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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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secouer le charme.
    — Eussé-je connu vos lois que j’aurais frappé tout de même ! lança-t-il audacieusement. Ton oiseau divin allait tuer une femme.
    — Une esclave…
    — Ma peau est de même couleur que celle de cette esclave. Si l’une de tes sœurs de race avait été attaquée, Sagoyewatha, l’aurais-tu laissée mourir ?
    — Peut-être ! Quand le Grand Esprit se choisit une victime nous n’allons jamais contre sa volonté. Mais tu ne peux comprendre cela… et c’est pourquoi je te délivre.
    Tirant un long couteau de sa ceinture, le chef trancha rapidement les liens qui retenaient le jeune homme au poteau. Qui le soutenaient aussi car lorsque Gilles voulut avancer, il fut pris d’un vertige. Il n’avait rien mangé, rien bu depuis la veille et l’épuisement de sa nuit d’agonie se faisait sentir. Il vacilla sur ses jambes, tâtonna à la recherche d’un point d’appui. Igrak se jeta contre lui et le soutint en criant quelque chose. Sagoyewatha sourit.
    — L’enfant a raison : tu as besoin de nourriture et de repos. Viens ! Puisque tu portes la parole du grand chef blanc, tu es désormais mon hôte…
    Il eut un geste impératif et deux de ces Indiens qui l’instant précédent étaient prêts à dépecer le Français en écoutant ses hurlements comme une douce musique l’emportèrent avec des soins de mère jusqu’à une hutte voisine de celle du chef.
    Un moment plus tard, Gilles, nourri de maïs et de poisson grillé, un emplâtre d’herbes sur sa brûlure et enveloppé d’une chaude couverture entreprenait de réparer les dégâts des vingt-quatre heures les plus éprouvantes de sa vie en s’abîmant dans un profond sommeil…
     
     
    Accroupies de part et d’autre de la couche de Gilles, les deux femmes offraient un contraste saisissant. La lueur du petit feu de branchages exaltait la beauté de Sitapanoki et accusait la décrépitude de sa compagne, sorte de momie desséchée qui fumait sa pipe avec la gravité d’un vieux pirate sur la dunette de son navire. Gilles préféra ne pas la regarder.
    Se redressant sur un coude, il sourit à la jeune femme.
    — Si ton époux fait de toi ma gardienne, il fait de moi l’homme le plus heureux du monde, murmura l’ancien élève de Saint-Yves, trouvant d’instinct les mots d’une galanterie toute française. Évidemment, celle-là est moins agréable ! ajouta-t-il en désignant d’un mouvement de tête la vieille à la pipe. Je m’en passerais volontiers.
    — Sagoyewatha est trop sage pour ne pas savoir qu’on n’allume jamais de feu dans une forêt de pins desséchée par l’été. Quant à celle-ci, ce n’est pas toi qu’elle garde mais moi car elle est ma belle-mère. Elle se nomme Nemissa. Les terres où nous sommes lui appartiennent comme le veut la coutume des Iroquois.
    Impressionné, Gilles inclina vaguement le buste en direction de la vieille femme qui le gratifia d’un coup d’œil glacé et se remit à tirer sur sa pipe comme s’il n’avait pas existé.
    — On dirait que je ne lui suis guère sympathique, soupira-t-il. En tout cas il est temps de me lever. Je dois voir ton époux.
    Il rejeta la couverture, se rappela juste à temps qu’il était entièrement nu dessous à l’exception de la peinture dont on l’avait enduit avant la torture et entreprit de se draper dans le tissu rugueux. Aussitôt, la vieille Nemissa fut debout et fit le geste de lui barrer le passage en prononçant quelques paroles incompréhensibles.
    — Tu ne dois pas sortir, traduisit Sitapanoki. Si nous sommes ici, c’est justement pour t’en empêcher. Sagoyewatha reçoit un autre chef autour du feu du Conseil et il ne désire pas que cet autre connaisse ta présence ici.
    — Qui est « cet autre » ?
    — Kiontwogky, celui que l’on a surnommé le Planteur de Maïs…
    — J’ai entendu parler de Cornplanter, fit Gilles se souvenant sans plaisir de l’étrange mission qui lui avait été confiée. On dit qu’il jalouse ton époux et qu’il te convoite. Que vient-il faire ici ?
    — On dit vrai. Deux fois déjà, j’ai échappé à des tentatives d’enlèvement qui ne pouvaient venir que de lui mais Sagoyewatha refuse d’y croire car il est lui-même noble et droit.
    — Les Iroquois ne savent-ils donc pas respecter l’épouse de leurs frères ?
    — Si. Quand elles sont de leur race. Moi, je suis d’une race ennemie, une sorte de captive. Ce n’est pas un crime de voler une captive. Quant

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