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Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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ville appelée Antioch mais je sais où se trouve le lac Tana, c’est là que naît le Nil bleu 25 , et je t’assure que ce n’est pas vraiment une zone civilisée ni facile d’accès. Oublie que tu es au XXI e siècle. Régresse d’un millier d’années et tu seras plus près de leur réalité.
    Je le regardai, bouche bée, les yeux écarquillés.
    — Que diable dites-vous ? grogna Glauser-Röist en remuant sur son lit. Mais qu’est-ce que vous racontez, bon sang ! répéta-t-il, indigné.
    Nous nous tournâmes tous vers lui tandis qu’il essayait de chasser les mouches et de se redresser.
    — Nous sommes en Éthiopie, Kaspar, dit Farag en lui tendant une main pour l’aider à se lever. (Soutien que le capitaine refusa.) Selon notre hôte, cela fait plusieurs jours que nous avons traversé la frontière soudanaise, et nous sommes sur le point d’arriver à Antioch, la ville de notre prochaine épreuve.
    — Maudite soit-elle ! grogna Glauser-Röist en passant les mains sur son visage pour essayer de sortir de sa torpeur.
    Lui aussi aurait eu grand besoin d’un coup de rasoir.
    — Mais nous devions aller à Antioche ?
    — C’est ce que nous pensions, répondis-je, aussi perplexe que lui ; en réalité, il ne s’agissait pas de l’ancienne Antioche, en Turquie, mais d’un village éthiopien appelé Antioch.
    — Au cas où vous ne le sauriez pas, dit Farag, plus résigné que nous devant l’étrange tournure que prenaient les événements, Antioche et Antioch, c’est la même chose. Ce sont les deux formes correctes du même nom. Il existe d’ailleurs plusieurs autres villes qui portent ce nom dans le monde. Ce que j’ignorais, c’est que l’une d’elles se trouvait en Abyssinie.
    — Je me disais bien que c’était bizarre, d’aller de Turquie en Égypte pour repartir vers la Turquie. Cela aurait fait une boucle bien compliquée pour un pèlerin médiéval, qui devait parcourir le chemin à pied ou à cheval.
    — Tu as l’explication maintenant, dit Farag en saluant Mariam qui quittait notre cabine. Je propose que nous sortions d’ici et allions nous rafraîchir dans le fleuve.
    — Quelle bonne idée, dis-je me mettant debout. Je sens très mauvais !
    — Voyons…, voulut vérifier Farag en s’approchant de moi.
    —  Vade retro Satanas ! criai-je en m’échappant par le petit rideau de lin.
    Le capitaine murmura quelque chose sur la luxure que dans ma précipitation je ne parvins pas à comprendre. Mariam nous assura qu’il n’y avait aucun danger à se baigner dans les eaux bleues de l’Atbara, aussi nous sautâmes dans l’eau, et je sentis renaître tous mes muscles et mon pauvre cerveau confus. L’eau était fraîche et paraissait propre mais le capitaine nous conseilla de ne pas la boire, car la malaria et le typhus étaient des maladies endémiques dans la majeure partie des pays africains. Personne n’aurait pu l’imaginer en contemplant ce cours d’eau suave et transparent mais nous lui obéîmes. L’air était si pur qu’il semblait nous soigner de l’intérieur, et le ciel avait une couleur bleue si incroyablement parfaite qu’en le regardant on avait envie de voler. Les deux rives, séparées par une bonne distance, étaient couvertes d’une épaisse végétation d’où dépassaient les cimes de hauts arbres remplis d’oiseaux qui volaient en bandes d’un sommet à l’autre. Le paysage était si beau que j’aurais juré entendre dans le vent un chœur grandiose chantant au rythme de l’air et du courant du fleuve, combinant des notes musicales selon l’harmonie du ciel et de l’eau.
    Je n’avais pas ôté ma tunique pour me jeter à l’eau, mais elle flottait autour de moi de manière fort impudique. Farag et le capitaine avaient enlevé la leur. Les marins qui levaient et attachaient au double mât la voile triangulaire me voyaient sans doute de leur hauteur telle que Dieu m’avait mise au monde, mais ça m’était égal, ce ne devait pas être la première fois et en plus ils ne paraissaient pas particulièrement intéressés. Comme tu as changé, Ottavia, me dis-je en nageant comme une sirène. Moi, une nonne qui avait passé toute sa vie enfermée dans un bureau, en travaillant dans le sous-sol des Archives secrètes du Vatican, au milieu des parchemins, papiers et manuscrits anciens, j’étais là, à flotter, nager, me submerger dans les eaux d’un fleuve de vie au milieu d’une nature sauvage. Et, cerise sur le gâteau,

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