Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
Vom Netzwerk:
nous annonça que
le supérieur serait là sous peu. Mais il y avait un visiteur pour messire
Demontaigu. Ce dernier voulait-il le voir ? Bertrand me jeta un regard
perplexe et accepta. Le frère lai disparut et revint, escortant un vieillard un
peu voûté, la peau si hâlée par le soleil qu'elle paraissait noire, le crâne
presque chauve mis à part quelques touffes de cheveux au-dessus des oreilles et
dans la nuque. Il s'appuyait sur une canne qu'il faisait résonner sur les
dalles en avançant à petits pas pressés vers Demontaigu. Il s'arrêta et leva
les yeux.
    — Messire
Bertrand Demontaigu, me reconnaissez-vous ?
    Bertrand recula
et le dévisagea, incrédule.
    — Joachim
Hermeri ! murmura-t-il. Par tous les saints, Joachim Hermeri !
    Il s'approcha du
vieil homme, l'étreignit et l'amena vers le tabouret proche du mien afin qu'il
puisse jouir de la chaleur du brasero. Joachim me jeta un regard perspicace de
ses yeux larmoyants. Il attendit que Bertrand se fût assis puis laissa échapper
un petit rire qui lui secoua les épaules.
    — J'ai
entendu le frère lai : il est venu au réfectoire. Il a annoncé qu'il y
avait une visiteuse de la Cour, une jeune dame accompagnée d'un clerc soldat
nommé Demontaigu.
    Il frotta le genou
de Bertrand de ses doigts osseux.
    — Oh, j'ai
bien ouï dire que c'en est fini de notre ordre, mais je me souviens de vous,
Demontaigu.
    — Et je me
croyais en sécurité, remarqua ce dernier en souriant.
    — Je suis
au courant de toutes les nouvelles, chuchota Joachim, et je connais tous les
noms. Je ne risque pourtant rien céans. Qui penserait à venir à l'hôpital de
Bethléem, un asile pour les fols et les écervelés ? Qui accorderait foi à
mes rodomontades, à mes divagations ? Vous comprenez, madame, jadis j'étais
templier, n'est-ce pas, Demontaigu ?
    Sans attendre la
réponse, il s'empressa d'enchaîner :
    — J'étais
présent à la chute de Saint-Jean-d'Acre. J'étais sergent, porte-bannière. Quand
Acre est tombé, nous avons été plusieurs à fuir dans le désert. Je vais vous
dire quelque chose, madame : j'ai vu des scènes horribles qui m'ont amené
ici. Les moines de Charterhouse qui, au début, se sont occupés de moi ont pensé
que c'était mieux. Ils ne m'ont pas cru. Je leur ai parlé du jeune Fulk :
il venait du Poitou et était aussi porte-bannière. Il a été mordu par un
basilic. La morsure n'avait pas été douloureuse et de l'extérieur il avait
l'air normal, mais le venin s'est infiltré dans son sang ! Un feu rampant
lui a envahi la moelle et a enflammé l'intérieur de son corps. Le poison a sucé
l'humidité près de ses organes vitaux et a asséché la salive de sa bouche. Il
n'avait plus de sueur pour apaiser sa chair. Il ne pouvait même pas pleurer. Il
n'était plus qu'un brasier et cherchait en vain de l'eau.
    Hermeri s'appuya
sur sa canne. J'adressai un coup d'œil à Bertrand qui se contenta de hocher la
tête.
    — Puis il y
a eu Beltran, mordu par un basilic à la jambe. Le basilic y a laissé un
crochet. Beltran a voulu le retirer ; la chair près de la morsure s'est
alors déchirée et flétrie au point de laisser tout l'os à découvert. L'entaille
n'a cessé de s'élargir et bientôt les mollets du malheureux ont fondu, ses
genoux ont perdu leur peau. De son cou, ses cuisses, son aine ruisselait une
matière corrosive qui coulait en une mare de pus. C'est tout ce dont je me
souviens.
    Il leva les yeux
vers le plafond, la lèvre inférieure agitée d'un tremblement convulsif.
    — Ces
basilics règnent dans le désert et leurs ailes les emportent haut. Aucune
créature n'est à l'abri d'une attaque, madame, pas même les éléphants. J'ai cru
comprendre que le roi en possédait un à la Tour. Eh bien, voilà ce que j'avais
à dire.
    Et sans rien
ajouter, il se leva, nous salua et sortit en traînant les pieds.
    Demontaigu se
leva aussi et le suivit. Il ouvrit l'huis, jeta un bref regard au-dehors, puis
referma la porte.
    — Est-ce
vrai ?
    — Il était
assez lucide pour se souvenir que j'étais templier, commenta Bertrand en
s'asseyant. Je me souviens de Hermeri, ses yeux, ses lèvres, ses gestes. Quand
Acre s'est rendu, moult templiers ont péri. D'autres ont été capturés par les
infidèles ; peu nombreux sont ceux qui se sont échappés dans le désert.
Joachim dit peut-être la vérité. Il a dû voir des choses, éprouver des peurs
dont nous ne savons rien, mais qui le croit ? J'ai rencontré des

Weitere Kostenlose Bücher