Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
dites-moi ce que fait cet abruti de Tim Thocker !
    Il avait hurlé son étrange prière comme s’il espérait être entendu au plus haut du ciel mais sa voix se perdit dans le tintamarre où se mêlaient maintenant les hennissements des chevaux.
    Un souffle tiède lui balaya la figure.
    — Chut !… fit une petite voix et Gilles qui avait fermé les yeux les rouvrit sur le visage anxieux d’Igrak agenouillé près de sa tête, un doigt sur la bouche. Il lui sourit mais déjà l’enfant s’attelait de toutes ses forces à l’un des piquets qu’il secoua avec une énergie farouche. Les muscles naissants saillaient sous sa peau cuivrée qui bientôt fut couverte de sueur. Mais, au bout d’un moment, le piquet bougea suffisamment pour que grandît enfin l’espoir de l’arracher. Avec un sourire de triomphe, le petit guerrier se jeta sur l’autre pièce de bois mais, au-dehors, quelqu’un cria son nom.
    L’enfant tressaillit et Gilles vit l’angoisse passer sur son visage crispé.
    — Va vite ! souffla-t-il, je ferai le reste tout seul ! Merci… cent fois merci…
    Les yeux soudain brillants, Igrak se releva et prestement glissa un couteau sous les épaules de Gilles.
    — Ami…, fit-il.
    Puis, avec la souplesse d’une anguille, il se glissa dans un trou à ras du sol qu’il avait dû percer dans la paroi et que Gilles n’avait pas remarqué. Resté seul, il commença par écouter intensément. Le bruit commençait à faiblir. Les pas des hommes et des chevaux incontestablement s’éloignaient… Sans doute ne s’occuperait-on pas de lui avant quelque temps mais peut-être valait-il mieux attendre la nuit pour achever sa libération. D’autre part, si l’on venait lui apporter quelque nourriture, il se pouvait que l’on s’aperçût des dommages subis par le piquet, auquel cas tout serait à recommencer et sans l’aide d’Igrak. Après tout, si l’enfant avait, à cet instant, entrepris de le délivrer c’est qu’il y avait une chance à saisir… Alors, bandant ses muscles il se mit à tirer de toutes ses forces. Sous son dos, il sentait la lame du couteau et puisait dans ce contact un regain d’énergie. Il tira, tira… et retint un cri de triomphe quand, brusquement, le piquet s’arracha…
    Sa main droite libérée, il se tordit pour saisir le couteau, réussit à refermer ses doigts engourdis dessus. Tout son corps courbatu criait de douleur mais l’excitation de sentir la liberté si proche le soulevait. La lame mordit les cordes qui liaient sa main gauche. Igrak avait bien fait les choses : le couteau coupait comme un rasoir. En quelques instants, les torons de chanvre cédèrent. Dès lors, libérer ses pieds fut pour le jeune homme une simple gymnastique.
    Debout, il s’étira plusieurs fois, plia les genoux. La circulation, douloureusement d’abord, puis de plus en plus librement, se rétablissait. Alors, Gilles alla prudemment jeter un coup d’œil au-dehors.
    Il n’y avait personne en vue. Tous ceux qui ne partaient pas étaient massés à l’entrée donnant sur la rivière où l’on mettait les canoës à l’eau. Ceux des Indiens qui étaient montés étaient partis à cheval, les autres dans les longues pirogues peintes mais personne ne faisait attention à ce qui se passait dans le village vidé, chacun ayant sans doute à cœur de saluer les guerriers. Avec un battement de cœur, Gilles s’aperçut qu’il n’y avait personne à l’entrée donnant sur les champs de maïs. Alors, saisissant la couverture laissée dans un coin et dont il comptait se faire un vêtement quand il en aurait le temps, il s’élança, aussi nu que la main, courut à s’en faire éclater le cœur en priant le Ciel que personne ne l’aperçût, franchit l’enceinte et plongea enfin en plein cœur du champ de maïs qui l’engloutit comme une vague…
    Il ne s’y arrêta qu’un instant. Sa fuite pouvait être découverte d’une minute à l’autre. Il ne devait pas s’attarder. À l’aide de son couteau, il coupa une large bande dans sa couverture, s’en fit une sorte de pagne, y glissa la lame providentielle puis roulant le reste sous son bras en prévision de la nuit, il entreprit de traverser la mer verte en direction des bois qui coulaient presque jusqu’au fond de la vallée.
    Le soleil tapait dur et, quand il l’atteignit, la fraîcheur des bois lui fit du bien. Ils étaient touffus et sombres avec d’épais buissons d’airelles et de mûres qui le griffaient

Weitere Kostenlose Bücher