Le Maréchal Suchet
bataillon de l’Ardèche n’en alignait que deux cent quatre-vingt-dix. Au demeurant, continuer à donner à ces bataillons le nom de leur département d’origine n’avait plus grand sens. Le nombre des soldats natifs de ceux-ci n’avait cessé de diminuer et ils avaient été remplacés par des conscrits venus des quatre coins de la France. Ils n’étaient plus qu’une poignée d’Ardéchois. La 69 e demi-brigade faisait à présent partie de la division Augereau.
Ayant quitté ses cantonnements sur le versant oriental des Alpes, elle fut engagée à Dego le 11 avril 1796, puis à Cosaria, le 13, où l’adjudant-major du bataillon Suchet fut tué ; ensuite, à Lodi, le 10 mai. Dans le courant du mois, après que l’armée eut occupé Milan, arriva de Paris la nouvelle que, dans un but de réorganisation, les demi-brigades devaient être à nouveau concentrées par amalgame. En d’autres termes, un chef de corps sur deux allait perdre ses fonctions. Aussi, malgré les rappels à l’ordre impératifs de Berthier, aucun ne s’empressa d’obéir. Cependant, à la fin de mai, cette fusion était réalisée et désormais Suchet servait dans la 18 e demi-brigade, dite « de bataille », à laquelle il allait rester attaché jusqu’à sa promotion comme général. Depuis le 1 er juin, cette demi-brigade faisait partie de la division Masséna qui avait subi lors des batailles précédentes des pertes importantes.
Le 5 août, Suchet participa à la bataille de Castiglione et, le 12 septembre à Cerea, il fut blessé d’un coup de feu. Ce ne devait pas être une blessure très grave car, trois jours après, au combat de Saint-Georges, il était de nouveau à la tête de son bataillon. Au début de septembre, la division se trouvait à proximité de Vérone et marchait sur Trente ayant ainsi combattu dans toute la plaine de Lombardie. Cependant, dans son rapport au Directoire sur la journée du 12 septembre, Bonaparte mentionna le comportement de Suchet qui « a été blessé en combattant courageusement à la tête de son bataillon ».
On peut s’étonner que le général en chef ait cru bon de fournir un détail aussi insignifiant que de citer un simple chef de bataillon, même si sa conduite avait été particulièrement méritoire. Peut-être jugeait-il que cette anecdote donnait précisément un peu de piquant à son communiqué. Et puis, le nom de Suchet ne lui était pas inconnu. Quoi qu’il en soit, en agissant de la sorte, Bonaparte lui rendait l’immense service de le sortir de l’anonymat, même si pour l’instant Suchet ne devait en tirer aucun avantage matériel.
Une fois de plus, dans le courant de septembre, la 18 e demi-brigade dut recompléter ses effectifs car elle ne comptait plus qu’un peu plus de mille cinq cents hommes. Cependant, les pertes continuaient à s’accumuler et les effectifs n’étaient plus en novembre que de mille hommes au lendemain de la bataille d’Arcole. Victor, qui avait reçu de l’avancement (il semble que tout le monde en avait autour de Suchet), avait été remplacé par l’adjudant général Monnier, officier tout à fait compétent, qui avait servi comme chef d’état-major dans une division d’infanterie.
Suchet, toujours chef de bataillon, fut de toutes les batailles, y compris Rivoli au cours de laquelle la division de Masséna parcourut cinquante kilomètres à pied sur des routes verglacées en quarante-huit heures, participant pendant ce temps à deux batailles. Elles aboutirent à la capitulation de Mantoue.
Ensuite, Masséna, en avant-garde de l’armée, marcha sur l’Autriche. Ce fut au cours de cette nouvelle campagne que Suchet fut une nouvelle fois blessé devant Neumarkt (2 avril 1797). Cette fois, les choses étaient plus sérieuses et il dut rester plusieurs semaines en convalescence.
Lorsqu’il put regagner son unité après un séjour dans un hôpital « qui manquait de tout », l’armistice avait été signé à Leoben (18 avril) et les hostilités étaient suspendues. Masséna avait provisoirement quitté sa division pour porter au Directoire à Paris la convention signée par Bonaparte avec les Autrichiens. Il avait été remplacé au pied levé par Brune.
En juin, le général en chef autorisa Monnier à faire broder sur son drapeau cette phrase : « Brave 18 e , je vous connais. L’ennemi ne tiendra pas devant vous. » Ces paroles ne coûtaient pas cher et n’avaient pas grand sens. C’était
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