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Le fantôme de la rue Royale

Le fantôme de la rue Royale

Titel: Le fantôme de la rue Royale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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pas très loin de la rue de Bièvre. Le jour, on peut le pincer chez lui, car il ne sort que la nuit. Est-ce tout ?
    — Que non pas ! J’ai consulté le notaire de Galaine. Lui aussi fermé comme une huître. Mais ces tabellions-là, ça ne résiste pas à une parole un peu forte. Des plumassiers !
    — Monsieur l’inspecteur, dit Nicolas d’un ton noble, vous vous oubliez. Savez-vous que vous parlez à un ancien clerc de notaire ?
    — Dieu merci, vous vous en êtes sorti ! Bref, l’homme a parlé. Aucun testament n’a été déposé à son étude, mais il dispose d’une lettre de Claude Galaine qui l’avertit que ses dernières volontés se trouveront entre les mains innocentes — il a insisté sur ce qualificatif — d’un Indien de la tribu des Algonquins qui, le moment venu, sera chargé de les rendre publiques.
    Nicolas se frottait les mains. À la grande surprise de Bourdeau, il sortit de sa poche un petit papier plié qu’il agita victorieusement.
    — Le testament, le voici ! Il était dans l’œuf et, auparavant, au cou de Naganda.
    Il pirouetta, prit l’inspecteur par l’épaule et l’entraîna dans l’escalier.

X
    LUMIÈRE ET VÉRITÉ
    Et le dernier, de faire partout des dénombrements si entiers, et des revues si générales, que je fusse assuré de ne rien omettre.
    Descartes

    Rue Montmartre, Nicolas, en équilibre sur le marchepied du fiacre, expliqua à Bourdeau son plan de bataille. Il devait d’abord rencontrer le lieutenant criminel pour parer à tout retour de bâton sur une enquête si peu habituelle. Sans doute ne pourrait-il pas rencontrer M. de Sartine, qui avait passé la nuit à Versailles et serait sur le chemin du retour. Paré de ce côté, il comptait ensuite se rendre au couvent des religieuses de la Conception, là où deux gardes-françaises avaient situé le récit d’une scène entre une fille en satin jaune et un personnage qui pouvait être Naganda. Avec un peu de chance, il espérait y trouver quelque indice, si menu soit-il, qui contribuerait à faire progresser les choses.
    Pendant ce temps, Bourdeau tâcherait de retrouver Semacgus. Celui-ci ne devait pas être bien loin, possédé lui aussi par le besoin de savoir. Il faudrait également convoquer Sanson à la Basse-Geôle pour l’ouverture du nouveau-né. Le chirurgien de marine ne serait pas de trop pour cette opération. Le bourreau devant effectuer une exécution, le matin même, place de Grève, cela les mènerait jusqu’au milieu de l’après-midi. Resterait à Nicolas à rendre compte à Sartine revenu de Versailles, puis, avant la nuit, d’aller interroger Restif de la Bretonne dont le logis, au dire de l’inspecteur, était situé dans un garni de la rue de la Vieille-Boucherie, sur la rive gauche. Il regretta que, dans tout cela, ne figurât aucun moment disponible pour appréhender le sieur Langlumé, major des gardes de la Ville.
    Nicolas se fit conduire au Grand Châtelet. Il fut introduit dans le cabinet du lieutenant criminel, qui enfilait sa tenue de parade. L’une des charges de ce magistrat consistait en effet à assister aux exécutions capitales. Son humeur se ressentait de cette perspective et il reçut Nicolas le visage chaviré ; l’angoisse visible qui le tenaillait fit remonter le personnage dans l’estime de Nicolas, persuadé qu’un être que la mort d’un autre bouleversait ne pouvait pas être tout à fait mauvais. Il ne parut pas scandalisé par les explications de Nicolas. Son seul commentaire fut que « la volonté du roi prévalait sur les règles et usages, que, de toute façon, chacun en faisait à sa tête, que l’ordre normal des choses était bouleversé et qu’il n’avait plus son mot à dire dans une procédure si extraordinaire que, de sa vie, il n’en avait connu de semblable ».
    S’échauffant progressivement, il en vint à tenir des propos peu amènes mais, se rendant compte aussitôt qu’il s’adressait à quelqu’un de l’entour du roi, il ravala son exorde, s’adoucit, mit son irritation sur le compte d’une fatigue et d’un énervement passager. Bref, il finit par donner son aval à tout ce que lui proposait Nicolas, tant sur l’affaire criminelle de la rue Saint-Honoré que sur le cas de Langlumé. Le commissaire obtint ainsi qu’une séance, dont la date restait à fixer, serait organisée avec la famille Galaine dans la salle d’audience du lieutenant général de police, au cours de laquelle, il s’en portait

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