c’est vrai, mais j’ai pensé à
la Sainte Croix. Je ne me sentais pas digne de mourir au nom du Christ tant
qu’elle était entre les mains des Sarrasins. Ma conversion m’a paru peu de
chose à côté de cette tragédie, pourvu que la Vraie Croix fût retrouvée.
    Ce dernier point intéressa vivement le frère commandeur, qui
demanda tout de suite à Morgennes :
    — Ta conversion n’était donc pas sincère ?
    — Sincère ou non, cela ne fait aucune différence.
    — C’est pourtant là toute la différence !
s’énerva le frère infirmier.
    — Alors soit, admettons qu’elle ait été sincère,
puisque j’ai renié Dieu et craché sur la croix.
    — Tu as craché sur la croix ! s’étrangla le frère
chapelain. C’est un péché inexpiable ! Je demande qu’on exclue cet homme
de l’ordre, et qu’on l’enferme chez les Bénédictins ou les Augustiniens, peu
m’importe, pourvu qu’on le renvoie tout de suite ! Non content d’être
laps, cet homme est un démon !
    — Du calme, dit le frère commandeur. Je vous rappelle,
beau doux frère chapelain, qu’on ne doit pas élever la voix ici. D’ailleurs,
nous avons tous compris ce que le frère Morgennes a fait : tu as craché
sur la croix pour qu’on te donne à boire, n’est-ce pas ? demanda-t-il à
Morgennes.
    — Non, pas du tout, répondit celui-ci. Je suis vraiment
désolé, beau doux sire commandeur, mais si j’ai demandé à boire c’était pour
pouvoir cracher, et non parce que j’avais soif. Ma décision était déjà prise.
Telle est la vérité.
    Morgennes regardait ses juges, qui le dévisageaient dans un
silence pesant.
    Même Raymond de Tripoli n’osait plus le regarder ni lui
envoyer de petits signes d’encouragement.
    Dans l’âtre, les bûches s’étaient entièrement consumées. Par
les ouvertures, au sommet de la salle, les premiers rayons du jour avaient fait
leur apparition, et l’heure de tierce avait été sonnée.
    Cela faisait plus de trois heures qu’ils entendaient
Morgennes.
    Plus de trois heures que ses défenseurs faisaient tout pour
le sauver, plus de trois heures que ses détracteurs, de plus en plus nombreux,
se demandaient justement pourquoi cela durait depuis si longtemps…
    Morgennes ne comptait plus parmi le tribunal de pénitence
que trois alliés : le frère commandeur, le frère maréchal et Raymond de
Tripoli – qui ne voterait pas, n’étant pas de l’Hôpital.
    — L’affaire est claire, dit le frère infirmier. Cet
homme n’a plus toute sa raison, il faut l’enfermer.
    — Renvoyons-le en Occident, risqua un autre frère, qui
n’avait jusqu’à présent pas beaucoup parlé.
    — Silence, mes doux sires, dit Beaujeu. Je vais vous
demander de voter, que Dieu nous aide à faire notre devoir.
    On fit sortir Morgennes, afin que le vote de chacun des
membres du tribunal restât secret, ensuite chacun des frères s’exprima :
    — Deux jours de jeûne, une peine de discipline le
dimanche pendant six mois s’il se repent, sinon la perte de l’habit,
définitive, dit le premier des frères chevaliers.
    — La perte de l’habit pendant un an s’il se repent, dit
le frère sous-maréchal, sinon la perte de la maison, définitive.
    — La perte de la maison, définitive, dit le frère
chapelain.
    — La perte de la maison, définitive, dit un deuxième
frère chevalier.
    — La perte de l’habit pendant un an s’il se repent,
sinon la perte de la maison, définitive, dit le frère drapier.
    — Deux jours de jeûne plus une peine de discipline
chaque semaine jusqu’à ce qu’il accepte de se laisser délier, dit un troisième
frère.
    — La perte de la maison, définitive, dit le frère
infirmier.
    — La perte de l’habit, jusqu’à ce qu’on le délie de son
serment, ensuite deux jours de jeûne plus une peine de discipline le dimanche
pendant trois mois, dit le frère maréchal.
    — La perte de l’habit s’il se laisse délier de son
serment, sinon la perte de la maison, définitive, dit le frère turcopolier.
    — La perte de la maison, définitive, dirent les
dixième, onzième, douzième et treizième frères.
    La cause paraissait entendue, et, à vrai dire, elle l’était.
    Le frère commandeur ne pouvait s’opposer au châtiment qui
conduirait inéluctablement Morgennes à

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