Le Huitième Péché
des encensoirs, parlait sur un ton patelin. À cette distance, il était difficile de comprendre ce qu’il disait.
À l’abri des regards, cachés derrière une pierre tombale, ils crurent entendre :
— … elle n’était pas une mauvaise femme, même si les apparences jouaient contre elle… Marie-Madeleine, la pécheresse, n’était-elle pas la plus fidèle compagne de Notre-Seigneur ? Que celui qui n’a jamais péché lui lance la première pierre.
Malberg aperçut du coin de l’œil que Caterina tirait de sa poche un appareil photo dans lequel elle glissa une nouvelle carte mémoire.
Puis elle actionna le zoom pour prendre rapidement plusieurs clichés en rafale.
— Ne me demandez pas pourquoi j’agis ainsi, murmura-t-elle, comme pour anticiper sa question.
Malberg observait attentivement chacune des personnes présentes. Soudain, l’assemblée s’agita. Deux des hommes à l’air si distingué étaient en train de se taper dessus !
— C’est incroyable ! C’est bien la première fois que je vois une chose pareille ! dit Malberg.
— Nous ferions mieux de nous éclipser avant qu’on ne nous remarque, répondit Caterina.
Se retournant pour s’éloigner, elle resta figée de stupeur : elle se trouvait nez à nez avec un type très grand, en costume sombre, un de ces hommes tout ce qu’il y a de plus chic, au visage taillé à la serpe et au regard menaçant.
Caterina eut le réflexe de dissimuler l’appareil photo derrière son dos.
— Vous seriez bien aimable de cesser immédiatement vos activités, dit l’homme en noir d’une voix haut perchée qui contrastait avec son allure.
— Je ne vois pas de quoi vous parlez, répliqua Caterina, qui avait été prompte à se ressaisir.
— Cette cérémonie est strictement privée, insista l’inconnu, je ne souhaite pas qu’on prenne des photographies. Veuillez me donner votre carte mémoire !
Caterina hésita. Elle jeta un regard à Malberg qui hocha imperceptiblement la tête. Elle ouvrit alors maladroitement l’appareil et tendit la carte mémoire. L’homme s’en empara, la cassa en deux entre le pouce et l’index, et glissa les morceaux dans la poche de son costume croisé.
Puis il croisa les bras avant d’ajouter sur un ton menaçant :
— Et maintenant, vous feriez mieux de déguerpir avant que je fasse preuve de plus de fermeté.
Malberg et Caterina préférèrent s’exécuter, d’autant que l’assistance commençait à regarder dans leur direction.
Ils avaient déjà tourné les talons lorsque l’homme en noir leur jeta encore, à mi-voix :
— Et retenez bien ceci : il est parfois préférable d’enterrer non seulement la personne, mais aussi la vérité.
— Vous comprenez ce qu’il a voulu dire ? s’enquit Malberg une fois qu’ils eurent rejoint l’entrée principale.
Caterina ne réagit pas. Elle finit par secouer la tête.
— Je suis de plus en plus persuadée que je tiens le scoop de ma vie.
14
L e laboratoire du château de Layenfels était équipé d’appareils et d’instruments qui auraient fait pâlir d’envie les chercheurs de n’importe quelle université. Ordinateurs hyper-performants grands comme des armoires, microscope électronique, spectromètres à interférences et centrifugeuses, scanners ultramodernes, dispositif permettant de réaliser des expériences par thermoluminescence, ainsi qu’une douzaine d’écrans plats à haute résolution répartis dans toutes les pièces. Le tout fonctionnant en réseau.
Les laboratoires, agencés en enfilade, occupaient tout l’étage supérieur de la massive forteresse.
Ce matin-là, le calme et la concentration qui planaient sur ces lieux contrastaient avec l’agitation qui y régnait habituellement.
Le professeur en biologie moléculaire Richard Murath était assis devant l’écran de son ordinateur, dans son laboratoire ; il était entouré du docteur en cytologie Dulazek, du généalogiste Jo Willenborg, du professeur en toxicologie Masic, du chimiste Eric Van de Beek ainsi que de l’hématologue Ulf Gruna. Lorsqu’Anicet, pâle et les cheveux mouillés peignés comme toujours en arrière, entra dans le laboratoire, Murath leva brièvement les yeux avant de recommencer à pianoter sur son clavier.
Personne ne parlait. Fascinés, les hommes fixaient l’écran.
La tension se lisait sur les lèvres serrées de Murath. Il tentait de faire coïncider deux très longues rangées de codes-barres. À chaque
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