Le Maréchal Suchet
brigade : Claparède, Reille et Vedel. Entre les quatre hommes, la meilleure entente régnait. Renforcée pendant les mois de paix, la 1 ère division du 5 e corps finit par compter près de quinze mille hommes, du moins en théorie, alors que le corps de Lannes tout entier n’en alignait que vingt-cinq mille avec trois divisions. Il faut toutefois retenir avec prudence les chiffres des effectifs, car les états officiels de l’époque étaient souvent artificiellement gonflés, pour ne pas dire fantaisistes, afin de satisfaire à la manie des unités nombreuses et importantes de Napoléon.
Lannes était retourné à Paris où il séjourna tout l’été et, de ce seul fait, aucun de ses divisionnaires ne fut autorisé à partir en permission. Du reste, la situation politique laissait à présent craindre un conflit, probablement à l’automne. En juillet, une nouvelle coalition fut nouée contre la France toujours à l’instigation de la Grande-Bretagne. Outre celle-ci, elle comprenait la Prusse et la Russie. Un mois plus tard, la Prusse commença à mobiliser.
Napoléon fut assez lent à réagir. Longtemps, il crut aux possibilités de maintenir la paix. Ce fut seulement aux environs du 15 septembre qu’il donna des ordres pour concentrer les différents corps de la Grande Armée autour de la ville de Bamberg, en Franconie. Cette opération fut réalisée à la fin du mois. Là, se trouvèrent rassemblés six corps d’armée auxquels un peu plus tard vint se joindre la garde impériale. Napoléon lui-même n’arriva à Bamberg que dans les derniers jours du mois. Son intention était d’envahir la Prusse. Il disposait autour de Bamberg de cent soixante mille hommes et les Prussiens n’en avaient que cent mille à lui opposer directement. Les Russes étaient trop loin pour se trouver en mesure d’intervenir à leurs côtés.
L’empereur avait trois voies possibles pour mener son offensive : la première par le nord et le Hanovre ; la seconde en remontant le Main et en entrant en Saxe où se trouvait le gros des Prussiens ; la troisième en partant de Bamberg et en franchissant les monts de Thuringe. C’était la plus difficile mais elle permettrait de surprendre l’adversaire et ce fut celle-là qu’il choisit.
Dès les premiers jours d’octobre 1806, Napoléon divisa ses forces en trois colonnes et les mit en mouvement. Le corps de Lannes était en tête de celle de gauche qui comprenait, en outre, le corps d’Augereau et la division Suchet formait elle-même l’avant-garde de son corps d’armée. Il n’y eut pas véritablement de déclaration de guerre. Simplement, un ultimatum prussien exigeait que l’armée française ait évacué l’Allemagne le 8 octobre. Mais les premières escarmouches eurent lieu dès le 7. Ce jour-là, le corps de Lannes, et plus précisément la division Suchet, arriva à Cobourg. De là, elle marcha sur Saalburg qu’elle atteignit le 8. La progression des troupes françaises était si rapide que Napoléon multiplia les conseils de prudence.
Le 10 octobre au matin, le corps de Lannes atteignit la vallée de la Saale, venant du sud, et la division Suchet qui marchait toujours en tête occupa les collines surplombant la ville de Saalfeld. De là, le général découvrit dans la plaine des unités prussiennes qui prenaient position en avant de la ville, mais le dos à la rivière et sur un terrain qui paraissait assez marécageux. Le commandant de ce corps, le prince Louis de Prusse, homme impétueux et irréfléchi, était un des plus virulents tenants du clan anti-français. Son chef d’état-major, le général Muller, lui ayant fait observer qu’il choisissait fort mal sa position, se fit rembarrer, le prince lui déclarant que « pour battre des Français point n’était besoin de prendre des précautions ».
Cependant, Suchet, ayant solidement défini son emplacement au sommet des collines avec une de ses brigades, commença à descendre dans la vallée avec les autres, soutenu sur sa droite par son camarade Claparède. Ce fut alors que le prince Louis lança une attaque menée par dix bataillons prussiens et saxons pour reprendre les collines face à Claparède. Mais Suchet, avec seulement deux bataillons, tomba sur le flanc droit de la colonne et la mit en déroute. Les fantassins prussiens et saxons firent brusquement demi-tour et prirent la fuite. Sur un ordre de Lannes, Suchet, à la tête de ses deux autres brigades, déboucha vers treize
Weitere Kostenlose Bücher