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Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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et déversaient un torrent d'injures sur leurs
bourreaux ; les dizainiers de l'échevinage souriaient de toutes leurs
dents en refermant les ceps autour des cous, des jambes, des poignets et des
chevilles. Non loin, le gibet à six branches avait dû servir la veille comme en
témoignaient les corps bouffis qui y pendaient. Les tombereaux malodorants des
éboueurs se rassemblaient près du fossé de la ville pour y décharger leur
mélange nauséabond de détritus, de déchets d'abattage et d'excréments humains,
le tout enduit d'un puant dépôt visqueux, ainsi que les carcasses gonflées
d'animaux morts : chiens, chats et volailles. Un cortège funèbre,
fantomatique dans ses moindres détails, cierges à calotte brillant et
clochettes tintinnabulant, sortit de l'ombre ; le prêtre chantait le Dirige d'une voix sépulcrale et les membres du convoi, emmitouflés et encapuchonnés,
ressemblaient à des âmes en peine errant dans le morne domaine de l'Enfer.
    Je crus que ces
différentes scènes accaparaient l'attention de Bertrand et expliquaient son
silence, mais il finit par s'emparer des rênes de ma monture et me conduisit
dans la cour de l'une de ces tavernes qui desservent les routes menant à Londres.
Nous laissâmes nos chevaux à l'écurie. Dans la vaste salle, Demontaigu prit une
table proche du feu ronflant et commanda des écuelles de fromentée bouillante
agrémentée de lait et de miel. Ce sont de tels instants que je garde en mémoire :
le feu, la chaleur, la nourriture chaude, la savoureuse bière servie dans des
chopes de cuir. Demontaigu reposa sa cuillère, souffla sur la fromentée et
m'adressa un petit sourire.
    — J'ai
réfléchi à ce que vous avez dit sur Ap Ythel. Quand je servais outre-mer, l'un des
grands dangers était le Vieux de la Montagne. Vous en avez sans nul doute
entendu parler. Il demeurait avec ses fidèles dans un château isolé au fond
d'une vallée du désert. Il choisissait ses victimes, puis les avertissait en
leur envoyant un gâteau de sésame, laissé, en général, dans leur chambre pour
leur prouver qu'elles ne seraient nulle part en sécurité. Parfois, cet assassin
s'intéressait à nous, les Templiers, surtout avant la chute de
Saint-Jean-d'Acre.
    Mon compagnon
reprit sa cuillère de corne.
    — Nous
avions appris une chose : ne jamais fuir, attendre. Les tueurs du Vieux de
la Montagne ne manqueraient pas de venir à la dérobée. Notre tâche consistait à
les piéger. Peut-être doit-on agir encore de même à Westminster.
    Il soupira.
    — Si mal
dissimuler les arbalètes était fort maladroit ! Je ne manquerai pas d'en
parler avec Ap Ythel. Mais... Il se pencha par-dessus la table et me prit les
mains.
    — ... mille
mercis pour la grâce. Vous avez raison, Mathilde, tôt ou tard, il me faudra
avouer ma véritable identité. Les pardons et des lettres de protection nous
permettront de nous défendre, Ausel et moi.
    — Et si le
roi se dresse contre les Templiers ?
    — Je
présume qu'il nous le fera clairement savoir et nous donnera peut-être dix
jours pour quitter le royaume.
    Je retins ma
respiration.
    — Ne vous
inquiétez pas, déclara Bertrand en prenant sa cuillère. Pour le moment...
    Il me fit un
clin d'œil.
    — ... je ne
m'éloignerai pas de vos jupons.
    Nous reprîmes
notre trajet autour de la ville. Les cloches appelaient les fidèles à la messe
de l'aube. Les fanaux flamboyaient dans les clochers. La brume commença à se
dissiper. Il faisait encore très froid, aussi fûmes-nous heureux de parvenir au
haut mur d'enceinte de l'hôpital de Bethléem. Un frère lai nous accueillit ;
d'autres s'occupèrent de nos montures et on nous conduisit au parloir. Je
somnolai un moment. Demontaigu était perdu dans ses pensées. Il se levait de
temps à autre et faisait le tour de la pièce comme pour inspecter les murs
chaulés, ou tapait de sa botte les carreaux rouges et cirés du sol. La chambre,
austère, était dépouillée de tout ornement à l'exception d'une croix
grossièrement sculptée et d'un solide mobilier rudimentaire. Propre et sentant
bon, elle était chauffée par des braseros. J'avais précisé au frère lai qui
nous avait reçus que nous désirions voir le supérieur au sujet de John Highill.
Il avait eu l'air surpris, mais avait acquiescé et, le doigt sur les lèvres
pour nous demander le silence, s'était éclipsé. On frappa à la porte. Le frère lai
revint, présenta ses excuses pour nous avoir fait attendre et

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