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Le fantôme de la rue Royale

Le fantôme de la rue Royale

Titel: Le fantôme de la rue Royale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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garant, les coupables seraient désignés et formellement convaincus. Compte tenu du caractère particulier de l’enquête et des actes sacramentels autorisés par Sa Majesté et par l’archevêque de Paris, il entendait tenir cette séance à huis clos, afin de ne laisser filtrer aucune information susceptible de troubler le peuple et de menacer l’ordre public.
    M. Testard du Lys acquiesça aussi à cette proposition, rappelant doctement, comme pour se justifier à ses propres yeux, que l’aïeul du roi avait créé à la fin du siècle dernier, alors qu’une contagion effroyable d’empoisonnements bouleversait la cour et la ville, une juridiction spéciale, appelée Chambre ardente, qui avait eu à connaître de ces cas auxquels s’ajoutaient, dit-il en baissant la voix, de terribles accusations contre la maîtresse du roi, soupçonnée d’avoir prêté la main, et cela n’était que figure de style, à la célébration de messes noires. Nicolas le laissa gloser tout à loisir, estimant que les deux situations n’avaient de commun que le souci d’entourer de silence le déroulement d’une procédure criminelle touchant à des matières scandaleuses.
    Sur la fin, le lieutenant criminel se radoucit, s’attendrissant sur la chance d’avoir, à la lieutenance générale de police, des magistrats si soucieux de quêter son avis. Il recommanda à Nicolas de persévérer dans cette voie et ajouta qu’ainsi il aurait toujours son oreille et serait assuré de sa bienveillance. Ils se quittèrent très satisfaits l’un de l’autre.
    Alors que Nicolas sortait du cabinet, le père Marie, hors d’haleine, l’intercepta. L’huissier lui signifia que M. de Sartine, revenu à l’improviste dans la nuit, souhaitait le voir sans délai. Il fit mettre le cap à sa voiture sur l’hôtel de police où, dès son arrivée, un laquais nerveux lui confia que l’humeur du maître était des plus sombres. Il se rassura à la vue du spectacle qu’offrait son chef, assis derrière son grand bureau. Il maniait ses perruques, ce qui était réconfortant. Cet exercice propitiatoire augurait souvent de la dominante de la journée. Pour l’heure, il roulait dans ses doigts une boucle d’un modèle de perruque grise à reflets plus sombres qui se reformait à chaque étirement et reprenait sa forme comme un ressort bien conditionné.
    — Voyez, mon cher Nicolas, cet extraordinaire modèle de cheveux artificiels. Il me vient de Palerme, où un ex-jésuite, expulsé du Portugal, a réussi à mettre au point ce modèle. Reste à voir s’il tient la route et si son usage répété et sa coiffure quotidienne permettent de conserver la qualité initiale.
    Sartine reposa l’objet, et se tourna vers Nicolas.
    — Alors, monsieur le commissaire, où en êtes-vous avec l’archevêque et avec les cérémonies grotesques que vous demandâtes l’autorisation d’organiser ? Tout cela traîne, et Sa Majesté, que je viens de quitter…
    Il soupira comme si cette constatation d’évidence l’attristait, car elle laissait entendre qu’une fois de plus le vieux roi avait festoyé tard dans la nuit.
    — Bref, le roi m’a encore bien recommandé de faire diligence dans une affaire qui intéresse l’État, et dans laquelle le magistère spirituel ne doit interférer qu’autant que dans les limites imparties, et tout cela devant rester enveloppé du secret le plus épais. Qu’un folliculaire épris de scandale s’en saisisse, et aussitôt ce sont toutes les officines et imprimeries clandestines de France, de Navarre et surtout de Londres et de La Haye 87 qui se mettront à composer pamphlets et chansons.
    Nicolas saisit au vol l’idée qui transpirait du propos de son chef. Cependant, il était nécessaire d’aborder la décision souhaitée de manière à laisser à M. de Sartine le sentiment qu’il en était l’auteur, et même plus, qu’il l’imposait à des subordonnés bornés qui n’en comprenaient ni l’intérêt ni la nécessité.
    — Monsieur, j’ai la satisfaction de vous annoncer que l’exorcisme a été accompli. Avec succès, je crois. Il a conduit à la découverte d’un corps de nouveau-né dans la cave de la maison Galaine. L’infanticide est présumé et je poursuis mes dernières investigations. Je ne désespère pas d’aboutir aujourd’hui et de confronter publiquement les suspects à mes conclusions, en votre présence et celle du lieutenant criminel.
    Le « publiquement » jeté sans

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