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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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me la prendre.) C’est la seule chose que je tiens encore de lui,
ajoutai-je d’un ton pitoyable.
    Il grommela, me congédia et ordonna à Tatwine de me mettre
dans le mur de boucliers en cas de bataille.
    Tatwine était immense, aussi grand que moi, avec une
poitrine de forgeron et des bras énormes sur lesquels il avait fait des marques
avec une aiguille et de l’encre. Il se vantait que chacune représentait un
homme qu’il avait tué au combat, et un jour que je voulus les compter je dus renoncer
à la trente-huitième : ses manches cachaient le reste. Il ne se
réjouissait guère de m’avoir parmi ses guerriers. Il le fut encore moins
lorsque Brida insista pour m’accompagner, mais je lui expliquai qu’elle avait
juré à mon père de ne me jamais quitter et qu’elle était une femme rusée qui
connaissait des sorts propres à troubler l’ennemi. Il crut ces deux mensonges
et pensa probablement qu’une fois que je serais mort, ses hommes pourraient
prendre leur plaisir avec Brida et que lui-même rapporterait Souffle-de-Serpent
à Æthelred.
    Les Gallois avaient traversé la Sæfern très haut en amont,
puis ils étaient descendus dans les riches prairies où engraissait le bétail.
Ils aimaient faire de rapides incursions et disparaître avant que les Merciens
aient rassemblé leurs forces, mais Tatwine nous entraîna sur un pont sur la
Sæfern.
    Les pillards tombèrent tête baissée dans le piège. Nous
arrivâmes au pont au crépuscule, dormîmes dans un champ, nous réveillâmes avant
l’aube et, juste au moment où le soleil se levait, nous vîmes Gallois et bétail
volé arriver vers nous. Ils tentèrent de passer plus loin au nord, mais leurs
chevaux étaient fourbus, les nôtres dispos. Se rendant compte qu’ils ne
pourraient fuir, ils revinrent vers le pont. Nous en fîmes autant, descendîmes
de selle et formâmes le mur de boucliers. Les Gallois également. Ils étaient
vingt-huit. Avec leurs cheveux hirsutes, leurs longues barbes et leurs
guenilles, ils avaient l’air de sauvages, mais ils portaient des armes bien
entretenues et de solides boucliers.
    Tatwine, qui parlait un peu leur langue, leur déclara que
son seigneur montrerait sa merci s’ils se rendaient. Pour toute réponse, l’un
d’eux se tourna, baissa ses braies et nous montra ses fesses crottées.
    Nos deux murs se faisaient face, nous bloquions le pont et
les Gallois nous hurlaient des insultes. Tatwine n’était point sot. Sa tactique
était simple : les Gallois étaient supérieurs en nombre et pouvaient nous
vaincre, mais si nous restions sur le pont, nos flancs étaient protégés par le
parapet et il voulait les attirer jusqu’à nous. Il me plaça au centre et lui
derrière. Je compris plus tard que c’était pour prendre ma place lorsque je
tomberais. J’avais un vieux bouclier à la poignée branlante que m’avait prêté
mon oncle.
    Cela aurait pu durer jusqu’à la nuit si des gens des
environs n’étaient arrivés. L’un d’eux portait un arc et commença à tirer sur
les Gallois, qui ne cessaient de boire depuis le matin. Tatwine nous avait
distribué de l’ale, mais point trop.
    J’étais inquiet. Plus encore : terrifié. Je n’avais pas
d’armure, alors que les soldats de Tatwine portaient cotte de mailles ou de bon
cuir. Tatwine était coiffé d’un casque, je n’avais que mes cheveux. Je pensais
mourir, mais je me rappelai ce que j’avais appris et passai mon harnais autour
de mon cou, Souffle-de-Serpent pendant dans mon dos. Une épée se dégaine bien
plus vite par-dessus l’épaule, et je pensais commencer le combat avec
Dard-de-Guêpe. J’avais la gorge sèche et l’estomac noué et ma cuisse tremblait,
mais l’excitation se mêlait à ma peur. Voilà à quoi ma vie m’avait mené :
un mur de boucliers. Si je survivais, je serais un guerrier.
    Les flèches ne cessaient de voler, criblant surtout les
boucliers, mais l’une d’elles parvint à se loger dans la poitrine d’un Gallois qui
s’effondra. Soudain, leur chef perdit patience et poussa un grand cri. Et ils
s’élancèrent.
    C’était un petit mur de boucliers, pas une grande bataille.
Une querelle pour du bétail, pas l’affrontement de deux armées, mais c’était
mon premier mur. Instinctivement, je resserrai mon bouclier contre ceux de mes
voisins, je baissai ma spathe pour la pointer par-dessous et je me courbai
légèrement pour amortir le choc. Les Gallois hurlaient comme déments, cherchant
à nous

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