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Le Journal D'Anne Frank

Le Journal D'Anne Frank

Titel: Le Journal D'Anne Frank Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Frank
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attention », facile à dire, mais est-ce bien vrai ? En ce moment, les disputes orageuses se sont calmées, seul Dussel est fâché avec Van Daan. Quand il parle de Madame, on n’entend qu’une seule chose : « cette pauvre cloche » ou « cette vieille andouille »et, inversement, Madame qualifie cet infaillible savant de « vieille demoiselle », « vieille fille toujours piquée au vif », etc. Comme on voit mieux la paille dans l’œil du voisin !
     
    Bien à toi,
    Anne
     
     
     
    LUNDI SOIR 8 NOVEMBRE 1943
     
    Chère Kitty,
     
    Si tu lis ma pile de lettres à la suite, tu te rendras sûrement compte que je les ai écrites dans des humeurs différentes. Je suis moi-même agacée de voir à quel point je suis influencée par l’humeur régnant à l’Annexe, d’ailleurs je ne suis pas la seule, nous sommes tous dans ce cas. Quand je lis un livre qui m’impressionne, je dois d’abord remettre sérieusement de l’ordre en moi-même avant de me présenter devant les gens, sinon ils trouveraient que j’ai l’esprit un peu tordu. En ce moment, comme tu as déjà dû t’en apercevoir, je traverse une période où je suis déprimée. Je ne pourrais pas vraiment te dire pourquoi, mais je pense que cela vient de ma lâcheté, à laquelle je me heurte sans arrêt. Ce soir, alors que Bep était encore ici, on a sonné longtemps, fort et avec insistance à la porte, je suis devenue livide, j’ai eu des douleurs dans le ventre et des palpitations, et tout cela parce que j’avais peur !
    Le soir dans mon lit, je me vois seule dans un cachot, sans Papa ni Maman. Parfois, j’erre sur la route, ou notre Annexe prend feu, ou ils viennent la nuit nous chercher et, pleine de désespoir, je me cache sous le lit. Je vois tout, comme si je le subissais vraiment, avec en plus le sentiment que cela pourrait m’arriver d’un moment à l’autre.
    Miep dit souvent qu’elle nous envie car nous sommes tranquilles ici. C’est peut-être vrai, mais notre angoisse, elle n’y pense sûrement pas. Je ne peux pas du tout m’imaginer que pour nous le monde redevienne jamais normal. Il m’arrive de parler d’« après la guerre », mais c’est comme si je parlais de châteaux en Espagne, de quelque chose qui ne se réalisera jamais.
    Je nous vois tous les huit dans l’Annexe comme si nous étions un morceau de ciel bleu entouré de gros nuages noirs, si noirs. Sur le cercle bien délimité où nous nous tenons, nous sommes encore en sécurité, mais les nuages avancent toujours plus près, et l’anneau nous séparant du danger qui s’approche ne cesse de se resserrer. Maintenant, le danger et l’obscurité sont tellement imminents que, ne sachant où nous réfugier, nous nous cognons les uns aux autres. Nous regardons tous en bas où les gens se bagarrent, nous regardons tous en haut où c’est calme et beau, et entre-temps, notre cercle est isolé par la masse sombre qui ne nous pousse ni en bas, ni en haut, mais se lient devant nous, mur impénétrable, qui s’apprête à nous détruire mais ne le peut pas encore. Il ne me reste plus qu’à crier et à supplier : « Oh anneau, anneau, élargis-toi et ouvre-toi pour nous ! »
     
    Bien à toi,
    Anne
     
     
     
    JEUDI 11 NOVEMBRE 1943
     
    Chère Kitty,
    J’ai trouvé un bon titre pour ce chapitre : « Ode à mon stylo-plume », In memoriam.
    Mon stylo-plume a toujours été pour moi un objet précieux ; je lui vouais le plus profond respect, surtout en raison de sa pointe épaisse, car je ne peux écrire tout à l’ait proprement qu’avec des pointes épaisses. Mon stylo a vécu une vie très longue et passionnante que je vais vous raconter brièvement :
    Quand j’avais neuf ans, mon stylo-plume est arrivé dans un petit paquet (enveloppé de coton), en qualité d’« échantillon sans valeur », venu d’aussi loin qu’Aix-la-Chapelle, ville de ma grand-mère, la généreuse donatrice J’étais couchée avec la grippe alors que le vent de février sifflait autour de la maison. Le glorieux stylo-plume était contenu dans un étui en cuir rouge et fut montré dès le premier jour à toutes mes amies. Moi, Anne Frank, la fière propriétaire d’un stylo-plume.
    A l’âge de dix ans, j’ai pu emmener mon stylo à l’école et là, la maîtresse m’a permis de m’en servir. A onze ans, cependant, j’ai dû ranger mon trésor, car la maîtresse de la dernière classe de primaire n’autorisait que les porte-plume et les encriers

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