Le Maréchal Suchet
présenta presque des excuses !
Ce même 1 er novembre, la division Suchet toujours en tête du 5 e corps captura (entre autres) trente pièces d’artillerie en poursuivant toujours les troupes du duc de Weimar. Le 9 novembre, après la capitulation de Blücher, toute l’armée, Suchet comme ses camarades, s’imagina que la campagne était terminée et que les troupes fatiguées allaient prendre leurs quartiers d’hiver. Mais tel n’était pas le dessein de Napoléon qui entendait, à présent qu’il avait abattu la Prusse, marcher contre l’armée russe.
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Au mois de décembre 1806, l’armée française pénétra donc en Pologne. Les conditions de vie y furent rapidement atroces. Le sol, boue et neige fondue, était une sorte de fange gluante où la progression était extraordinairement pénible. Les rares routes, plutôt des pistes, tournaient aux fondrières. Le déplacement des fourgons et des canons posait des problèmes sans fin. Les vivres manquaient et le bois humide permettait péniblement d’entretenir de maigres feux. Si les Polonais avaient acclamé les Français à leur arrivée, les paysans cachaient le bétail, le fourrage et les provisions. Suchet, comme ses camarades, en était réduit à de rares et brutales réquisitions, les habitants se refusant à vendre tout ce qui pouvait servir au ravitaillement. L’empereur songeait à faire prendre à son armée ses quartiers d’hiver mais la proximité de l’armée russe prête à entrer en action l’amenait à différer sa décision.
Le 26 décembre au matin, le 5 e corps arriva en vue de la petite localité de Pulstusk, sur la rivière Narew, au nord de Varsovie. À ce moment, il constituait l’aile droite du dispositif français. Lannes découvrit en face de lui le corps russe de Bennigsen, en avant de la ville et du carrefour de ses cinq routes, mais avec le Narew dans son dos. Lannes n’avait que dix-huit mille hommes et les Russes étaient près de quarante mille. De plus, malade depuis plusieurs jours, Lannes songeait sérieusement à demander à être relevé de son commandement mais l’idée d’un combat le revigora. Malgré la disproportion des forces en présence et peut-être à cause de celle-ci, il décida d’attaquer. Ce fut le premier affrontement sérieux de cette nouvelle campagne.
À 10 heures du matin, la division Suchet sortit du bois où elle était dissimulée, formée en trois colonnes correspondant chacune à une brigade. Sur sa gauche, elle était flanquée par la division Gudin du corps de Davout et appuyée par celle de Gazan, également du 5 e corps, en seconde ligne prête à la soutenir. Tout de suite, elle fut prise sous le feu de l’artillerie russe mais, sur ce sol particulièrement collant, les canonniers avaient du mal à remettre les pièces en batterie après chaque coup, ce qui ralentit considérablement la cadence de tir.
Aussi, malgré l’état du terrain, l’attaque de Suchet progressait-elle, ce que voyant Bennigsen lança ses réserves contre le flanc de la brigade Claparède, la plus à droite. La colonne du centre commandée par Vedel se porta alors à sa rescousse pendant qu’un peu isolée, la colonne de gauche (Reille), retranchée dans un boqueteau, soutenait trois heures durant l’assaut des Russes. Perdu, repris, le bois resta finalement aux mains des Français. Suchet dirigeait l’ensemble de la division mais, vers treize heures, il fit prévenir Lannes qu’il aurait du mal à résister encore longtemps à la poussée des Russes. Lannes hésitait à lancer dans la bataille Gazan car, en face de lui, il y avait d’importantes unités russes et il craignait d’engager prématurément ses forces. À ce moment, sur la gauche, Gudin se porta de lui-même en avant. Il fut gêné par une tempête de neige et Bennigsen en profita pour lancer sur lui et dans l’intervalle, entre ses troupes et celles de Claparède, sa cavalerie. Voyant cette charge se préparer, Suchet ordonna à Claparède de se former en carrés et ses régiments brisèrent par leur feu l’élan de la cavalerie russe.
Cependant, Lannes hésitait à poursuivre son offensive car la nuit commençait à tomber. Il consulta Suchet et tous deux tombèrent d’accord pour différer jusqu’au lendemain matin l’effort qui permettrait de rejeter les Russes jusqu’au Narew. De son côté, Bennigsen, frappé par l’échec de ses tentatives pour refouler les Français, préféra décamper avant de se trouver
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