Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
Vom Netzwerk:
Massada.
C’est parfait, tout à fait suffisant. Peut-être même un peu trop.
    — Alors disons quatre-vingts besants d’or…
    — Quatre-vingts besants d’or, très bien, dit Massada
tout à la fois mécontent, gêné et honteux.
    — Les Juifs, commenta le frère chapelain, ça ne peut
pas s’empêcher de marchander…
    Massada et Beaujeu firent comme s’ils n’avaient pas entendu.
    L’affaire semblait réglée, quand le frère infirmier s’en
vint trouver le sire de Beaujeu.
    — Beau doux frère commandeur, Raymond de Tripoli s’est
réveillé, annonça-t-il.
    — Tant mieux, dit Beaujeu.
    — Mais il est au plus mal. Il respire à grand-peine, et
son corps est si baigné de sueur qu’il a fallu changer les draps. J’ai bien
cherché à le soulager en le scarifiant jusqu’à le rendre blanc, mais il ne s’en
est pas porté mieux. J’ai fait mettre de l’encens à brûler dans sa chambre pour
purifier l’air et donné l’ordre à six de nos frères de se relayer sans cesse à
la chapelle afin de prier pour lui. Le pire est à craindre. Ah, et il vous a
réclamé.
    — Il veut me voir ?
    — C’est-à-dire qu’il a réclamé Morgennes. Je lui ai dit
que vous seul pouviez lui permettre de le voir. Alors il vous a demandé.
    — Allez chercher Morgennes, je vais chez Tripoli.
    Beaujeu partit donc en direction de la petite chambre que le
seigneur de Tripoli occupait avec sa femme et les quatre filles qu’elle avait
eues d’un premier mariage.
    Tripoli était allongé dans son lit, sa femme – la
comtesse Échive – debout à ses côtés, les mains croisées sur sa robe à
franges brodées d’or. Ils étaient venus de Tyr plusieurs semaines auparavant,
avec nombre de leurs gens, qui se préparaient à la guerre. Car le combat
n’était pas fini : sous le commandement de Conrad de Montferrat, le fils
du vieux marquis Guillaume de Montferrat, Tyr redressait la tête et défiait
Saladin.
    — Comtesse, salua Beaujeu en entrant dans la pièce,
l’une des mieux décorées du château.
    Sans être confortable, on avait essayé d’y mettre de quoi la
rendre agréable à un couple habitué au confort et aux richesses. Du reste,
Échive et Raymond de Tripoli, contrairement à tant d’autres barons et comtes de
Terre sainte, se souciaient assez peu du luxe. Le sol était couvert d’un tapis
de jonc et de lourdes tapisseries pendaient au mur. Dans un coin, un chien
dormait sur une paillasse. Parfois, dans son sommeil, il gémissait et se
grattait avec vigueur.
    Raymond de Tripoli était si pâle que ses cheveux blancs
semblaient gris. Son regard était celui d’un homme épuisé et brillait d’une
lumière humide, reflet de son état fébrile.
    — Frère commandeur…, commença-t-il d’une voix éteinte.
    Mais Beaujeu lui fit signe qu’il n’était pas utile de
parler, il savait :
    — Économisez vos forces, seigneur comte. Je sais que
vous voulez voir le frère chevalier Morgennes, et je l’ai fait quérir pour
vous.
    Effectivement, peu de temps après, deux gardes amenèrent
Morgennes, puis se retirèrent sans un mot. Morgennes salua la comtesse Échive,
s’approcha de Raymond et lui prit la main.
    — Seigneur, lui dit-il, beau seigneur, dans quel état
vous trouvez-vous…
    — La mort n’est pas loin, dit Raymond de Tripoli. Toute
vigueur m’abandonne, et ma seule joie est d’avoir Échive et mes filles auprès
de moi.
    Il ferma les yeux.
    La comtesse vint s’asseoir de l’autre côté du lit, et prit
la main de son mari.
    — Morgennes, demanda Raymond, qu’avez-vous fait de
Crucifère ?
    — Un neveu de Saladin me l’a prise, répondit Morgennes.
    — Il faut la retrouver. Sans elle…
    — Je sais, dit Morgennes. Sans elle, je suis perdu,
mais ne le suis-je pas déjà ?
    — Cette épée est notre meilleur guide. Rappelez-vous,
au Caire, comme elle a bien servi. Vous étiez jeune alors, le bon roi Amaury
était encore en vie, et s’épuisait à vouloir conquérir l’Égypte… Mais vous
étiez là, fidèle déjà, et aviez accepté de partir en quête de cette épée que
Guillaume de Tyr avait localisée…
    À l’évocation de ces souvenirs, Morgennes revit des images
de bâtiments en flammes et sentit même le souffle d’un puissant incendie passer
sur son visage, à l’endroit d’anciennes blessures.
    — Beaujeu, continua Tripoli, c’en est fini de tous nos
rêves. Nos territoires en Terre sainte reculent comme le jour face à la

Weitere Kostenlose Bücher