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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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ses troupes inoccupées depuis les traités de Westphalie pour aider le Roi. Elle viendrait à Paris, mais ce serait pour assassiner son amant Monaldeschi et tenter d'enlever Niwen dont elle était tombée folle. Les mercenaires allemands de Condé, vainqueurs de Lens, viendraient assiéger la ville et lui réserver le sort que les Poméraniens de Gassion réservèrent à la Normandie. Le Parlement avait trahi ! Gondi harangua, caressa, menaça, calma, bénit. Il s'adorait bénissant ces foules tout à sa dévotion et qui ne voyaient que par lui, c'est-à-dire pas plus loin que son nez retroussé et noiraud.
    Dans sa boîte Scarron riait de ce chahut et de tout ce qu'on lui rapportait, tenant en sa main torse celle, blanche et jeune, d'une demoiselle d'Aubigné, nobliaute ruinée depuis les guerres de religion et descendante du grand et si grincheux Agrippa, et à laquelle il avait dit : choisissez le couvent ou bien m'épousez. Elle n'avait pas encore répondu ; mais se savait réduite à ces extrémités.
    qu'arrivait-il, là, à Scarron, peu chantre du mariage ? Rien ou tout. Un effet de mode : la jeune Françoise d'Aubigné, née aux Indes Occidentales de la Martinique, ancienne pensionnaire des Ursulines, évadée de Niort et autres lieux sans intérêt, comme Scarron du Mans, avait su, par sa fraîcheur et son apparition en Lysiane dans la délie de Mlle de Scudéry, séduire l'esprit vif et le corps contrefait de l'auteur du Roman comique. De plus Somaize la mit en scène en Stratonice. Scarron s'enchanta donc en se mettant en tête d'épouser une héroÔne de roman.
    que faire en une boîte à moins que l'on y songe ? Et que faire à Paris sinon étonner Paris ? Elle avait une jolie voix, non pour chanter comme Ninon, courtisane à voix d'ange, mais pour lire.
    Et Scarron lui faisait lire les descriptions faites d'elle par ces auteurs à la mode. Pour la Scudéry, Françoise d'Aubigné
    - Lysiane - était " grande et de belle taille, le teint uni et beau, les cheveux d'un ch‚tain clair, le nez bien fait, la bouche bien taillée, l'air noble, doux, enjoué, modeste, et pour rendre sa beauté
    plus parfaite et plus éclatante, les plus beaux yeux du monde ; noirs, brillants, doux, passionnés, pleins d'esprit. La mélancolie douce y paraissait quelquefois avec les charmes qui la suivaient toujours ; l'enjouement s'y faisait voir à son tour avec les attraits que la joie peut inspirer... Elle ne faisait pas la belle quoiqu'elle le f˚t infiniment. "
    Françoise, de plus, rougissait à lire ces portraits d'elle. Elle comptait seize ans, orpheline et sans fortune, écrivant des lettres à ravir, et sans dot pour trouver un mari convenable ni être acceptée par un couvent. Scarron adorait cette rougeur de la modestie.
    Il savait soigner cela !
    Scarron avait belle ‚me dissimulée sous les sarcasmes, et grand cúur dissimulé sous la difformité. Cette fille lui plaisait et puis elle n'était plus vierge, ayant été culbutée en une grange, disaiton, en quelque campagne des bords de l'Eure par un marquis. Elle ne s'offusquerait de rien, sinon, en jolie Précieuse, des fautes de vocabulaire. On la courtisait chez lui, cela l'amusait en sa boîte, mais l'esprit qu'elle mettait à répondre pour ne pas succomber enchantait le chanoine et le rassurait sur sa pudeur.
    Alors que Paris bouillonnait, défilait, s'armait, s'inquiétait, se révoltait, courait ça et là, Scarron menaçait de faire une fin de sa vie de garçon avec une beauté inespérée qui, bien s˚r nous le Savons, mais il ne pouvait malgré son esprit fertile l'imaginer, régnerait sur le plus grand Roi que connaîtrait la France, jusqu'à
    l'épouser. Roi vieillissant il est vrai, alors qu'il était encore un puceau grelottant sur un lit de camp dans le matin glacial de Saint-Germain. Méconfort que sa mémoire, b‚tie comme forteresse, n'oubliera jamais.
    En effet, le Roi, non plus que Scarron, n'oublierait cette journée-là.
    Le Roi n'oubliera rien de ce qu'il entendit. Il entendit le Parlement décréter Mazarin " perturbateur du repos public, ennemi du Roi et de l'Etat ", lui accorder vingt-quatre heures pour quitter la Cour, une semaine pour franchir les frontières du royaume et, passé ce délai, ordonner à tout Français de lui " courre sus ". Ainsi les gardiens de la loi selon Gondi rejetaient toute loi de justice, condamnant un Cardinal, ils n'y étaient pas habilités, refusant à un
    " accusé " tout moyen de défense. qu'étaient

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