le collier sacré de Montézuma
été vaincu ! Il faut admettre qu’elle est sublime ! Trop peut-être ! C’est une œuvre d’art et, si tu veux mon sentiment, je me demande si Vauxbrun, saisi par une terreur sacrée, n’a pas préféré prendre la fuite au dernier moment ?
— Tu dérailles ou quoi ?
— Absolument pas ! Tu connais l’histoire de notre roi Philippe Auguste et de sa seconde épouse Ingeborg de Danemark ? Elle était si belle qu’il n’a même pas osé la toucher pendant la nuit de noces et le lendemain, l’ayant prise en horreur et les Danois ayant refusé de la reprendre, il l’a envoyée dans un donjon en l’accusant de lui avoir jeté un sort et noué l’aiguillette !
— Je sais, mais c’était au Moyen Âge et Vauxbrun a derrière lui un assez beau palmarès en matière de femmes !
— Philippe Auguste aussi, n’empêche qu’il s’est retrouvé tout bête et d’autant plus furieux ! Prenons un autre exemple : ça ne devait pas être facile de coucher avec la Joconde.
— Idiot ! Le portrait est… quasi divin mais le modèle ne m’aurait jamais tenté ! Et quant à l’épouser…
— Et… la jeune Isabel ? En admettant qu’elle ne soit pas liée à un vieux copain, tu pourrais en avoir envie ?
— Non, reconnut Aldo, catégorique. Non, tu as raison ! L’émotion qu’elle pourrait éveiller en moi est purement esthétique… Quand on se souvient des derniers coups de cœur de Vauxbrun, c’est franchement incroyable qu’il ait voulu l’épouser, si tu ajoutes la différence d’âge. D’ailleurs, depuis mon arrivée, j’ai l’impression qu’il a beaucoup changé. Il a maigri ; il est… fébrile. Il est venu me chercher à la gare mais, dès qu’il m’a récupéré, il s’est comporté comme s’il avait hâte de se débarrasser de moi. Il n’a pas demandé des nouvelles de Lisa ni des jumeaux qui devaient constituer à eux deux le service d’honneur de la mariée. Si tu ajoutes que ce bon vivant n’a pas pensé à enterrer dignement sa vie de garçon et si tu additionnes, tu as un joli paquet de bizarreries… et tu n’imagines pas comme je suis content que Lisa ait attrapé une bronchite !
Vidal-Pellicorne démarra mais dut s’arrêter quelques mètres plus loin : la sortie était bouchée par une autre voiture devant laquelle patientaient Jacques Mathieu et sa jeune collègue. Immédiatement Adalbert prit feu :
— Auriez-vous l’obligeance de nous laisser passer ? On a déjà suffisamment d’ennuis sans que la presse s’en mêle ! Allez, ouste !
— Ne vous fâchez pas, Monsieur Vidal-Pellicorne ! Nous ne sommes que deux !
— Mais vous êtes aussi encombrants que si vous étiez cinquante…
— Au fait, dit Morosini, qu’avez-vous fait de vos collègues ? Vous étiez plus nombreux devant l’église ?
— On nous a proprement renvoyés dans nos foyers et nous avons obtempéré… mais ayant déjà eu l’honneur de vous fréquenter l’an passé, je vous ai suivi d’autant plus facilement que je connaissais l’adresse privée de M. Vauxbrun ! À propos, je vous présente Stéphanie Audoin, ma stagiaire.
Morosini ne put s’empêcher de sourire à ce frais visage qui, avec ses cheveux blonds ébouriffés sous un béret bleu, lui rappelait Nelly Parker, la petite journaliste du New Yorker qui lui collait aux basques mais qui, cependant, lui avait sauvé la vie :
— Content de vous connaître, Mademoiselle, et je vous souhaite une belle carrière… mais, dans l’état actuel des choses, je ne vois pas ce que nous pourrions vous apprendre.
— Toujours pas de nouvelles de M. Vauxbrun ? demanda Mathieu.
— Aucune. C’est incompréhensible !
— Il doit tout de même bien y avoir une explication, logique ou pas ?… Et, est-ce vrai que les Mexicains ont emménagé ici ?
— Eh oui, étant légalement mariée, M me Vauxbrun en a entièrement le droit et il est naturel que ses parents souhaitent l’entourer.
— Hum !… C’est pas un peu rapide, cette histoire ? Ils auraient pu attendre avant de faire de l’occupation. On n’est pas si mal au Ritz ! Et que devient la jeune mariée en ce moment ?
— Elle mange ! lança Adalbert. Et si vous consentiez à nous laisser partir on serait contents d’en faire autant.
— Elle mange ? reprit Stéphanie. Et ça vous paraît normal ?
— Rien n’est normal dans cette histoire, Mademoiselle, et si vous voulez le fond de ma pensée, je trouve
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