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Le Fils de Pardaillan

Titel: Le Fils de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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aux malandrins ? Reconnurent-ils Jehan le Brave qui, parmi eux, avait la réputation d’un diable à quatre ? Toujours est-il qu’ils battirent précipitamment en retraite et, tels des fantômes, s’évanouirent dans la nuit, emportant les éclopés.
    Jehan rengaina avec un éclat de rire sonore et se tourna vers cet inconnu, au secours duquel il était venu si fort à propos. Et il demeura muet de saisissement, le rire soudain figé sur les lèvres.
    Car cet inconnu, c’était Saêtta.
    La femme qui avait appelé à l’aide s’avança vers Jehan qui lui tournait le dos. Elle était si bien enveloppée dans une ample mante brune qu’il devenait impossible de distinguer ses formes. La tête était si bien enfouie au fond du capuchon qu’on n’apercevait même pas le bout du nez. Excès de précaution assez surprenant, car la nuit était profonde.
    Saêtta, en la voyant approcher, lui adressa vivement quelques signes mystérieux. Elle ne les comprit ou ne les vit pas. De cette même voix où ne perçait nulle émotion, elle dit doucement :
    – Vous venez de nous sauver la vie, au Révérend Père et à moi, monsieur. Nous sommes de trop pauvres gens pour reconnaître ainsi qu’il le mériterait un aussi signalé service. Du moins, notre reconnaissance éternelle vous est-elle acquise. Oserai-je vous demander de nous faire connaître le nom du vaillant gentilhomme qui expose si généreusement sa vie pour secourir le faible ?
    Le Révérend Père désigné s’avança à son tour. Comme sa compagne, il avait la tête perdue au fond du capuchon. Comme elle, il ne fit pas un geste pour découvrir son visage. Comme elle, enfin, il dit d’une voix douce, extraordinairement calme :
    – Votre nom, mon digne gentilhomme, s’il vous plaît ? A seule fin que nous le répétions dans nos prières.
    Saêtta, dépité de n’avoir pas été compris, grommela d’inintelligibles paroles.
    Jehan se retourna vers la femme, et d’une voix où perçait une sourde colère, malgré les efforts qu’il faisait pour se contenir :
    – Mon nom, madame ? Ne voyez-vous pas Saêtta qui s’évertue à vous faire toutes sortes de signaux ? Se peut-il vraiment que vous ne me reconnaissiez pas ?
    – Jehan le Brave ! s’exclama la mystérieuse inconnue.
    Chose remarquable, cette femme, qui s’était montrée intrépidement calme pendant l’attaque des truands, manifestait devant son sauveur une appréhension qui ressemblait presque à de la terreur. Le moine lui même se départit de cette froide impassibilité qu’il avait montrée jusque-là. Ils avaient fait deux pas en avant. Ils en firent précipitamment quatre en arrière.
    On eût dit, à les voir, que quelque danger se dressait devant eux, en la personne de leur sauveur. Et il fallait vraiment que ce danger leur parût effroyable pour marquer une si visible émotion, alors qu’ils étaient demeurés intrépides devant la mort qui les menaçait l’instant d’avant.
    Cette impression était si manifeste que Saêtta se campa résolument entre eux et Jehan, la main crispée sur la poignée de la rapière.
    Jehan remarqua tout cela et il se mit à rire doucement, et d’une voix mordante, il railla :
    – Allons, vous me reconnaissez… je le vois. Ote-toi de là, Saêtta… il faut que je parle à la signora et au digne révérend… Ote-toi de là, te dis-je, et laisse ta rapière tranquille. Sache que je suis homme à te tuer net… avec ton propre coup. Tu sais, ce fameux coup de la « saêtta » que tu as inventé… et que tu as toujours négligé de m’apprendre. Ce fameux coup, je le connais maintenant… et quelques autres aussi que tu ignores, toi. Notamment comment on peut désarmer un maître des maîtres, tel que toi. Et je n’ai pas besoin de te dire qui m’a indiqué ces coups… Tu le devines.
    Saêtta étouffa un rugissement de honte et de rage à cette allusion transparente à son duel avec Pardaillan. Saêtta se dit que Jehan savait tout maintenant. Et qu’il était le fils de Pardaillan et qu’il avait été désarmé comme un mauvais écolier, lui, Saêtta ! Nous savons, nous, qu’il se trompait. Jehan ne savait rien encore. Il parlait des coups que Pardaillan lui avait indiqués, mais il ignorait que Saêtta en avait déjà tâté à ses dépens.
    Quoi qu’il en soit, Saêtta eut peur. Non pas d’être tué. Il ne tenait guère à la vie et, au surplus, il était brave. Saêtta eut peur de subir cette humiliation de se voir

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