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Le granit et le feu

Le granit et le feu

Titel: Le granit et le feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Guillaume poussa Broiefort jusqu’à eux, et du doigt désigna leurs compagnons :
    — Tout ceci, messire Canole, est contraire aux dispositions de la matinée !
    Un sourire mit un trait d’ombre entre les lèvres du routier.
    — Soit, baron.
    D’un geste, il commanda le repli à ses piétons et capitaines, ce qu’ils firent dans un grand désarroi.
    Guillaume se tourna vers sa députation :
    — Sauf Girard et Clergue, éloignez-vous aussi. N’ayez crainte : il y a, sur nos parois, une centaine d’archers et d’arbalétriers… Nous sommes en sûreté.
    Il mentait. Cent hommes… Il eût aimé les avoir ! Tandis que ses fidèles rebroussaient chemin, il interpella l’Anglais.
    — Nous voici réunis pour décider du sort de cette forteresse qui est mienne, et selon nos conventions… Lors, je vous fais serment que nous les respecterons… Mais prenez aussi, devant Dieu et mon chapelain, l’engagement solennel, si le sort vous est contraire, de vous conduire loyalement envers nous !
    Des clameurs étourdissantes – les Gascons ! – éclatèrent à l’adresse du chef de bande, puis des huées destinées aux champions de Rechignac. Ceux de Knolles mirent pied à terre, sauf Briatexte, qui demeura proche de l’Anglais.
    Et tandis que les deux noirauds trottaient gaiement vers le camp ennemi, Knolles s’inclina sans plus de façons sur l’encolure de son cheval :
    — Je n’ai nullement besoin de ton chapelain, baron, car je suis toujours fidèle à la parole donnée !
    — Alors, prouve-le incontinent ! Fais reculer tes satellites d’un bon pas derrière les planches… Et vous, Clergue, partez.
    Le cordelier s’éloigna. L’Anglais parcourut au galop les palissades, menaçant du geste et de la voix les hommes prêts à les enjamber.
    Les tambourins des filles et leurs grelots, les cris, les vociférations des routiers s’apaisèrent. Tandis que Knolles, furieux, tançait ses capitaines, Guillaume mit pied à terre et confia Broiefort à Girard.
    — Mène-le au pont-levis.
    Le vieillard s’approcha de Blanquefort et le serra dans ses bras :
    — Que le Seigneur te protège… vieux frère !
    Ogier perçut un double sanglot et vit les deux hommes essuyer une larme.
    Guillaume offrit sa main à Jean du Taillis :
    — Bats-toi comme Gondrebœuf, Caraheu, Justaumont [158]  ! Ménage ton épaule autant que cela te sera possible et… et advienne que pourra !
    Enfin, à Ogier.
    — Sois preux !… Dis-toi que si vous succombez, dans le grand Paradis, vos places seront belles… Mais tu verras : Dieu est juste. Tu vaincras.
    Mélipart et Bemborough aidèrent Briatexte à descendre de son palefroi.
    — Ecrase-le, dit Mélipart en désignant Ogier.
    Guillaume sourit :
    — Prouve-leur que ton sang est d’une bonne espèce !
    Que répondre ? se demanda le damoiseau. Rien. Faire de son mieux… Son haubert devenait un fardeau et le gênait aux entournures. Un haubergeon eût peut-être été plus adapté à ce combat, mais ses jambes se fussent trouvées exposées au travers de ses heuses.
    « Tu vivras ! »
    Mensonge ! Aberration que cette certitude. Il se sentait à la merci d’une poussière d’inattention, d’une glissade ou d’un éclair d’acier imprévisible, et la quiétude qui le figeait maintenant n’était que de surface, car des frissons agitaient ses muscles. Ses avant-bras s’appesantissaient. En tremblant, il se pétrifiait peu à peu, devenait lourd comme un gisant de pierre. Non ! Non ! Qu’allait-il penser ?… D’ailleurs, il avait voulu être de cette ultime épreuve. Il avait cédé à l’attrait de la haine et de la turbulence, et peu importait qu’elles fussent présentement cruelles pour ses nerfs. Il vivrait ! Il vengerait Haguenier et les autres.
    — Allons, messires, hurla Robert Knolles. Il est temps !
    — Il est temps, en effet, dit Guillaume. Courage, Hugues !
    Chacun choisit son homme. Ogier se campa face à Briatexte ; Blanquefort opta pour le plus épais des routiers ; Jean s’approcha de l’autre, un couturé aux bras noueux, aux poignets ceints de bracelets de cuivre.
    Briatexte dégaina, puis abaissa sa visière (ce qu’Ogier trouva prématuré, mais fort bon : il ne ménageait pas son souffle). Il plaça son écu entre ses jambes, saisit son épée par les quillons et la ficha en terre ; ensuite, il rempoigna l’écu et s’assujettit sur son flanc.
    — Quelles armes ! s’exclama-t-il, son gantelet

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