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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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à ce que Cornplanter vient faire ici j’ai cru comprendre qu’il cherchait à entraîner Sagoyewatha dans une expédition contre les colons de Schoharie, plus haut dans la vallée…
    Gilles fit un pas vers l’ouverture de la hutte. Nemissa se dressa devant lui, bras en croix, farouche et impérieuse… Doucement mais fermement il l’écarta.
    — Dis-lui que je ne sortirai pas. Mais je veux apercevoir ce Cornplanter. Il faut que je sache à quoi il ressemble…
    Il n’eut pas à écarter beaucoup la peau de cerf qui cachait l’entrée. Le Grand Conseil des Sénécas était juste dans son champ de vision. À nouveau la nuit était venue et, sur son obscurité, les silhouettes des Indiens éclairés par les flammes se détachaient vigoureusement. Gilles eut l’impression qu’il y en avait une multitude. Des hommes, jeunes pour la plupart, solidement bâtis sous les peintures violentes qui leur donnaient un aspect si redoutable. Il vit Sagoyewatha, toujours casqué de ses plumes d’aigle mais revêtu, sans doute pour la circonstance, d’un magnifique habit rouge d’officier anglais qui lui donnait un aspect étonnant. Il vit enfin, dressé en face de lui comme un coq de combat, un grand diable à la peau de cuivre clair dont le crâne rasé portait une sorte de diadème d’argent. L’épaisse mèche noire liée au sommet de sa tête était mêlée de plumes multicolores. De lourds bijoux d’argent étiraient les lobes largement percés de ses oreilles et s’incrustaient sous son nez arrogant. Ses yeux lançaient des flammes tandis que des paroles de colère jaillissaient comme un torrent de ses lèvres méprisantes…
    — Il dit que jamais les récoltes n’ont été aussi belles autour de Schoharie, souffla Sitapanoki, que c’est le moment ou jamais pour faire connaître aux gens de la vallée que les Iroquois n’ont pas oublié leurs frères massacrés par le général Sullivan, qu’ils sont toujours là et réclament vengeance… Il veut brûler toute la vallée.
    — Et que dit ton époux ?
    — Que les fruits de la terre notre mère doivent être respectés, que l’hiver sera bientôt là et que nous aurons faim, qu’enfin, il est bon d’attaquer les soldats mais que les paysans de Schoharie ne comptent pas beaucoup de guerriers. Mais ce sont là des raisons que Cornplanter ne comprend pas. Il n’aime que le sang et les cris des victimes. Les Iroquois sont cruels mais il est le pire de tous. J’ai entendu dire que coulait en lui du sang blanc et que c’est la cause de la haine insensée qu’il porte à tes pareils.
    Longtemps, la discussion se poursuivit autour du feu sans résultat apparent. Cornplanter, soutenu d’ailleurs par Hiakin, soufflait le feu et la fureur tandis que Sagoyewatha opposait tous les arguments d’une profonde sagesse. Puis, brusquement, les voix baissèrent de ton et il ne fut plus possible de rien entendre jusqu’à ce qu’enfin Sagoyewatha jetât quelques mots d’une voix forte :
    — Mon époux désire réfléchir cette nuit, traduisit Sitapanoki. Cornplanter va se retirer avec les siens. Demain, il reviendra chercher sa réponse… Mais je crains bien qu’il ne gagne la partie : il n’est jamais agréable de s’entendre traiter de lâche. Pourtant je ne comprends pas l’insistance de Cornplanter. Jamais il n’a combattu en compagnie de Sagoyewatha et ses guerriers sont bien assez nombreux pour submerger Schoharie sans l’aide des nôtres.
    Ces derniers mots firent tressaillir Gilles, le ramenant à cette mise en garde que Washington les avait envoyés, lui et Tim, porter au chef du clan des Loups. Qu’il se laissât entraîner à la suite de Cornplanter et le village, comme lors de la capture des deux messagers, retomberait sous la responsabilité d’Hiakin… d’Hiakin qui, justement, semblait prendre si fort le parti de l’Iroquois, d’Hiakin qui haïssait Sitapanoki…
    La vieille Nemissa saisit le bras de la jeune femme et lui montra la porte impérieusement.
    Au-dehors, les guerriers se dispersaient. Seul Sagoyewatha demeurait encore auprès du feu dans les braises duquel se perdait son regard songeur.
    — Je dois rejoindre mon époux, murmura Sitapanoki. Nemissa va rester avec toi jusqu’à ce qu’un guerrier vienne te garder à sa place. Je suis désolée…, ajouta-t-elle avec l’ombre d’un sourire.
    — Pas tant que moi, grogna Gilles. Mais, je t’en prie, dis à ton époux que je désire lui parler cette nuit même. Il

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