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Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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du commun et de s'être entretenu avec
eux. Je suis fière d'avoir été de ceux-là. Oh, oui, dix-neuf ans plus tard,
pendant la période des troubles, on voulut savoir pourquoi il avait abordé les
affaires royales — le Negotium Regis  — avec
quelqu'un de mon espèce. Je répondis : « Et pourquoi pas ? »
Je faisais partie de la chambre du roi, j'étais la confidente de son épouse, la
reine Isabelle. De plus, je ne me faisais point d'illusions. Si le roi était
défait, quelle bribe d'espoir me resterait-il ? Je n'avais d'autre choix
que de le soutenir. Oh, les Articuli Damnati , tout comme les Ordonnances
des barons, accusèrent Édouard de « prendre conseil là où il n'aurait pas
dû ». En réalité, ce n'était que méchante jalousie. Les seigneurs se
considéraient comme les conseillers de droit divin du souverain. Ce dernier
n'approuvait pas et, pour autant que je le sache, Dieu non plus.
    — Venez,
venez.
    Édouard rejeta
ses cheveux en arrière. Me saisissant la main avec fermeté, il me conduisit
vers l'étroite table entourée de quatre chaires à haut dossier. On avait
disposé au centre un pichet de vin blanc et une grande coupe pleine de
douceurs. Édouard et Gaveston prirent place aux deux bouts ; Isabelle et
moi nous assîmes face à face. Le souverain — encore sous le coup de
ses libations de la veille — parut, d'abord, fort expansif, les yeux
brillants à la lueur des chandelles. Gaveston se montrait plus réservé. Il alla
quérir quatre gobelets sur un dressoir et les remplit de vin tout en
m'observant avec attention. Je dissimulai ma surprise. Bien entendu, dans le
tourbillon d'intrigues dont Westminster était le centre, on soupçonnait tout le
monde. Le roi s'affala sur son siège en comprenant ce qui l'attendait et mit
bas son masque quelques instants : il se prit la tête dans les mains,
gonfla les joues et nous observa de sous ses sourcils. En ce matin de mars,
fête de l'Annonciation, Édouard renonça enfin à la simplicité cordiale qu'il
avait adoptée le soir précédent quand il était entré avec majesté dans la
grand-salle du manoir de Bourgogne. Il avait à présent l'air las et harassé. Le secretum concilium commença plutôt calmement.
    — De quoi
disposons-nous ? murmura-t-il. Pierre ?
    Il interrogea du
regard son bien-aimé, l'homme que Winchelsea nommait « l'idole du roi ».
    — De quoi
disposons-nous ? Que pouvons-nous faire ?
    — Fort peu
de choses, pour le moment, répondit le favori.
    Il posa ses
coudes sur la table et se prit le visage entre les mains.
    — Nous
avons quelques chevaliers bannerets, précisa-t-il d'une voix traînante, des
compagnies de soldats, d'archers et mes Kernia. Le manoir de Bourgogne est bien
fortifié, protégé et approvisionné.
    Il s'essuya les
doigts sur une toaille.
    — Même si
ces odeurs infectes et les effluves des ordures s'insinuent partout. Mais...
    Il leva les
yeux.
    — ... les
barons ont installé leurs hommes à l'abbaye de Westminster. D'après ce que j'ai
appris, il en arrive davantage tous les jours. Notre sainte mère l'Église les
soutient ; la détention de Langton à la Tour contrarie fort les évêques.
Ils se sont rassemblés derrière Winchelsea pour qui j'incarne Satan en
personne. Maintes rumeurs prétendent qu'il a l'intention de m'excommunier par
la cloche, le livre et le cierge [6] .
    Gaveston
continua, sans ménagement :
    — Les
barons semblent bien pourvus en or et en argent. Nous en avons peu et,
Westminster étant en fait assiégé, aucun shérif, aucun bailli n'osera présenter
ses comptes ou remettre ses recettes à Pâques.
    Langton était
trésorier ; il a sans nul doute amassé une fortune qui, en réalité, sire,
devrait vous appartenir, mais personne ne la peut trouver. Il est logé à la
Tour. Il parie qu'il peut tenir plus longtemps que vous. Peut-être a-t-il
raison.
    Gaveston frappa
la table à petits coups.
    — Les
grands seigneurs ont été rejoints par les émissaires de Philippe de France !
s'exclama-t-il en saluant Isabelle d'un air moqueur. Ils exigent, et en font
une question d'honneur envers vous, madame, que je sois renvoyé...
    — Croyez-moi,
monsieur, l'interrompit Isabelle, mon honneur n'est pas le premier souci de mon
père.
    Elle haussa les
épaules avec grâce.
    — En fait,
reprit-elle, je ne pense pas qu'il se préoccupe le moins du monde de moi ni de
mon statut.
    — Mais
continuerez-vous à jouer votre rôle ? s'enquit le

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