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Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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tandis qu’Ogier, rassuré, incliné sur l’appui-bras, répondait à son geste par un salut d’une ampleur dangereuse, mais qui pouvait tout aussi bien s’interpréter comme un appel à Shirton.
    — Merdaille ! murmura-t-il, inquiet.
    Deux guisarmiers contournaient le charreton. L’un, du piquant de son arme, enjoignait à l’archer de s’éloigner tandis que l’autre, levant sa hampe, menaçait et injuriait Guillaume.
    Shirton revint, les lèvres pincées comme s’il suçait une herbe du coin de sa bouche.
    — Va-t-il bien ? Lui as-tu dit que je ne suis en rien responsable de la fuite de sa fille ?
    — Oui.
    — L’as-tu averti que Tancrède est en Angleterre, elle aussi, et qu’elle peut venir à Ashby – si elle n’y est déjà ?
    — Non, car avant toute chose, je lui ai demandé si tu pouvais le retrouver en un lieu où vous auriez vos aises quelques moments. Il n’y a que la nuit, sur le seuil de la tente où il repose… Deux gardes seulement. Il t’attendra.
    — Ce charretier qui nous observe, faut-il s’en méfier ?
    — C’est un chevalier de France. De la vesprée au petit jour, ils sont enchaînés ensemble.
    — Mon oncle a-t-il été malmené ?
    — Plutôt offensé… Je le crois à bout de patience… Te savoir là, tout près, lui a rendu l’espoir.
    — J’ai admiré cet homme… à défaut de pouvoir admirer mon père…
    Des images ressuscitèrent : leur lugubre cheminement vers le Périgord, après l’Écluse ; leurs chevauchées côte à côte sur les terres de Rechignac, leurs rires ; leur farouche détermination pendant le siège du château par Robert Knolles…
    — Je sais seulement qu’il fut pris sous les murs d’Auberoche, il y a deux ans [150] . De qui est-il l’otage ?
    — Franke de Halle le remit au comte de Derby… qui n’en voulut point. Il fut joué aux dés, plus tard, pour le plaisir des dames, entre le comte de Northampton et le comte de Warwick… C’est Northampton qui a gagné [151] . Il l’a fait enfermer à la Tour en espérant qu’il y crèverait s’il n’acquittait pas sa rançon.
    — Pourquoi est-il à Ashby ?
    — Un chapelain a intercédé pour lui auprès d’Élisabeth de Northampton… On va l’employer pour la durée des joutes. C’est forfaire à l’honneur mais il mange à sa faim… Je lui ai dit qu’il avait deux alliés dans la place.
    — Je t’en sais bon gré, Jack !
    Ogier ne laissait pas d’être ému. Ses yeux le picotaient comme, sans doute, ceux que Guillaume frottait d’une main rageuse.
    — Partons, cela vaut mieux pour lui et pour toi.
    Sa foulée ajustée sur celle de Shirton, Ogier divagua, méfiant, parmi des tentes constituées d’étoffes médiocres : de petits seigneurs vivaient là dont l’unique intention, sans doute, était de fournir, devant le tribunal des dames, un ou deux bons coups de lance. Comme l’humidité ternissait leurs haubergeons, ils les enfouissaient, pour les fourbir, dans le sable d’un tonneau que leurs hommes d’armes roulaient deux par deux en se relayant sans trêve. Des feux ronflaient et fumaient au cul des chaudrons de mangeaille, et deux fèvres occupés à ferrer un cheval chantaient à tue-tête un refrain où figuraient les saintes Gudule et Aldegonde.
    — Des Hannuyers [152] , dit Shirton. Nous en avons moult à Londres et nous ne les aimons guère… mais notre reine les soutient…
    — Des Hannuyers, répéta Ogier. Nos ennemis… Je connais les armes de certains chevaliers… Le comte de Hainaut semble être présent : d’or au lion de sable lampassé de gueules. C’est sa bannière qui flotte là… Le seigneur de Bousingues, qui était à Crécy : d’or à six campanes d’azur… Et voilà le sénéchal du Hainaut : d’azur au lion d’argent armé et lampassé de gueules, billeté de même… Et des lions encore : de gueules, d’argent, de sable… On prétend que les lions et les léopards se détestent… Cela me paraît une fausseté !
    — Tu en as sur tes armes.
    Ogier retomba dans sa mélancolie. Porterait-il un jour de nouveau ses lions ? Une autre épée que Confiance ?
    — N’allons pas plus avant, dit Shirton. Regarde cette bannière.
    Ogier obtempéra.
    —  Quarterly, Gules and Or, in the first quarter a mullet Argent… Comment dis-tu cela dans ta langue ?
    —  Écartelé d’or et de gueules à une étoile d’argent au lieu du premier quartier. Pourquoi me demandes-tu cela ?
    — Si

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