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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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te fait du mal, ce suppôt de Satan, je le… Il jeta un regard anxieux aux enfants.
    — C’est peut-être pour moi qu’il vient, intervint Desdémone.
    — Ça veut dire que tu vas encore t’en aller ? demanda un garçon.
    — Je n’en sais rien. Si Louis l’exige, alors oui, je partirai avec lui. Je l’aime.
    — Louis ? C’est le nom du petit garçon qui habitait ici avant nous, fit remarquer la fillette.
    — Celui qui savait faire le pain aussi bien que le papy, renchérit le garçon qui, pendant que Clémence sortait, touillait pensivement sa soupe avec son doigt.
    Soudain, il dit :
    — Ça n’est pas le même, tu le sais bien. Il y a tout plein de Louis. Celui-ci est un géant. Lorsqu’il rentrera, je lui demanderai si c’est vrai que pour devenir grand et fort comme il l’est il faut manger tous ses haricots.
    — C’est bon, les haricots, dit la fillette.
    — Pouah ! Tu manges des vers de terre aussi.
    — Non, c’est pas vrai ! J’en ai mangé un seul, et c’était quand j’avais trois ans. Tu m’avais dit que c’était bon comme des marrons confits au miel.
    — Baissez le ton, les enfants, intervint Hugues.
    La fillette reprit, plus bas cette fois, et, surprise d’avoir la permission exceptionnelle de poursuivre cette conversation à table :
    — Je te parie mon orange entière, avec la peau et tout, contre ton sou que s’il s’en fait servir il les avalera jusqu’au dernier.
    — Tenu. Père, vous vous trompez de place.
    Hugues venait de s’asseoir en face de la porte fermée et il y jetait de fréquents coups d’œil tandis qu’il égrenait distraitement des croûtons dans son potage.
    Clémence s’appuya contre le mur, à droite de la porte. Il avait d’abord fallu qu’elle se fasse à l’idée de ce que son beau-frère était devenu. Et maintenant qu’elle l’avait devant elle, il fallait qu’elle s’habitue à son aspect qui, lui aussi, avait beaucoup changé. Louis n’était plus le grand roseau cassant qu’elle avait connu. Il mesurait une toise* et était devenu très costaud. Il dominait les gens d’au moins deux têtes. Cela en soi eût suffi à le rendre intimidant. Il avait tourné la tête en direction du fournil et semblait absorbé dans ses pensées. Lorsqu’il se retourna vers elle d’un geste brusque, elle haleta. Il regarda longuement sans rien dire le visage de sa sœur par alliance qui était éclairé par la flamme givrée de la lanterne.
    — Il y a de la farine dans tes cheveux, dit-il sans trop savoir pourquoi.
    — Je sais. Mais j’ai depuis longtemps renoncé à essayer de la faire partir. Ce sont des cheveux blancs.
    — Oh. Excuse-moi.
    — Cela n’est rien, voyons. Nous vieillissons tous.
    Pourtant, il était plus âgé qu’elle, il avait été sévèrement malmené, mais il n’avait pas un seul cheveu blanc. Il leva les yeux vers les fenêtres de l’étage. De petits nuages pressés se formaient près de son nez et filaient en vitesse dans l’air qui sentait la neige. Clémence demeurait immobile. Il abaissa de nouveau son regard sur elle.
    — Je ne vous veux pas de mal, dit-il doucement. Elle eut un halètement nerveux.
    — Est-ce que… tu désires reprendre ton cheval et ton mulet ?
    — Oui. Et Desdémone.
    — Je sais. Elle espérait ton retour.
    — Quoi ?
    — C’est elle qui a empêché Hugues de vendre tes… tes affaires. Elle ne pouvait croire que tu étais entré dans les ordres. Nous avons tout caché dans un endroit sûr. À cause des enfants, tu comprends ?
    — Ça va.
    — Louis, je…
    Clémence baissa la tête et se mit à triturer son tablier. Elle reprit :
    — Nous… Hugues et moi… nous sommes désolés de ce qui t’est advenu.
    — Laisse tomber, dit Louis, brusquement.
    — Rentrons. Il commence à neiger.
    — Attends.
    Louis l’arrêta d’un bras et dit :
    — La boulangerie est une censive de l’abbaye. Le père a écrit cela dans son testament. Tu le savais ?
    — Non, je l’ignorais. Hugues ne m’en a rien dit.
    — Il aurait dû. Mais peu importe. J’ai vu l’abbé. Tiens.
    Il lui remit un parchemin sur lequel elle reconnut la signature des Ruest, un trait sinueux encadré de deux autres semblables mais plus courts, disposés parallèlement. Clémence dit :
    — Est-ce que c’est…
    — Oui. C’est son testament. Brûlez-le.
    — Mais… mais, Louis, comment…
    Elle n’osa lui demander comment il avait obtenu ce document.
    — Disons

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