Le Dernier Caton
père Murphy le supplia, en riant à moitié, de ne pas jeter plus d’huile sur le feu, car ce n’était pas le moment d’un nouveau soulèvement populaire.
La visite terminée, ils nous proposèrent de continuer par d’autres Lieux saints de la ville.
— Il nous reste encore quelque chose à voir, dis-je, la crypte souterraine.
Pierantonio me regarda sans comprendre et Murphy Clark esquissa un sourire satisfait.
— Comment connaissez-vous l’existence de cette crypte ? demanda-t-il, intrigué.
— Ce serait trop long à raconter, répondit Farag en m’ôtant les mots de la bouche. Mais nous serions très heureux de la voir.
— Cela va être compliqué, murmura-t-il, songeur, en caressant sa barbe. Cette crypte appartient à l’Église orthodoxe grecque et seuls quelques rares prêtres catholiques, on peut les compter sur les doigts de la main, ont réussi à y entrer. Votre frère, en sa qualité de custode, pourrait peut-être obtenir le permis.
— Mais j’ignorais jusqu’à son existence, dit Pierantonio, déconcerté.
— Je ne l’ai jamais vue non plus, répondit Murphy, mais comme votre sœur, je serais très heureux de pouvoir le faire. Demandez l’autorisation au patriarche orthodoxe de Jérusalem. Un coup de fil devrait suffire, à mon avis.
— C’est absolument nécessaire ? voulut savoir mon frère, car il s’agissait d’une faveur politiquement compromettante.
— Je te promets que oui.
Pierantonio se dirigea vers la sortie, se mit dans un coin à l’écart et sortit son téléphone portable de la poche de son habit. Il revint quelques minutes plus tard.
— C’est fait ! nous dit-il d’un ton joyeux. Nous devons aller chercher le père Chrysostomos. Cela n’a pas été facile, car il s’agit apparemment d’une voûte secrète cachée au plus profond de la basilique. Vous auriez dû entendre les exclamations de surprise et d’incrédulité de mon interlocuteur. Mais comment connaissez-vous son existence ?
— C’est une très longue histoire, Pierantonio.
Mon frère, un peu fâché, s’adressa alors au premier prêtre orthodoxe qui lui tomba sous la main. Peu de temps après, nous nous retrouvions devant un pope à la barbe grise qui portait un chapeau en forme de toit de cheminée identique à ceux des hommes de Florence sous la Renaissance. Le père Chrysostomos, dont les lunettes suspendues à un cordon tombaient sur la poitrine, nous contempla d’un air tout à fait ahuri. Son expression montrait clairement qu’il ne s’était pas encore remis du coup de fil récent qui le prévenait de notre arrivée et de son motif. Pierantonio s’approcha et se présenta en indiquant tous ses titres honorifiques – ils étaient bien plus nombreux que je ne le croyais. Le père lui serra la main avec respect tout en gardant sa mine surprise. Les présentations faites, il laissa échapper la question angoissée qui oppressait son cœur ému :
— Je ne voudrais pas être indiscret, mais pourriez-vous m’expliquer comment vous connaissez l’existence de la Chambre ?
Le capitaine répondit :
— Par des documents anciens qui mentionnent sa construction.
— Ah oui ? Si cela n’est pas trop indiscret, j’aimerais en savoir un peu plus. Le père Stephanos et moi avons passé toute notre vie à garder les reliques de la vraie Croix conservées dans la crypte, mais nous ne savions pas qu’elle était connue ni qu’il y eût des documents traitant de sa construction.
Tandis que nous descendions, étage après étage, vers les profondeurs de la terre, Farag, le capitaine et moi, chacun à notre tour, lui racontâmes ce que nous savions sur les croisades et la chambre secrète, sans mentionner les stavrophilakes bien sûr. Enfin, après avoir parcouru des centaines de marches en pierre, nous parvînmes dans une salle rectangulaire qui paraissait servir de débarras. Des tableaux d’anciens patriarches étaient suspendus aux murs, des meubles recouverts de housses en plastique paraissaient dormir du sommeil du juste, et il y avait même une vieille soutane orthodoxe suspendue à un porte-manteau qui jouait au fantôme. Au fond, une grille de fer protégeait une seconde porte de bois qui paraissait mener à notre objectif. Un homme âgé à la barbe blanche se leva de sa chaise en nous voyant.
— Père Stephanos, nous avons des invités, annonça le père Chrysostomos.
Ils échangèrent quelques mots à voix basse et se tournèrent ensuite
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