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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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papauté flottait fièrement à côté de celle des Hospitaliers, de
sable à grande croix d’argent. Emmanuel ne pouvait s’empêcher de penser :
« Voilà pour les couleurs, et pour la discrétion. » En effet, ces
fanions proclamaient, aussi clairement que si l’on avait joué du tambour et
soufflé dans des buccins : « L’Hôpital est en mission pour le
pape ! »
    « Enfin, se disait-il, ils nous porteront protection. »
    Et puis : « Dieu a déjà fait son choix. »
    Si cela n’avait tenu qu’à lui, il aurait ordonné le
repli : ils avaient assez attendu. Mais les ordres étaient clairs :
« Allez au-devant de la caravane, trouvez-la, puis conduisez-la jusqu’à
nous. » Seulement voilà, cela faisait des heures qu’ils patrouillaient
entre le krak et Le Kamel, n’osant pousser plus à l’ouest vers la côte, et
nulle part ils ne voyaient de caravane.
    Le Kamel avait fermé ses portes, la ville se repliant sur
elle-même afin de se garder des bandes de rôdeurs et des Sarrasins. Là-bas non
plus ils n’avaient pas vu de caravane, hormis celles des tribus de bédouins
venues s’approvisionner en vivres et en eau. Mais de caravane de chameaux,
menée par des Hospitaliers, point.
    Emmanuel ôta son bassinet, et de sa main gantée de cuir
essuya son front trempé de sueur.
    Il cuisait dans sa cotte de mailles et sentait les jointures
de son gambeson lui coller à la peau, humides de transpiration.
    Ils patrouillaient depuis trop longtemps.
    Comme lui, ses auxiliaires avaient retiré leur casque, qui
pendait par une lanière à leur hanche. Il faisait si chaud que des vapeurs
s’exhalaient de leurs broignes et faisaient trembler l’air au-dessus d’eux.
    Emmanuel devait décider de la route à prendre, et le décider
maintenant. En fait, le choix était relativement simple : soit ils
suivaient la route vers la mer, et donc passaient non loin des forteresses
templières ; soit ils remontaient vers le nord, et longeaient les
contreforts du djebel Ansariya.
    Il lui fallait deviner la voie qu’avait suivie la caravane
avant eux. Or, à moins d’avoir fait halte chez les Templiers, elle aurait déjà
dû être là. Il soupira, espérant que leur survie à tous entrait dans les
desseins de Dieu, et donna l’ordre à la colonne de remonter vers le nord.
    « Quand on n’a pas le choix de sa vie, autant choisir
sa mort », pensa-t-il, amer. « Mieux vaut les Assassins que les
Templiers, et quitte à mourir, plutôt mourir en combattant ses ennemis que ses
prétendus alliés. »
    Sur ces sombres pensées, ils quittèrent la route et prirent
à travers champs. Aussi loin que portait leur regard, la nature était vide.
C’était pourtant la saison des labours – mais seuls des corbeaux donnaient
à ce paysage un semblant de vie. Au loin se dressaient les premiers contreforts
du djebel Ansariya, dont la base disparaissait dans la brume et les sommets
dans les nuages. Le soir venant, ils crurent voir l’horizon se rapprocher. Des
bancs de brume compacts descendaient de la montagne et s’avançaient dans la plaine.
Quelques chevaux frémirent, les cavaliers réprimèrent un frisson. Puis ils
franchirent un mince ruisseau, et entrèrent dans le brouillard.
    Nerveux, les soldats baissèrent leur lance sur leur cuisse,
et tinrent d’une main plus ferme la bride de leur monture. Ils se préparaient
au pire.
     
    *
     
    Tôt dans la matinée, à l’heure où la patrouille envoyée par
le krak partait les retrouver, le chef de la caravane avait déclaré :
    — Nous n’irons pas par le sud, mais longerons le djebel
Ansariya. Ainsi nous nous tiendrons à l’écart des Templiers, qui aiment trop
l’or à mon goût. En ne les tentant pas, nous éviterons les ennuis.
    Le raisonnement était bon, car si le risque de tomber sur
des Assassins était réel, il était moindre que celui de rencontrer des
Templiers, dont la nervosité était grande depuis que leur chef avait été pris à
Hattin et que leur ordre avait été mis en concurrence avec celui des
Hospitaliers. En élisant Gérard de Ridefort à la tête de sa maison, le Temple
avait changé de nature. Ou plutôt, d’attitude.
    Le précédent maître, Arnaud de Torroges, était mesuré et
prudent ; son successeur, Gérard de Ridefort, était tout l’inverse.
    Quand Torroges renonçait à un combat parce qu’il pensait que
les Sarrasins avaient toutes les chances de l’emporter, Ridefort, au contraire,
donnait l’ordre de s’y

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